Publié le
9 déc. 2025 à 17h58
À partir du 1er juillet 2026, les joueurs de rugby amateur de toute la planète devront plaquer en-dessous du sternum. Cette nouvelle règle, proposée par le Bureau exécutif de World Rugby, doit encore être entérinée par son Conseil, mais cela devrait être une formalité (en toute logique et sauf improbable retournement de situation).
Baisse des plaquages dangereux
Une mesure destinée à préserver l’intégrité physique des joueurs et déjà expérimentée depuis 18 mois dans les championnats amateurs de 11 Fédérations. Elle a permis de mesurer près de 150 000 plaquages, et montré que les plaquages hauts « ont diminué de 6% dans le rugby masculin et 9% dans le rugby féminin », révèle World Rugby dans un communiqué. « Si on extrapole ce chiffre au nombre de matchs amateurs disputés dans le monde, cela représente des dizaines de milliers de plaquages plus sûrs pour les joueurs ».
La FFR est citée dans le document, la France ayant été « la première nation à utiliser une hauteur de plaquage plus basse en amateur ». En effet, depuis 18 mois, toutes les catégories à partir de la Fédérale 2 (l’équivalent de la 6e division) doivent plaquer en-dessous de la taille. Ce n’est pas la seule modification : les plaquages à 2 sont également interdits, ainsi que l’action de se baisser, tête et buste en avant, quand on va au contact.
Florian Grill : « Un travail de lobbying intense »
« Deux études ont été menées », expliquait le président de la FFR Florian Grill dans l’Équipe il y a quelques jours. « Une avec des clubs amateurs volontaires pour recenser la totalité de l’accidentologie. Une autre pour comparer cette accidentologie entre la Fédérale 2, où les plaquages bas sont obligatoires, et la Fédérale 1, où ce n’est pas le cas. On constate sur cette deuxième étude une baisse de 55 % d’accidentologie tête cou en Fédérale 2 ».
Des données partagées à World Rugby depuis plusieurs années : « Cela a été un travail de lobbying intense, notamment face à des nations plus attachées au rugby à 7 et au rugby à XIII et qui sont un peu moins »fans » de cette question des plaquages bas », a reconnu Florian Grill. « On a réussi à faire avancer la cause, 11 fédérations ont ensuite permis de mener cette étude mondiale, et c’est une petite victoire aujourd’hui pour la FFR et pour la protection des pratiquants. »
Des difficultés d’interprétation sur le terrain
Reste qu’en pratique, la mise en application de la règle n’est pas si simple. Patrick Furet, manager de Rodez (Fédérale 2), témoigne auprès d’Actu Rugby : « Si elle est correctement appliquée, cette règle est une bonne idée : pour l’intégrité physique des joueurs mais aussi en termes de jeu, car ça permet d’avoir les bras libres et plus de continuité dans le jeu », nous a-t-il expliqué.
Il y a toutefois un bémol de taille pour l’ancien coach de Dax et Castres : « L’application dépend des arbitres, de leur niveau et de leur sensibilité. La problématique, c’est que nous avons un seul arbitre central. Les matchs avec 3 arbitres sont très rares, et à la demande des clubs. Donc d’un week-end à l’autre, certains mettent le curseur un peu plus haut, d’autres un peu bas. Il y a des incohérences et on est dans l’adaptation permanente ».
Des différences d’interprétation lourdes de conséquences à certains moments : « Nous avons déjà connu des cas litigieux », reprend l’ancien 3e ligne. « Il n’y a qu’un seul arbitre qui juge la zone de plaquage et pas de vidéo, alors quand la décision est prise, elle est prise… L’an dernier, en quart de finale, nous avons reçu un carton rouge sur une situation qui n’en méritait pas ».
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Plus de continuité dans le jeu
Depuis la mise en place de l’expérimentation, le plaquage est travaillé différemment à l’entraînement, bien sûr. « On bosse de manière à être les plus disciplinés et les moins sanctionnés possible pour des gestes où on demande de la maîtrise. Le plaquage à 2 est interdit également, il faut aussi faire avec ça ».
C’est tout qui change, au-delà de la simple technique de plaquage : « Avec une zone plus basse, on a les bras plus libres et nous, on essaie de prôner la continuité du jeu », explique Patrick Furet. « Mais ça dépend des conditions et de beaucoup de choses. Il y a des fois où on est trop dans les offloads. En permanence, il faut de l’adaptabilité et de la régulation par rapport à l’adversaire, par rapport à l’arbitre, par rapport aux conditions climatiques. Bref, c’est plutôt bien dans l’idée, mais il faut que les équipes et les arbitres aient la même trame ».
À plus petit niveau, dans les séries régionales, même son de cloche. Lors d’un échange informel avec un joueur de Régionale 2, ce dernier nous confirmait la complexité à s’adapter à l’arbitrage concernant la hauteur des plaquages tolérés ou non d’un match à l’autre. Mais aussi, pour ceux qui débutent le rugby et qui ont moins de technique, les difficultés à bien plaquer aux jambes.

La règle du plaquage sous le sternum chez les amateurs sera effective cet été, et pourrait être étendue. (©Paul Halbedel – Voix du Midi Lauragais)Une application à la Coupe du monde U20 ?
Compliqué pour les moins expérimentés, mais pour les plus aguerris également : « Il y a des joueurs qui viennent de plus haut niveau et qui n’appliquent pas forcément la règle. C’est dur pour eux car ils ont toujours plaqué et défendu comme ça », éclaire Patrick Furet. « On essaie de les sensibiliser et de réguler le tir. Une question d’adaptation encore une fois ».
Il va falloir s’y faire en tout cas, car la mesure devrait être définitivement entérinée l’été prochain. Elle pourrait même être étendues dans d’autres compétitions, à l’image de la Coupe du monde U20.
« Selon moi, il faut aller au-delà du rugby amateur. Une Coupe du monde U20, on n’est pas encore complètement dans le rugby professionnel, mais on est sur un rugby extrêmement engagé et il faut protéger nos pratiquants, surtout les plus jeunes », a déclaré Florian Grill. Une nécessité, sûrement, et une véritable révolution.
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