Un rapport de l’Observatoire Français des drogues et des tendances addictives (OFDT), parue ce lundi, estime à 6,8 milliards d’euros le chiffre d’affaires des drogues illicites en 2023, soit un quasi-triplement en 13 ans. La cocaïne se hisse en tête du marché.
Rien ne semble arrêter le marché français des drogues illicites. Entre 2010 et 2023, les ventes de drogues ont augmenté de 189%, estime une étude de l’Observatoire Français des drogues et des tendances addictives (OFDT), parue ce lundi 8 novembre. Évaluées à 6,8 milliards d’euros en 2023, les ventes reposent sur deux produits phares : la cocaïne et ses 3,1 milliards de chiffre d’affaires prenant désormais l’ascendant sur le cannabis, représentant 2,7 milliards en 2023. L’Observatoire constate par ailleurs une explosion de la vente de drogues de synthèse.
Un marché qui aurait quasiment triplé en treize ans
Pour arriver à ces chiffres, l’OFDT, en partenariat avec la Mission interministérielle contre les drogues et les conduites addictives, MILDECA, a privilégié une approche par le bas (bottom-up). Grâce aux remontées de terrain, et aux enquêtes épidémiologiques auprès des consommateurs de drogues illicites, les chercheurs ont déduit les dépenses de consommation à l’échelon national.
L’étude, intitulée « Taille des marchés des drogues illicites en France (2010-2023) », classe les données récoltées dans trois scénarios : estimation basse, centrale et haute. Aussi, le chiffre d’affaires des drogues illicites est estimé entre 3,8 et 9,7 milliards d’euros. En prenant comme valeur centrale 6,8 milliards, les chercheurs calculent un quasi-triplement du montant total des ventes depuis 2010.
L’ascension fulgurante de la cocaïne
Au cours des treize années étudiées, la consommation de cannabis se serait stabilisée. En volume, ce dernier reste la drogue la plus consommée, avec ses 397 tonnes à l’année. Largement devant la cocaïne et ses 47 tonnes. La cocaïne, bien plus lucrative que le cannabis, arrive toutefois en tête du marché. D’après les chercheurs, elle enregistre une progression de 214%, contre «seulement» 77% pour le cannabis. Entre 2017 et 2023, la progression du cannabis a ralenti, avec une croissance de 3,4%. Un plateau que les chercheurs expliquent par «une nette diminution de la consommation (…) chez les jeunes».
Outre la forte progression de la cocaïne, l’étude observe une explosion des ventes de psychostimulants. «Depuis 2010, le marché de l’ecstasy/MDMA a progressé de +637 % et celui des amphétamines de +470 %», avertissent les chercheurs. «Si le chiffre d’affaires de l’ecstasy/MDMA est bien moins élevé que celui de la cocaïne, il enregistre la plus forte hausse de toutes les drogues en valeur avec 637 % de croissance entre 2010 et 2023.»
Recomposition des marchés
Ces évolutions spectaculaires témoignent d’une recomposition des marchés, galvanisés par des prix toujours plus «bon marché». Pour la cocaïne, l’«augmentation des quantités produites en Amérique du Sud, obtenue grâce à des gains de productivité», ne serait pas étrangère à cette tendance, écrivent les chercheurs. La bonne santé de ces circuits interlopes, notent-ils repose aussi sur des pratiques commerciales de plus en plus sophistiquées et difficilement quantifiables : «effets discount, logiques promotionnelles, packaging attractif».
Des résultats sans ambages, qui donnent un aperçu de l’immense chantier que représente la lutte contre le trafic de drogue. «La spectaculaire progression du marché de la cocaïne, qui met à l’épreuve les forces de sécurité, la Justice, les professionnels de santé et tous nos territoires, souligne la nécessité de renforcer l’action publique, tant sur le volet de l’offre que de celui de la demande» a abondé le Dr Nicolas Prisse, président de la MILDECA, dans le communiqué de presse attaché à l’étude.