Il a été présenté à Saint-Etienne puisque soutenu par sa municipalité et sa Métropole mais le lancement du « hub » de l’Intelligence Artificielle (IA) Loire » porté par la CPME en partenariat avec la CCI, vise bien tout le département puis sa duplication ailleurs. Objectif d’un accompagnement local annoncé d’ampleur « inédite » : toucher les TPE et PME pour démystifier l’IA et la faire intégrer comme levier de performance plutôt que repoussoir.
Offrir un portail efficace aux chefs d’entreprises isolés face leurs questionnements : c’est l’ambition du Hub IA Loire de la CPME.
L’initiative se veut « inédite ». Alors à l’échelle d’un département, de notre région du moins puisqu’au niveau national, il existe déjà cela : le « Hub France IA », créé dès 2017 et qui compte pléthore d’adhérents allant du groupe international à la PME en passant par des banques, des entreprises d’Etat, l’Etat lui-même et CCI France. Certes : mais pour répondre de manière chirurgicale aux entreprises à leurs besoins, leur nécessité de réseauter, à se former, leurs interrogations et angoisses aussi, vis-à-vis de l’intégration de l’IA, rien ne vaut la décentralisation. A fortiori lorsqu’il s’agit de TPE / PME.
Cet accompagnement de proximité, réactif, sur mesure, c’est en tout cas ce que prône et promet la CPME avec la création progressive du « hub » de l’Intelligence Artificielle (IA) Loire. Lancement présenté comme pionnier en partenariat avec la CCI Lyon Métropole Saint-Etienne Roanne dont l’initiative qu’est l’IA tour, aux côtés déjà de l’ENE et la CPME est finalement à interpréter comme une « préface » de l’ouvrage à venir. Ce dernier est appelé à devenir exemple, à l’échelle régionale dans un premier temps puis national ensuite, ambitionne carrément Daniel Villareale, président de la CPME Loire et AuRa à propos de la « plateforme » de contact et de mise en contact que doivent abriter les locaux ligériens de l’organisation patronale d’ici début 2027 au plus tard. Ce qui implique le recrutement d’un salarié s’y consacrant à plein temps.
Chasseur plutôt qu’autruche
Pour ce qui est donc une expérimentation amenée à faire des petits, la CPME Loire est partie de ce constat relevé par une étude de la BPI France : « Près de deux tiers des dirigeants d’entreprises pensent que l’intelligence artificielle n’est pas un sujet stratégique aujourd’hui » mais que cependant « 51 % pensent que l’IA deviendra stratégique pour la pérennité de leur entreprise dans un délai de 3 à 5 ans ». D’ailleurs, autre constat : les sollicitations toujours plus nombreuses des TPE PME auprès de la CPME Aura pour les aider à mieux appréhender le sujet alors que parallèlement 450 acteurs étaient identifiés dans la région cet automne – leur développement est fulgurant – comme en mesure de leur proposer des solutions techniques ou technologiques. La plateforme que va mettre en place le hub, accessible gratuitement, vise donc à donner des premières réponses, orienter et, si affinités, à mettre en relation avec d’autres entreprises pour tout simplement partager, sinon acheter aux acteurs spécialisés des prestations : diagnostic, conseils, formations, installation etc.
Epures estime qu’un peu moins d’un emploi sur deux dans le département sera tôt ou tard impacté par l’IA (46 %).
Le hub doit conduire à intensifier localement la R&D, le transfert de technologies (conférences projets collaboratifs), développer les usages (inventaires, diagnostic, ateliers) et à dispenser des formations. Car derrière, si l’IA peut faire peur, la philosophie est d’être chasseur plutôt qu’autruche en appréhendant ce virage technologique manifestement historique « non comme un obstacle mais comme moteur de performance ». Ce qui ne signifie pas forcément mur infranchissable d’investissements coûteux, défendent les promoteurs du hub. Encore faut-il savoir de qui / de quoi on a besoin. Au niveau de la seule Loire, l’étude spécifique sur l’IA publiée en septembre dernier par Epures estime qu’un peu moins d’un emploi sur deux dans le département sera tôt ou tard impacté par l’IA (46 %).
Le rapport de Noël Paul
Sur les 2 580 entreprises ligériennes analysées dans cette étude (sélection calée sur la méthodologie d’une étude Insee préalable), environ 260 d’entreprises utilisent une technologie relevant de l’IA. Une part proche du niveau national (10,2 % contre 9,9 %). La Loire ne regarde donc pas plus ailleurs que dans le reste du pays. Toutefois, si un tiers des entreprises de 250 salariés et plus s’en servent (33 %), ce chiffre chute à 7 % dans les établissements de moins de 20 personnes. Et si dans l’information et la communication, cette part dépasse les 40 %, elle est située entre 10 % et 20 % pour l’ingénierie, moins de 10 % côté construction et industrie. Ingénierie et industrie de pointe font pourtant bon ménage dans la Loire, où la part du secteur secondaire résiste depuis plus d’une décennie avec un taux d’emploi se maintenant à près de 25 %, nettement au-dessus des moyennes régionale, encore plus nationale.
Un substrat solide qui ne peut que logiquement pousser l’agglomération « d’ingénierie » qu’est Saint-Etienne à prendre le taureau IA par les cornes, souligne Noël Paul. Professeur agrégé de physique, l’ex vice-président de Saint-Etienne Métropole en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche a été sollicité par Daniel Villareale pour avoir son point de vue sur le projet du hub au moment de l’initier au printemps 2024. Le « conseil » s’est transformé en pointilleux et fouillé rapport stratégique – L’intelligence artificielle et les PME/TPE – de plus de 40 pages, envoyé au gouvernement et derrière, paraît-il, bel et bien pris en compte par Bercy. Validé aussi et sans rien à y redire par Jean-Charles Pinoli, signalé par Noël Paul, comme « la 47e personnalité mondiale la plus capée dans le domaine sur 160 000 identifiées… »
60 000 € de soutien par la Métropole et Saint-Etienne
Présentation du hub en mairie de Saint-Etienne le 28 novembre. ©If Saint-Etienne / XA
En attendant des soutiens éventuels du Département – proactif sur la fibre et la cybersécurité – puis de la Région en cas de duplication à son échelle, collectivités avec qui la CPME est déjà en contact sur le sujet, la mise en œuvre du hub – 100 000 € à investir en deux fois, répartis entre les partenaires – a déjà le soutien public de la Ville de Saint-Etienne et de la Métropole (30 000 € chacune). D’où une présentation du projet à l’hôtel de ville de Saint-Etienne le 28 novembre dernier en présence de Gaël Perdriau, pour son ultime conférence de presse, d’ailleurs, en tant que maire avant le procès. Ce n’est pas Nora Berroukeche, vice-présidente métropolitaine au développement économique et à l’innovation mais Marc Chassaubéné, au titre de sa vice-présidence au design, à la culture et au numérique qui était présent pour étayer ce soutien à l’échelle métropolitaine.
Celui-ci fait fortement sens, a insisté l’élu, au regard de la politique de soutien déjà menée par l’agglomération en faveur des start-ups sur l’innovation technologique, en particulier numérique. En plus de la subvention, le serveur appartenant à Saint-Etienne Métropole pourra être mis à disposition des TPE PME sollicitant le hub et qui dans le cadre de leur évolution en auraient besoin. S’ajoutent aussi un début d’expertise concret commun entre l’agglomération et la Ville par le déploiement de programmes d’utilisation dans son fonctionnement interne (programme Victor) et vis-à-vis des administrés pointe, enfin, côté Ville, Lionel Jouffre, adjoint à la vie numérique, aux nouvelles technologies et à l’intelligence artificielle.