Laure Pophillat

Article mis à jour le 09/12/2025

Le musée Guggenheim d’Abou Dhabi. © Photo courtesy TDIC and Gehry Partners, LLP.
L’architecte américano-canadien est mort ce 5 décembre 2025, laissant derrière lui une architecture tout à la fois populaire, destructurée et spectaculaire. Retour sur ses réalisations les plus iconiques.

Que l’on apprécie, ou pas Frank Gehry (ses édifices sont tout autant admirés que contestés), l’architecte américano-canadien a marqué durablement l’architecture mondiale avec ses réalisations originales, complexes et spectaculaires. Considéré par beaucoup comme un génie, il incarnait à merveille  l’audace, « le rêve sous drogue d’un bâtiment impossible », comme il définissait lui-même ses œuvres les plus emblématiques. Il « laisse une œuvre qui a profondément marqué la communauté architecturale et bien au-delà », déclare la Cité de l’architecture et du patrimoine dans son communiqué.

Frank Gehry s’est éteint, le 5 décembre 2025 à Santa Monica (Californie), à l’âge de 96 ans.

Retrospective, via six bâtiments iconiques.

 

 

Binoculars Building, Los Angeles (1985-1991)

Le Binoculars Building est le siège social de la côte Ouest de l’agence de publicité Chiat/Day (devenue depuis TBWAChiatDay) puis de l’agence de publicité DDB Worldwide. Ce bâtiment, situé dans le quartier de Venice (Los Angeles) se distingue par les trois styles différents utilisés pour ses façades, dont la plus impressionnante est évidemment celle formée par une paire de jumelles, signée des artistes Claes Oldenburg et Coosje van Bruggen, dont les oculaires font office de puits de lumière.

 Le Binoculars Building. © Pinterest

 

 

Vitra Design Museum, Weil am Rhein, Allemagne (1989)

 

Le Vitra Design Museum rassemble une importante collection de meubles et de chaises. © Wladyslaw / Wikipédia

 

Le Vitra Design Museum est le premier projet européen de Frank Gehry : c’est à la suite d’un incendie qui détruisit la majeure partie de ses usines que Vitra décida de reconstruire son site industriel à la manière d’un parc d’architectures, dont il confia la réalisation à Frank Gehry. Le bâtiment, d’une surface d’exposition de 700 mètres carrés, est un assemblage de tours, rampes et cubes dont les formes sont dictées par leur fonction comme la distribution de la lumière. 

 

 

La « maison dansante » (1994 – 1997)

Avec ses sept étages, la « Maison qui danse » ou « Maison dansante », toute de verre et de béton vêtue, de style déconstructiviste (ou « nouveau baroque »), œuvre des architectes Vlado Milunic et Frank Gehry, fait la joie des touristes visitant Prague, notamment parce que le bar du septième étage fait partie des meilleurs rooftops de la capitale et permet de jouir df’une vue imprenable sur le château.

C’est Václav Havel qui émit le premier l’idée de bâtir un édifice place Jirásek, sur un site laissé vacant depuis le bombardement par erreur (Prague avait alors été confondue avec Dresde…) des Américains d’un bel immeuble néo-Renaissance du 19e en février 1945.

L’idée originale de Milunic était celle d’un bâtiment composé de deux parties, statique et dynamique, devant symboliser la transition de la Tchécoslovaquie d’un régime communiste à une démocratie parlementaire. Les architectes construisirent donc deux tours (les tours d’angle sont une des caractéristiques de l’architecture praguoise) qui semblent s’enlacer avec un effet de mouvement ondulatoire.

 

La « maison dansante », chef d’œuvre architectural pragois. © Danny Alexander Lettkemann, Architekt

 

 

Le musée Guggenheim, Bilbao (1993-1997)

Toutefois, c’est sans doute le musée Guggenheim à Bilbao (Espagne) qui fit internationalement connaître Frank Gehry, même s’il ne faut pas omettre le Walt Disney Concert Hall de Los Angeles (États-Unis, 2003), la Fondation Louis Vuitton à Paris (2006), la Cinémathèque française à Paris également (1994), etc. Mais le musée d’art moderne et contemporain en forme de construction cubiste, caractéristique de l’approche déconstructiviste tout en courbes de l’architecte, assemblage singulier de pierre, de verre et de titane, devint rapidement la coqueluche les foules. Grâce à lui, « l’effet Bilbao » désigne la capacité qu’un équipement culturel a de dynamiser un territoire.

 

Le musée Guggenheim, Bilbao. © Naotake Murayama / Wikipédia

 

 

Hôtel Marqués de Riscal, Elciego, Espagne (2003-2006)

Planté au milieu des vignes dans la région de la Rioja au Pays basque (Espagne), cet hôtel à la structure futuriste se développe tout en vagues, dans un entrelacs de rubans de métal aux nuances colorées scintillantes au soleil. Associant la pierre, le verre et le titane, l’ensemble du bâtiment a été dessiné par Frank Gehry ainsi qu’une partie du mobilier des 43 suites.

 

Hotel Marques de Riscal. © Igorre1969 / Wikipédia

 

 

Fondation Luma, Arles (2007-2019)

L’auteur du « Vaisseau de verre » de la Fondation Louis Vuitton livra à Arles (France) une architecture contextuelle : l’institution arlésienne rassemble six bâtiments, dont cinq historiques, réhabilités, et la pièce maîtresse, la tour Luma de Gehry, une tour de 56 mètres de hauteur. L’architecte star souhaitait « évoquer l’ancrage local » de la ville avec ce bâtiment, en créant une hybridation entre le passé romain de la ville et son fameux style futuriste. L’édifice torsadé compte 11 000 panneaux métalliques réfléchissants, rappelant des écailles de poisson.

Soutenue par la mécène Maja Hoffmann, la Fondation Luma se niche au milieu du Parc des Ateliers, dix hectares de friche industrielle reconvertis en institution culturelle.

 

La tour Luma. © Adrian Deweerdt

 

 

L’héritage

Frank Gehry demeurera dans l’histoire de l’architecture comme l’architecte se distinguant par une approche organique, sculpturale, fluide, romptant avec les formes rigides et conventionnelles d’une architecture plus traditionnelle. Il puisait son inspiration dans la nature et les formes organiques, cherchant à créer des bâtiments fusionnant avec leur environnement, au style unique et reconnaissable entre tous avec l’utilisation de matériaux tels que le titane, le verre et le béton. De fait, ses bâtiments se déploient souvent de manière non linéaire, avec des courbes et angles inattendus qui défient la symétrie et l’ordre établi.

L’héritage de Frank Gehry, c’est également sa formidable capacité à jouer avec la lumière et l’ombre, créant des effets visuels saisissants qui animent ses structures et leur confèrent une dimension théâtrale. Ses conceptions se caractérisent par une profondeur et une complexité visuelles, invitant les spectateurs à explorer et à interagir avec l’architecture de manière stimulante et interrogative.

Le musée Guggenheim d’Abou Dhabi, conçu par Frank Gehry et proposé pour la première fois en 2006, devrait enfin être achevé en 2026 après une série de retards de construction et des travaux sporadiques. La structure de 30 000 pieds carrés (2 787 m2) sera le plus grand Guggenheim au monde et déposera son empreinte durable dans la capitale des Émirats arabes unis, comme dans le monde entier. Mais là rien de surprenant, pour une œuvre de Frank Gehry.

 

Le musée Guggenheim d’Abou Dhabi. © Photo courtesy TDIC and Gehry Partners, LLP.

Source : batirama.com / Laure Pophillat / © Photo courtesy TDIC and Gehry Partners, LLP.