Une dépêche sur des cours de boxe anglaise réservés aux femmes, une autre sur le cinéma un peu oublié d’Alban Minville ou encore une enquête sur la pénurie de médecins… Depuis mars 2024, la petite agence de presse Mon quartier, my life a fait du Grand Mirail, à Toulouse, son terrain d’information. Basée à Bellefontaine, dans les locaux de la Maison de l’orientation, son équipe d’« apprentis » journalistes, composée de trois jeunes en service civique, met en lumière des initiatives, projets et acteurs associatifs issus de ces quartiers prioritaires de la ville où vivent 35.000 habitants.
Ce programme inédit, lancé par le Club de la presse Occitanie, accueille cette année sa deuxième promotion, recrutée parmi une quinzaine de candidats. « Le dispositif Mon quartier, my life est parti d’une réflexion de nos adhérents sur le traitement assez partial qu’ont les médias des quartiers populaires. Notre premier objectif avec cette agence de presse de proximité, est de permettre aux médias d’envisager une autre couverture de ces quartiers, au-delà de la rubrique des faits divers. Le second est de former des jeunes issus de la diversité au travail journalistique et de les aider à préparer des concours d’entrée aux écoles de journalisme », explique Agnès Maurin, directrice régionale du Club de la presse Occitanie.
La parole aux habitants
Deux journalistes professionnels en résidence, Sophie Arutunian et Benjamin Bourgine, les accompagnent dans cette sorte de « prépa » qui a permis l’année dernière à une recrue de la première promotion d’intégrer une école à Marseille. Tout le contenu de l’agence MQML est proposé gratuitement à la quarantaine de journalistes abonnés à ce jour. « L’un de nos piliers est de donner la parole aux habitants du quartier et de montrer ce qui s’y passe en dehors des problèmes de drogue, d’immeubles délabrés qui sont déjà largement traités par d’autres médias. Les jeunes trouvent leurs idées de reportage, nous préparons avec eux les questions et nous relisons leur papier en les retravaillant si nécessaire pour qu’ils soient publiables. Les dépêches peuvent donner des idées à des médias qui vont décider de traiter le sujet eux-mêmes. Elles peuvent être réécrites ou reprises telles quelles, en citant l’agence », précise Sophie Arutunian.
En plus de leur contrat de 24 heures en service civique, certaines jeunes recrues de MQML ont intégré cette année le dispositif de l’association La Chance, pour la diversité dans les médias, qui prépare gratuitement des étudiants boursiers aux épreuves des quatorze écoles de journalisme reconnues par la profession. C’est le cas de Chemsi El Sid, 21 ans, diplômée d’une licence de langues, littératures et civilisations étrangères, qui vise des écoles à Toulouse et Strasbourg. « Je ne me sens jamais plus épanouie que derrière un stylo ou une caméra », confie la jeune fille bien décidée à faire entendre d’autres voix en rejoignant cette profession « en péril » face aux entreprises de désinformation.
Pour le Club de la presse, qui finance totalement ce dispositif inédit avec l’aide de partenaires publics et privés, notamment la mairie de Toulouse, la Région avec la mise à disposition d’un bureau dans les locaux de la Maison de l’orientation, la Fondation Groupe SNCF et la Fondation d’entreprise Banque Populaire Occitane, le modèle économique reste à pérenniser. Son projet est de proposer aussi du contenu vidéo et audio et d’investir, pourquoi pas, de nouveaux quartiers.
Johanna Decorse
Sur la photo : Sophie Arutunian fait partie des deux journalistes qui encadrent les jeunes recrues de la promotion 2025-2026, Vanessa Ekhaguere, Chemsi El Sid, à ses côtés, ainsi qu’Amaury Decool. Crédit : J. D.-ToulÉco.