l’essentiel
Après quelques mois sans barricades, les agriculteurs ont manifesté de nouveau en Lot-et-Garonne, dans la nuit de jeudi 11 à vendredi 12 décembre. La Coordination Rurale du Lot-et-Garonne (CR 47) soutient les éleveurs touchés par la crise de la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) qui s’abat sur les élevages un peu partout en France et conduit à l’abattage systématique des troupeaux. Une nuit dans la fumée mouvementée autour de barricades surprises.

C’est un peu avant 0 h 30 que les premiers tracteurs de la Coordination rurale du Lot-et-Garonne ont, sans crier gare, pris possession de l’avenue du Général-de-Gaulle dans la nuit de jeudi 11 à vendredi 12 décembre. Une opération surprise, car le rassemblement était prévu à l’origine vendredi matin. Le dispositif de sécurité était déjà en place pour accueillir les agriculteurs et les 150 tracteurs de leur cortège.

Après avoir déposé une quantité impressionnante de déchets agricoles et de pneus devant la Mutualité sociale agricole (MSA) et la Direction départementale des territoires (DDT), c’est un mur de paille qui a été dressé à l’angle de la rue Montaigne, à deux pas de la Préfecture et du Palais de justice.

Des ballots de foin devant le palais de justice d’Agen

Des ballots de foin devant le palais de justice d’Agen
DDM – Julien Durou

Un dispositif de maintien de l’ordre, composé de compagnies de CRS et d’un escadron de gendarmes mobiles venu de Périgueux (entre 50 et 70 militaires), a sécurisé les lieux et a contenu les 200 agriculteurs aux bonnets jaunes. L’imposant mur de paille a été enflammé, répandant sur le centre-ville une odeur âcre de fumée. Les pompiers du SDIS 47, présents sur place, ont maîtrisé les flammes.

« Ce n’est pas le début, c’est la fin ! »

Présent sur place, Serge Bousquet-Cassagne, l’ancien président de la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne, ne décolère pas. Pour l’ex-numéro 1 de la chambre consulaire, cette manifestation n’est pas un début mais une fin… Celle d’une filière : « Ce n’est pas le début, c’est la fin ! La fin des haricots pour une profession qui se meurt ! Pour les agriculteurs qui sont en train de crever dans l’indifférence ! Ce soir, on venge les 208 vaches de l’Ariège ! On venge les vaches de France mortes pour rien ! » Serge Bousquet-Cassagne veut faire d’Agen l’épicentre de la révolte des éleveurs : « Chaque fois qu’un élevage sera touché, sera détruit en France, c’est Agen qui réagira ! »

Les pompiers sont intervenus pour éteindre le feu de paille.

Les pompiers sont intervenus pour éteindre le feu de paille.
DDM – Julien Durou

L’élevage bovin est touché par une crise de dermatose nodulaire contagieuse (DNC) qui, aujourd’hui, conduit à l’abattage systématique de l’intégralité des cheptels touchés, conformément aux directives du ministère de l’Agriculture. Une aberration pour Serge Bousquet-Cassagne : « Ils ne veulent pas suivre notre protocole, qui serait d’abattre les vaches malades et d’attendre pour les autres, en quarantaine sous cloche, et de vacciner les animaux ! Les pays de l’Est ont fait ça et ça a fonctionné ! Genevard (ndlr : Annie Genevard, ministre de l’Agriculture) prend des décisions intempestives et non pertinentes ! L’indemnisation est correcte car estimée par des experts avant l’abattage, mais avec l’abattage massif, ce sont des années, des décennies de travail réduites à néant et la quasi-impossibilité de refaire un cheptel ! Vous n’imaginez même pas, pour les agriculteurs, à quel point ces abattages sous leurs yeux, ces étables vides, sont un violent traumatisme ! » conclut-il.

Une opération également au rond-point de Camélat

Vers 3 h 30, José Perez, président de la CR47, ainsi que Karine Duc, présidente de la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne, sont arrivés sur place après une journée mouvementée en Ariège. « Bravo les gars ! » s’exclame José Perez, tout sourire, avant de durcir le ton et le discours : « On vit dans un pays de fous ! Pour gazer 200 vaches, on gaze 1 000 personnes ! Il va falloir faire quoi ? On veut nous faire crever ! On a été bombardés toute la journée ! Ils ont réussi ! Ils vont les abattre ! Ce soir à Agen, on les a pris par surprise ! Quand on prévient, on ne nous respecte pas ! Le préfet de l’Ariège ne nous respecte pas ! Il m’a raccroché au nez et a dit que, peu importent les méthodes, il mettrait tout en œuvre contre nous ! C’est de la folie ! Ils nous ont gazés, ont utilisé des flash-balls et des grenades assourdissantes ! Ils ont mis du gaz lacrymogène même dans les bâtiments où il y avait des vaches ! Ils se vengent de notre montée à Rungis ! Ils se vengent aujourd’hui, peu importe la justesse de notre combat ! » La présidente de la chambre d’agriculture ajoute : « On blesse les humains pour tuer des vaches ! »

Les pompiers sont intervenus pour éteindre le feu de paille.

Les pompiers sont intervenus pour éteindre le feu de paille.
DDM – Julien Durou

Peu avant 4 heures du matin, de nouveaux feux de barricades et une opération de contrôle des camions frigorifiques ont été mis en place par les agriculteurs au niveau du rond-point de Camélat. La journée de vendredi s’annonce animée. Des actions coups de poing devraient être menées par les bonnets jaunes dans plusieurs endroits clés de la ville préfecture du Lot-et-Garonne et de son agglomération.