La tenue, à New Delhi, du 23e sommet entre dirigeants russes et indiens a confirmé la vigueur d’un partenariat que Vladimir Poutine et Narendra Modi qualifient de « relation de confiance fondée sur le respect mutuel ». Cette visite d’État de deux jours, marquée par un forum économique et la signature de seize accords, s’est conclue par une déclaration commune qui esquisse les priorités de la coopération jusqu’à l’horizon 2030.

Sur le terrain politique, Moscou a réaffirmé son appui à une réforme du Conseil de sécurité de l’ONU incluant l’Inde comme membre permanent. Les deux capitales défendent un ordre international présenté comme « multipolaire » et souhaitent renforcer les plateformes multilatérales où elles agissent de concert. Modi, accueillant Poutine avec chaleur malgré les tensions entre New Delhi et Washington liées aux achats d’hydrocarbures russes, a rappelé que l’Inde défend « une position favorable à la paix » concernant l’Ukraine, même si le communiqué final ne mentionne pas directement le conflit.

La coopération économique constitue l’autre pilier majeur. Le commerce bilatéral a atteint un record de 68,7 milliards de dollars en 2024-2025, mais reste fortement déséquilibré en faveur de la Russie. Pour corriger ce déséquilibre, les deux pays ont adopté un Programme de développement économique stratégique et se sont engagés à élargir les corridors de transport, à renforcer leur présence commune en Arctique et en Extrême-Orient russe, et à favoriser les investissements croisés. Plusieurs accords importants concernent les engrais, les douanes, la mobilité ou encore la formation maritime en zones polaires.

L’énergie demeure toutefois la clé du partenariat. La Russie fournit environ un tiers du pétrole brut importé par l’Inde, et les deux dirigeants veulent approfondir la collaboration dans les hydrocarbures, la pétrochimie, le GNL, les technologies d’exploration et la filière nucléaire, notamment autour de la centrale de Kudankulam. Moscou se dit également prête à augmenter massivement ses importations de biens indiens pour rééquilibrer la balance commerciale.

Le secteur de la défense évolue lui aussi. Sans abandonner son statut de principal fournisseur d’armements à l’Inde, Moscou oriente désormais son partenariat vers la recherche conjointe, le codéveloppement et la coproduction, dans le cadre du programme « Make in India ». L’idée est de fabriquer localement pièces détachées, systèmes et équipements, avec des transferts de technologies permettant ensuite d’exporter vers des pays tiers.

Enfin, l’innovation technologique s’impose comme un domaine d’expansion. Poutine a proposé un vaste partenariat indo-russe en intelligence artificielle et confirmé la participation de haut niveau de la Russie au sommet international sur l’IA prévu en Inde en 2026. En retour, Modi a été invité pour le prochain sommet bilatéral, qui se tiendra l’an prochain en Russie.

Au terme de ces échanges, un message clair se dégage : malgré les pressions occidentales, Moscou veut faire de sa relation avec New Delhi un axe majeur de sa stratégie globale, combinant énergie, défense, commerce et technologies de pointe.