l’essentiel
Au Centre d’essais ferroviaire de Valenciennes, la première rame du futur métro toulousain a effectué ses premiers tours de roues. Xavier Champaud, chef de projet chez Alstom, détaille les enjeux de ces essais et les innovations apportées à ce matériel roulant.
Qu’avez-vous testé lors de cette première sortie sur piste ?
Nous sommes sur la validation du train en tant qu’objet industriel : sa capacité à rouler, à freiner, à accélérer, son comportement sur la voie.
On observe la dynamique du matériel : bruit, roulis, comportement en courbe… Ces essais s’étalent sur plusieurs mois et monteront progressivement en vitesse, jusqu’à 80 km/h, sa vitesse maximale en exploitation.

La première rame de la ligne C à Valenciennes au Centre d’essais ferroviaires d’Alstom, le 5 décembre 2025.
DDM – C. Dm.
Une fois cette phase terminée, que va-t-il se passer ?
Quand nous aurons validé la rame, nous entrerons dans la phase système. Ce sera l’intégration avec la conduite automatique, les équipements embarqués, la signalisation qui sera installée dans la voie. C’est une étape clé : on passe de « le train marche » à « le système complet fonctionne ».
Deux rames ont déjà été construites. Où est la seconde ?
La première est ici à Valenciennes, la seconde est encore en Pologne, sur le site d’assemblage de Katowice. Elle arrivera fin décembre.
Les deux rames seront exploitées conjointement pour des essais à partir de l’an prochain. La première effectuera 10 000 km ; la seconde, 500 km. La rame test repartira ensuite en usine pour intégrer toutes les améliorations relevées pendant les essais.

Les stations de la future ligne C dans la première rame. Ceci n’est pas la version définitive, qui sera lumineuse.
DDM – C. Dm.
« L’expérience voyageur et l’accessibilité ont été au cœur du design »
Quelles innovations centrales va découvrir le public toulousain ?
D’abord l’espace : la rame est de type « boa », totalement traversante. Les voyageurs pourront circuler d’un bout à l’autre, ce qui limite l’isolement et répartit les flux.
Les portes sont plus larges, ce qui accélère les montées-descentes. La climatisation est renforcée pour supporter les étés toulousains. À bord, l’information voyageurs sera très lisible : écran, LED de progression de ligne, annonces sonores.

Xavier Champaud, directeur de projet ligne C chez Alstom France.
DDM – C. Dm.
Les associations de personnes handicapées ont participé à la conception…
Oui, c’était essentiel. L’ergonomie permet le passage de poussettes, fauteuils roulants, sans obstacle majeur. Nous avons beaucoup travaillé sur les hauteurs, la largeur de circulation, les contrastes visuels, l’appui automatique. Toulouse accueillera un métro plus inclusif.
Ce métro repose sur la gamme Metropolis. Qu’est-ce qui change par rapport à d’autres applications ?
La plateforme mécanique et structurelle est éprouvée, ce qui sécurise le projet. Ce qui varie, ce sont l’aménagement intérieur, la livrée, la puissance d’alimentation, les équipements électroniques, la cybersécurité.
L’innovation se situe beaucoup dans le software et la capacité à faire évoluer le matériel par mise à jour. C’est un métro pensé pour durer plusieurs décennies.
« Livrer 27 rames d’ici 2028, c’est un marathon industriel »
Combien de personnes travaillent sur ce projet ?
Entre 400 et 600 personnes chez Alstom. Ce chiffre va grimper quand nous entrerons en phase de production et d’installation, avec jusqu’à 300 personnes mobilisées simultanément. C’est un projet structurant pour l’écosystème industriel français.
Quel est le calendrier jusqu’à la mise en service ?
La livraison débutera mi-2027 et s’étalera jusqu’au début 2028. Les 27 rames doivent être disponibles pour la mise en service fin 2028.
Une fois toutes livrées, elles tourneront à Toulouse en mode « carrousel », c’est-à-dire comme en exploitation réelle, mais à vide. On respecte l’horaire, les arrêts, les séquences d’exploitation.

La livrée bleu ciel et brique des rames de la future ligne C du métro de Toulouse.
DDM – C. Dm.
Qu’attendez-vous de cette phase d’essais ?
Qu’elle révèle tout ce qu’il faut améliorer. Le but n’est pas de rouler pour rouler. On analyse chaque vibration, chaque écart. Mieux vaut découvrir un problème ici qu’en exploitation. Quand la rame aura ses 10 000 km, nous saurons qu’elle est fiable.
Un moment symbolique pour vous ?
Oui. Quand on voit la rame quitter le hangar pour la première fois, après des années d’ingénierie, c’est toujours un frisson. On se dit : ça y est, elle existe. Et bientôt, elle transportera des milliers de Toulousains chaque jour.