Les données AIS, soit Système d’identification automatique, de tous ces presque 1.400 navires ont été étudiées dans le cadre de l’enquête, entre 2020 et 2025. Ce système donne des informations importantes sur chaque appareil, comme son identité, sa position, son cap ou sa vitesse, entre autres. Il est obligatoire pour tous les plus gros bateaux de diffuser leurs données AIS. S’ils ne le font pas, ils sont considérés comme des bateaux fantômes.

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Et c’est exactement ce phénomène d' » invisibilité » qui a pris de l’importance ces dernières années. Plus précisément, les navires étudiés par nos confrères coupent la diffusion de leurs données AIS pendant une certaine période, avant de les réactiver et de réapparaître aux yeux de tous, ailleurs. Par exemple, en août 2024, un cargo panaméen a navigué depuis le sud de l’Europe jusque dans la Manche, où il a coupé ses données AIS, avant de les réactiver 18 heures plus tard pendant quelques minutes, juste à la frontière des eaux internationales dont la Belgique est responsable. Ensuite, le navire disparaît à nouveau, avant d’émerger à nouveau 1.800 km plus loin, près de Saint-Pétersbourg.

Comme l’explique la VRT, ceci n’est qu’un exemple parmi tous ceux analysés. Et la Défense belge a elle aussi remarqué que ces coupures dans les données AIS arrivaient de plus en plus souvent. « Il s’agit en effet d’un phénomène de plus en plus fréquent, mais pas uniquement dans nos eaux, c’est une constatation mondiale », explique un responsable à la VRT.

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Mais pourquoi ces bateaux interrompent-ils le système AIS ? « Si la désactivation de l’AIS est intentionnelle, c’est bien sûr pour dissimuler certaines activités ou positions », indique Thomas De Spiegelaere, qui travaille pour la cellule Sécurité maritime de la marine marchande. Il explique à nos confrères que les bateaux qui utilisent cette stratégie peuvent être des navires qui se transfèrent des cargaisons de l’un à lautre, par exemple. La raison principale, selon les experts de la Sécurité maritime, c’est que ces bateaux veulent échapper à toutes sanctions, en masquant leurs informations. Pour la flotte russe, cela peut aussi permettre d’éviter les attaques, ou d’effectuer des repérages ou sabotages dans des infrastructures maritimes, notamment en mer du Nord.

Un bateau qui se rend invisible au niveau des données AIS peut tout de même être repéré, de manière classique : « Nous devons alors obtenir une confirmation visuelle. Les navires dont nous savons qu’ils désactivent régulièrement leur AIS et qui se dirigent vers notre zone sont suivis autant que possible », détaille encore Thomas De Spiegelaere. « Dès qu’un navire pénètre dans nos eaux territoriales, nous le remarquons immédiatement. Par exemple, un navire sans AIS ne peut pas entrer dans nos ports sans être repéré ».

« Si l’Union européenne impose une telle décision à la Belgique, notre pays devra réagir. Ce serait inacceptable »