En remportant la mairie de Miami, mardi, Eileen Higgins a brisé l’un des plus anciens verrous politiques de Floride. Sa victoire met fin à près de trente ans d’hégémonie républicaine dans une ville historiquement dominée par l’électorat cubano-américain. A 61 ans, elle devient surtout la première femme élue à ce poste et la première maire démocrate depuis les années 1990. Au soir de son élection en prenant la tête d’une ville secouée par les controverses politiques, elle a déclaré vouloir mettre en place « une gouvernance éthique et responsable qui produit des résultats concrets pour la population ».

Le New York Times rappelle que rien ne prédestinait Eileen Higgins à diriger l’une des métropoles les plus stratégiques du pays. Ingénieure mécanique de formation, ancienne responsable du « Peace Corps » (une agence gouvernementale envoyant des volontaires aider les pays en développement) au Belize, elle s’est imposée tardivement dans la vie publique. Son entrée au sein du comté de Miami-Dade en 2018 avait déjà attiré l’attention. En effet, elle avait conquis un district réputé conservateur en assumant le surnom de « La Gringa » (l’étrangère en espagnol), manière d’embrasser sa différence dans un territoire largement hispanophone.

Une très faible participation en dessous de 20 %

Sa victoire est le fruit d’une stratégie patiemment construite. Le quotidien new-yorkais insiste sur la manière dont Eileen Higgins a capitalisé sur une réputation de gestionnaire rigoureuse dans un moment où les scandales politiques avaient affaibli la confiance des électeurs. Son duel avec Emilio T. González, ancien administrateur municipal soutenu par Donald Trump, s’est soldé par une avance d’environ 60 % selon les projections de CNN. Toutefois, la participation n’a pas dépassé les 20 %, confirmant le désintérêt persistant des électeurs pour les scrutins municipaux.

L’un des éléments distinctifs du parcours d’Eileen Higgins est sa capacité à construire des alliances inattendues. Le New York Times explique qu’elle a su rassembler un électorat diversifié, franchissant les frontières partisanes et culturelles qui compartimentent depuis longtemps la politique locale. Cette ouverture lui a permis d’incarner une alternative crédible dans une ville qui s’était récemment droitisée, dans un contexte où la popularité de Donald Trump connaît un recul, principalement en raison du coût de la vie, rappelle l’AFP.

Nouvelle déconvenue pour Trump et les conservateurs

Cette bascule intervient alors que les démocrates multiplient les succès électoraux à l’échelle nationale. Les victoires récentes en Virginie, au New Jersey ou encore à New York installent un climat politique plus favorable au parti, après plusieurs cycles électoraux défavorables. L’élection d’Eileen Higgins peut aussi être vue comme un indicateur à suivre pour évaluer l’évolution de la Floride, Etat devenu l’un des épicentres de l’influence républicaine.

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Pour Eileen Higgins, la prise de fonction ouvre une page nouvelle, où son expérience technique, son pragmatisme et son image d’élue accessible seront décisifs pour répondre aux défis d’une ville confrontée simultanément à la pression immobilière, aux inégalités et aux impacts du changement climatique.