Par
Cédric Nithard
Publié le
11 déc. 2025 à 11h28
Ce mardi 9 décembre se tenait le dernier conseil de la Métropole de Montpellier du mandat de Michaël Delafosse. L’occasion, au détour des 128 affaires à l’ordre du jour, de défendre le bilan de l’action de la collectivité quand l’opposition montpelliéraine a livré ses dernières attaques dans l’hémicycle sur fond de campagne municipale. Comme un résumé de ces six dernières années…
Trois écologistes à l’attaque
Le dernier conseil d’un exécutif se déroule généralement dans une ambiance témoignant de la manière dont s’est déroulé le mandat. À ce titre, l’ultime séance de Michaël Delafosse à la tête de la Métropole de Montpellier n’a pas été différente de la plupart des précédentes. Les élus des 31 communes, dont les maires, ont largement fait consensus autour des politiques menées durant six ans. Seuls les élus issus de l’opposition montpelliéraine ont marqué leurs différences.
Quelques affaires traitant de la question des déchets ont offert les derniers traditionnels échanges entre l’écologiste François Vasquez et l’insoumis René Revol. Ayant toujours prôné la mutualisation avec Sète et Lunel pour éviter l’option du CSR, l’ancien vice-président dénonce « mensonges » et « manipulations » en voyant son successeur annoncer une entente avec l’Ile Singulière pour utiliser son ancienne usine durant quatre ans. Comme toujours, le maire de Grabels, prétextant également « ne pas vouloir s’immiscer dans la campagne municipale », laisse glisser les attaques en répondant sur le fond et renvoyant la question du CSR à 2026 lors de l’enquête publique. « L’information des citoyens est de plus en plus éclairée » note-t-il quand François Vasquez, s’adressant à Michaël Delafosse, assène : « Vous êtes le maire-président qui a le plus utilisé le mot « respirer » mais vous resterez comme celui qui a le plus pollué ». Las de ce genre de saillies, comme l’ensemble de l’assemblée, Michaël Delafosse louera simplement en réponse « la rigueur » de son actuel vice-président. Comme quoi, un socialiste peut travailler avec un insoumis…
Sur le même ton, Célia Serrano, autre écologiste montpelliéraine, tenta de monter à la charge sur ce qu’elle estime être « un scandale culturel et financier qu’est l’abandon pur et simple du Domaine d’O et du Printemps des Comédien » en jugeant que Michaël Delafosse « échoue chaque jour à assurer l’avenir culturel de notre métropole ». Un « requiem » ou « un réquisitoire », comme il qualifiera l’intervention, que le président balaiera par la longue liste des événements et festivals se produisant dans la métropole et justifiera la vigilance financière de la collectivité quant au Domaine d’O. « Les directions artistiques ont une liberté de programmation mais elles ont aussi une obligation de respecter les budgets alloués pour le service public de la culture », argumentera-t-il.
Enfin, si elle précise qu’il s’agit « de soupçons rapportés que seule la justice pourra établir », c’est bien suffisant pour que Coralie Mantion évoque « une potentielle affaire de corruption, de biens sociaux ou de conflits d’intérêts dans l’attribution de certains marchés du chantier de la ligne 5 de tramway » et demander des éclaircissements à l’exécutif quant à la gestion de la TaM. « Il y a une procédure engagée en interne car il y a eu manquement et qui a fait l’objet d’un signalement auprès de l’autorité judiciaire à qui il appartient de se prononcer », répondra calmement Michaël Delafosse en renouvelant sa confiance en Loïc Messner, directeur général de la TaM. Les trois écologistes poursuivront leurs combats dans la campagne municipale à Montpellier aux côtés de Jean-Louis Roumégas et du Printemps Montpelliérain.
Alenka Doulain sur tous les fronts
Dans le groupe MUPES, souvent absente pour raisons professionnelles, Clothilde Ollier a pris la défense des salariés du funérarium de Grammont ou encore des agents qui ont vu le plan de lutte contre l’absentéisme mis en place par la Métropole annulé par le tribunal administratif. À ses côtés, ayant joué le rôle d’opposante numéro un durant tout le mandat, Alenka Doulain n’a pas dérogé à la règle en attaquant d’abord sur les déchets. « Il aura fallu attendre six ans pour que le mot coopération apparaisse et que l’on se tourne humblement vers nos voisins » en pointant « une métropole qui s’est enlisée dans les solutions privées les plus coûteuses et les moins écologiques ».
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S’adressant à Michaël Delafosse, elle juge que sa « conception de la gouvernance territoriale est celle d’une métropole qui veut tout absorber, tout contrôler et autour duquel tout doit tourner » et estime que « la gouvernance apaisée que vous revendiquez était une gouvernance aseptisée, vidée de toute coopération réelle ». Plus tard, face à ce qu’elle voit comme un manque de moyens humains mis sur le dispositif du permis de louer, Alenka Doulain assène : « C’est un manque d’ambition qui révèle une affection pour les mesures de façades », puis, sur les mobilités, juge que la collectivité « n’a pas réussi à proposer des alternatives crédibles à celles et ceux qui doivent prendre la voiture », ou encore sur la Paillade, « un quartier soi-disant prioritaire et un mandat de perdu sur l’aménagement du Sud du quartier avec l’ensemble de vos échecs qu’il s’agisse du projet du stade ou du transfert avorté de la clinique ».
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L’opposante décrit ainsi « une métropole à deux vitesses avec un centre-ville abondamment doté et des quartiers populaires sommés d’attendre des plans » avant de charger plus violemment quant à « des marques de mépris lorsque vous avez parlé des jeunes en claquettes-chaussettes ou lorsque vous utilisez le terme de reconquête pour qualifier la rénovation de Celleneuve. Le mot n’est pas neutre et il charrie tout un imaginaire politique que vous prétendez combattre. Sauf qu’à force de courir après les mots, on finit par courir après les idées ». Le ton monte ensuite quand Alenka Doulain s’offusque des « personnes invitées pour le 120e anniversaire de la loi laïcité qui sont notoirement connus pour instrumentaliser la laïcité afin de stigmatiser les musulmans de notre pays ». Un point, en ce 9 décembre justement, qui provoqua la colère froide du président de la Métropole : « On me reproche d’avoir invité Henri Pena-Ruiz auteur du « Dictionnaire amoureux de la laïcité, le grand historien Patrick Weil et l’avocat de Charlie Hebdo Richard Malka. Je trouve que vos propos l’endroit de ces personnes avec vos sous-entendus sont absolument inadmissibles eut égard à ce qu’ils apportent au débat public ».
Des attaques sur différents sujets parés par de longs argumentaires et plusieurs soupirs de Michaël Delafosse. « C’est tellement facile de critiquer et faire est difficile. Évidemment vous voulez instrumentaliser tout ça, la campagne est à l’oeuvre », balaye-t-il en invitant à « ne pas faire de mauvais procès mais soutenir l’action engagée » avant de sembler perdre espoir : « Le niveau de mauvaise foi qui est le vôtre est absolument ahurissant. Je vous laisse avoir vos positions de campagne ». Une campagne que Alenka Doulain et Clothilde Ollier mèneront au sein du mouvement municipaliste Cause Commune.
Serge Guiseppin, « une opposition intelligente »
Si Serge Guiseppin a partagé la liste de Mohed Altrad avec les deux précédentes élues pour se retrouver à siéger côte à côte, leurs routes politiques se sont immédiatement séparées dès les premiers conseils. Ce dernier l’a d’autant plus démontré. À la tête de la commission des finances, poste traditionnellement confié à un membre de l’opposition, Serge Guiseppin a salué « le travail et les débats tenus dans un esprit républicain ». Sur « les investissements massifs », il estime que « chaque euro pèse mais nous avions besoin de rattraper des retards » et pointe des « réalisations nécessaires ». Et s’il constate comme tous « une évolution exponentielle de l’endettement laissant craindre une situation complexe », il reste optimiste quant à une amélioration. « Certains indices sont rassurants. Nous aurions préféré un endettement moindre mais c’était le prix à payer pour rattraper notre retard « . Serge Guiseppin n’a par ailleurs pas manqué d’adresser un plaidoyer en faveur des entreprises. « Nous avons oeuvré pour le transport, le logement, la culture, le sport, la prévention des inondations… mais n’oublions jamais que le développement économique représente 80% de nos recettes fiscales. Secteur qui manifeste peu mais attend beaucoup de la collectivité. Même si ce n’est jamais de gaieté de coeur de contribuer à l’impôt mais le bien-vivre dans notre métropole à un prix et ils y participent pleinement ».
Autant dire que l’exécutif a bu comme du petit lait l’intervention et en premier lieu Renaud Calvat. « Quand on pratique une opposition intelligente, c’est gagnant pour l’intérêt général. Vous nous avez challengés sur un certain nombre de sujet et c’était très constructif » salua le vice-président délégué aux finances qui en profita pour « corriger des mensonges colportés » quant à l’encourt de la dette. « L’encourt de dette est passé de 800M€ à 1,3Md€ et nous avons investi 2Mds€. C’est dire la bonne gestion qui a été la nôtre et les partenariats que nous avons tissé pour obtenir des crédits. Voilà la réalité des chiffres. J’ai lu des choses tellement hallucinantes » regretta-t-il. Tout comme l’absence d’élus du groupe de Philippe Saurel qui évoquent régulièrement une possible mise sous tutelle de la collectivité et qui aurait pu répliquer. Peut-être le feront-ils durant la campagne si l’ancien maire se déclare candidat.
Les écologiste et les autres communes
Si le terrain d’affrontement restait jusque-là centré sur Montpellier, l’intervention de l’écologiste Coralie Mantion qui s’offusqua, au nom de « la défense d’un territoire vivable, respirable et résilient », de la cession d’un terrain situé à Lattes pour y implanter une station de tramway à proximité d’Ode à la Mer où sont prévus des logements dans les années à venir, le déplaça à l’échelle de la Métropole. « Nous avons réussi à passer ce dossier avec l’ensemble des mesures environnementales et on crée une station où il y a déjà de l’urbanisation donc cela va exactement dans le sens que vous demandez » souffla d’abord, presque calmement, le maire de Lattes Cyril Meunier.
Une intervention complété par celle d’un autre conseiller de la commune Bernard Modot. Après 2h30 de séance, celui-ci cacha à peine son agacement. « Je veux bien qu’il y ait la campagne électorale à Montpellier. Depuis le début de ce conseil, on a pris acte. On prend acte aussi que les écologistes s’occupent de Grabels, de Lattes, de toutes les communes… Cela commence à faire beaucoup. Ode à la Me ce sont des boites à chaussures avec des parkings bétonnés à perte de vue. On aimerait depuis que ça dure, qu’on nous laisse un peu tranquille. On est quand même un peu responsable à Lattes et on aime quand même bien la nature. Il faut arrêter les campagnes électorales là-dessus ». Ce n’est pas la première fois du mandat que les écologistes sont ainsi pointés par des élus des autres communes.
Des lauriers
Un dernier conseil qui fut par ailleurs l’occasion d’honorer plusieurs élus. En début, des félicitations ont été adressées à Marie-Delphine Parpillon, conseillère municipale à la mairie de Juvignac et conseillère métropolitaine pour son troisième titre de championne du monde vétérans en judo. Mais surtout, en conclusion de la séance, six maires (Brigitte Devoiselle (Montferrier-sur-Lez), Régine Illaire (Cournonsec), Eliane Lloret (Sussargues), Arnaud Moynier (Beaulieu), Isabelle Touzard (Murviel-les-Montpellier), Claudine Vassas-Mejri (Castries)), qui ont décidé de ne pas se représenter, furent saluer. « À chaque fois que j’ai eu le privilège de venir dans vos communes et d’échanger, on a senti la passion de vos administrés et de faire que vos communes puissent aller de l’avant » leur a adressé Michaël Delafosse.
Parmi eux, Arnaud Moynier a dressé des lauriers au président de la Métropole avouant « sa stupéfaction face au calme que vous arrivez à garder malgré tous les noms d’oiseau que l’on vous affuble » en voyant en lui « un signe d’ouverture et d’apaisement dans cette assemblée » et saluant sa « profonde écoute et l’intégrité qui se dégage de votre personne » ainsi que son « honnêteté intellectuel et moral ». S’ils sont de deux bords opposés qui se sont affrontés lors de législatives déroulées dans « un profond respect », le maire de Beaulieu conclut : « Vous êtes un exemple pour moi. Vous n’allez pas faire de moi un socialiste aujourd’hui, mais, je regarde d’abord l’homme et l’humain, et je pense que Montpellier a de la chance de vous avoir ».
Un sentiment partagé par Isabelle Touzard, qui fut à la tête d’une importante délégation (Transition écologique et solidaire, Biodiversité, Energie, Agroécologie et Alimentation), et qui a également souligné « un mandat d’une sérénité vraiment incroyable par rapport à ce que j’ai vécu avant et on te le doit beaucoup » en s’adressant à Michaël Delafosse tout en notant « un esprit d’équipe avec les autres vice-présidents. Nous n’étions pas dans le politicien. J’ai vécu six années au service de l’intérêt général et de politiques publiques au sens noble du terme. Même si nous n’étions pas d’accord sur tous les dossiers, il y a toujours eu du respect ». Depuis le début du mandat, 223 commissions thématiques ont préparé les 36 séances du conseil de métropole soit plus de 183 heures de débat au cours desquelles 93% des 3 124 délibérations ont été adoptées à l’unanimité. Un signe sans doute que la collectivité a su avancer au-delà de la politique et des critiques.
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