À chaque fois qu’un nouveau Premier ministre est nommé, nous lui présentons notre liste noire des plans sociaux en France, a annoncé ce mardi 9 décembre la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet. D epuis 18 mois que la CGT tient ce décompte, il est passé de 130 plans sociaux en mai 2024 présenté à Gabriel Attal, à 250 en janvier 2025 à François Bayrou, à plus de 400 plans de licenciements en décembre 2025 présentés à Sébastien Lecornu.
Exemple ? Rien que Nokia, notamment à Lannion (Côtes-d’Armor), lance un plan de licenciement tous les 18 mois, via des ruptures conventionnelles collectives. Le dernier en date est de 87 salariés à Lannion alors que l’entreprise avait juré de conserver les effectifs sur ce site de cybersécurité, déplore Sophie Binet. Ce site est maintenant menacé alors que le groupe Nokia continue, lui, à bien se porter.
Cette carte tenue à jour par la CGT affiche désormais 483 plans de suppression d’emplois sur la période courant de septembre 2023 au 5 décembre 2025. Si les localisations géographiques ne sont pas identifiées pour tous ces plans, ce sont 364 sites à caractère industriel qui sont identifiés. 107 562 emplois menacés ou supprimés, dont 46 560 pour la seule industrie.
Et le syndicat de salariés d’annoncer aussi que ces chiffres seraient sous-estimés car non rendus publics, alors que le comité ministériel de la restructuration industrielle les a.
Le ministère du Travail a de son côté communiqué sur 600 plans en 2024.
Créer une cellule de crise nationale
Depuis 18 mois, il y a une reconfiguration du capitalisme avec la nouvelle donne géopolitique et l’arrivée de Donald Trump et peu de secteurs échappent à cette reconfiguration. Automobile, chimie et textile depuis de longs mois. Mais aussi l’agroalimentaire comme récemment avec l’exemple de Teisseire. Le groupe Carlsberg, propriétaire de la célèbre marque de sirop français, a annoncé la fermeture de l’usine de Crolles et la délocalisation de la production vers Le Havre chez Slaur-Sardet.
Pour la CGT, des leçons urgentes sont à prôner : un moratoire sur les licenciements mais aussi une cellule nationale de gestion de la crise industrielle. Elle serait pilotée par le ministère de l’Économie et pourrait rassembler les syndicats, Bpifrance, la Caisse des dépôts, la Banque de France et les services de l’état. Avec une déclinaison en préfecture.
La CGT demande aussi à réformer les tribunaux de commerce. Ce n’est plus possible que les salariés ne soient représentés dans ces instances. Avec un droit d’appel devant ses tribunaux.
Les salariés sont toujours des passagers clandestins dans ces procédures, alors que ce sont eux qui portent le made in France.La CGT va d’ailleurs lancer une journée made in France chez Duralex le 12 mars 2026, pour soutenir la relocalisation face à cette désindustrialisation.
Des salariés représentés dans les tribunaux de commerce ?
Interrogé au sujet des tribunaux de commerce, Michel Peslier, président de la Conférence générale des juges consulaires de France, mais aussi président du Tribunal de commerce de Laval en Mayenne, ne dit pas le contraire pour cette évolution : Comment peut-on imaginer que le capital humain d’une entreprise, à travers ses salariés, ne soit pas représenté ? Il n’apparaît pas dans l’actif du bilan alors que c’est lui qui apporte la plus value. Sans capital humain, pas de valeur dans l’entreprise.
Commentant ces plans sociaux et les 100 000 emplois menacés : Ces emplois sont menacés mais cela ne veut pas dire licenciés, il faut le prendre en compte. D’où le travail des tribunaux de commerce pour trouver des solutions.
Un corollaire avec le record de créations entreprises ?
En parallèle, la France n’a jamais connu autant de création d’entreprises. En 2024, un million d’entreprises ont été créées, selon l’Insee. Une relation ? Pas directement, pour Michel Peslier, il s’agit plutôt de deux phénomènes parallèles. Les entreprises qui se créent ne sont pas celles qui disparaissent, mais l’ampleur des créations contribue à maintenir un tissu entrepreneurial globalement dense. En d’autres termes, la France connaît un fort renouvellement de son paysage économique : beaucoup d’entreprises naissent, beaucoup disparaissent, mais le stock total progresse encore.
Bpifrance, qui vient de publier sa nouvelle étude sur l’indice entrepreneurial en France, qui n’a jamais été aussi élevé, pense qu’il y a quand même une corrélation. Un million de créations d’entreprises chaque année depuis 2018, même si deux tiers sont des micro-entreprises, font monter les chiffres commente Philipe Mutricy, directeur des études chez Bpifrance.