Dans la nuit du 18 au 19 février, une voiture-bélier avait été projetée volontairement contre l’entrée de la nouvelle bibliothèque Chantal-Mauduit, inaugurée deux mois plus tôt. Le véhicule avait ensuite été incendié, provoquant un embrasement fulgurant du rez-de-chaussée et de la toiture. Les pompiers, mobilisés en nombre, avaient dû ouvrir le toit pour atteindre les foyers internes.

Une nuit de violences dans un climat déjà tendu

Selon les autorités, la voiture-bélier a été lancée alors que des tensions violentes secouaient le quartier. Dès 20h, policiers et CRS avaient essuyé projets de projectiles et tirs de mortiers, sans blessés. Divers conteneurs avaient été incendiés pour ralentir la progression des forces de l’ordre. L’intérieur du bâtiment a été décrit comme « complètement détruit ».

L’incident s’inscrivait dans un contexte local marqué par d’autres violences, notamment l’attaque à la grenade d’un bar associatif du Village Olympique une semaine plus tôt, qui avait fait quinze blessés. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau avait dénoncé une dérive mafieuse visant les services publics. Le maire écologiste de Grenoble, Éric Piolle, au nom de l’équipe municipale, s’était dit « écoeuré ».

Dès le lendemain de l’incendie, la Ville de Grenoble avait annoncé la reconstruction du bâtiment. Dix mois plus tard, elle ouvre des équipements transitoires pour maintenir une présence culturelle et sportive dans le quartier. L’enjeu affiché : assurer la continuité du service public, préserver les partenariats locaux et rester au contact des habitants, notamment des jeunes. Cette période est pensée comme un moment d’expérimentation pour tester de nouveaux formats culturels et sportifs.

La Ville et Grenoble Habitat ont rénové deux rez-de-chaussée situés à l’angle de l’avenue Rhin-et-Danube et de la rue Anatole-France, séparés par une placette. Les travaux menés entre septembre et décembre représentent 550.000 €, répartis entre : 315.000 € par la Ville, 235.000 € par Grenoble Habitat, plus de 75.000 € de soutien de l’État, partage Télé Grenoble. Les lieux ont été conçus pour redevenir des commerces une fois la bibliothèque réinstallée dans son bâtiment originel.

La bibliothèque temporaire

La nouvelle bibliothèque provisoire, installée au 78 rue Anatole-France, a ouvert le 9 décembre. Sur 175 m², elle propose 16.000 documents – livres, BD, mangas, presse, DVD, jeux -, un service de réservation, des baies vitrées pour un espace lumineux et chaleureux, ainsi que neuf agents assurant accueil, prêt, informatique et animations.

Un travail « colossal » a permis de sauver une partie du fonds : près de 20.000 documents ont été décontaminés un par un, permettant la réintégration de 80 % de la collection. La sécurité a également été renforcée, avec l’installation d’alarmes, de dispositifs de vidéosurveillance et la mise en place de formations spécifiques pour les employés.

Un dojo ouvrira le 23 février 2026 au 68 avenue Rhin-et-Danube, dans un espace de 72 m² dont 65 m² de tatamis, destiné au judo, au taekwondo, aux sports de combat, ainsi qu’aux activités scolaires, périscolaires et aux associations résidentes. L’aménagement représente un investissement de 250.000 €.

Avant sa destruction, la bibliothèque accueillait environ 400 usagers par jour. Le chantier de reconstruction, compte tenu de l’ampleur des dégâts, devrait durer de trois à quatre ans, selon la Ville.

Crédits photo : Quartier Paul Mistral à Grenoble (Jean-Paul Corlin, CC BY-SA 4.0)

 

Par Hocine Bouhadjera
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