Par

Lisa Rodrigues

Publié le

12 déc. 2025 à 19h07

Laurence Ruffin, présidente de la Scop Alma, société d’édition de logiciels, est la candidate de l’union de la gauche écologiste et citoyenne pour les municipales de Grenoble, la liste soutenue par la majorité sortante d’Éric Piolle.

Issue de la société civile, non encartée, elle a accepté de répondre aux questions d’actu Grenoble sur les principales thématiques de son début de campagne, en esquissant ses premières idées pour la ville.

Une police de proximité renforcée

Actu : Selon les chiffres 2024 du ministère de l’Intérieur, il y a une insécurité à Grenoble, avec notamment des faits de narcotrafic importants. Si vous êtes élue maire, qu’est-ce que vous allez faire à ce sujet ?

Laurence Ruffin : L’État est le premier à avoir la capacité à intervenir sur le narcotrafic. Il faut une augmentation des effectifs de la police nationale. 
La Ville doit avoir un rôle de coordination. Ma volonté est de mettre en place un organe hebdomadaire plus opérationnel. On doit aussi renforcer la police municipale et former les effectifs, notamment sur la question des armes. On doit avoir des lieux de police de proximité, comme à Saint-Bruno et à l’Alma. 
Surtout, cela doit aller de pair avec la question de la prévention et un accompagnement à la non-violence sur le long terme. 

Une nouvelle brigade de police municipale va être dépoloyée.
Le renforcement de la police municipale occupe une place importante dans les réflexions de plusieurs candidats aux municipales de Grenoble. (©Illustration / Ugo Maillard / actu Grenoble)

Certains demandent à ce que la police municipale soit armée, comme la police nationale. Qu’en pensez-vous ?

LR : Aujourd’hui, les policiers municipaux sont armés avec un teaser. Quand on sera élus, on va discuter avec la police municipale pour répondre aux problématiques de sécurité, en restant dans leur périmètre d’intervention et sans les mettre en danger. On ne s’interdit pas de discuter de l’armement. Par contre, ce n’est pas ça qui va résoudre le problème du narcotrafic, mais je suis consciente de l’augmentation de la violence et de la difficulté de recrutement. 

De la vidéosurveillance, oui, mais plus efficace

Certains habitants dans plusieurs quartiers demandent plus de caméras de vidéosurveillance. Est-ce qu’il faut le faire ?

LR : La police nous dit que ça n’améliore pas la protection. En revanche, ça aide à améliorer la résolution des affaires. C’est un outil parmi d’autres, mais ce n’est pas l’outil miracle.
Aujourd’hui on a un centre de coordination opérationnel qui marche bien et on a des caméras à disposition. Mais, on nous a remonté qu’on ne sait pas toujours lesquelles fonctionnent et lesquelles ne fonctionnent pas. 

La Ville de Lyon annonce l'installation de 60 nouvelles caméras de vidéosurveillance dans la ville en 2025 et 2026.
La Ville de Grenoble dispose d’un parc de caméras de vidéosurveillance. (©Illustration / Nicolas Zaugra/ actu Lyon)

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C’est donc davantage une question de vétusté du parc de caméras ?

LR : La vidéosurveillance, c’est de l’investissement avec l’argent des Grenoblois. Il faut de la sécurité, mais avec une bonne utilisation de cet argent public. Quand on a du matériel, on est responsable du fait qu’il fonctionne et qu’il soit utile. 
Commençons par cartographier les endroits où il y a une vidéosurveillance, où sont les caméras qui fonctionnent et où il devrait y en avoir. C’est aussi un équilibre à trouver, pour être dans une ville où on se sent libre de vivre sans être tout le temps surveillé.

Un « référendum local » dès 16 ans

Quelles sont, dans les grandes lignes, les politiques que vous souhaitez mettre en place pour la jeunesse grenobloise ?

LR : On a une ville qui est très jeune, mais ces jeunes n’ont pas le droit de vote. Ils sont moins représentés chez les élus et sont globalement plus invisibilisés.
On voudrait mettre en place une sorte de référendum local sur plusieurs sujets qui nous semblent essentiels, ouvert à partir de 16 ans et aux personnes étrangères qui vivent à Grenoble. 
Il y a un travail en cours sur le rythme scolaire, sur les investissements pour la rénovation des écoles et les places aux enfants : près de 80% des Grenoblois considèrent qu’on doit prolonger ce travail. Il y a aussi un travail sur le périscolaire et l’extrascolaire, où chaque enfant doit avoir la possibilité de partir en vacances.

Laurence Ruffin et son équipe souhaite développer la politique sur la rénovation des écoles et de ses abords, comme le dispositif
Laurence Ruffin et son équipe souhaite développer la politique sur la rénovation des écoles et de ses abords, comme le dispositif « Place aux enfants ». (©Facebook / Ville de Grenoble – Mathieu Nigay)

Sur le rôle des associations, il y a la question des subventions. Est-ce qu’il va falloir les augmenter ?

LR : Le monde associatif est extrêmement important. On a la chance à Grenoble d’avoir un tissu associatif riche. Dans le budget de la ville, il y aura une attention spécifique à sanctuariser des sujets qui créent de la vitalité sociale, du lien et de l’attention à la jeunesse. 
On travaille aussi sur un fonds coopératif citoyen pour aller chercher de l’argent. Ça peut être une plateforme, comme l’a fait Lyon, où on met en relation les associations et le monde économique. On a aussi une grosse épargne citoyenne en France qui n’est pas du tout dédiée au monde associatif ou aux territoires. Or, il y a une volonté des citoyens que leur épargne soit utile, tout en étant sécurisée.

« Voir le logement comme un droit »

Sur la problématique du logement, est-ce que vous avez des mesures particulières que vous voulez défendre en tant que maire ?

LR : La Ville doit protéger. Il faut que le logement soit vu comme un droit, qu’il soit de qualité et qu’il corresponde aux besoins des habitants. 
Maintenant, activer plus de réquisitions, ce n’est pas simple. Il y a aussi la question de la construction de nouveaux logements ou du plafonnement des loyers. Il faut travailler avec les propriétaires et, potentiellement, racheter les logements.
On peut aussi travailler sur l’adaptation des bureaux – depuis le télétravail, beaucoup sont libres – et sur de nouvelles formes de logement, comme l’habitat coopératif dans la ville de demain.

Rendre les transports gratuits le week-end

Concernant le réchauffement climatique, on parle beaucoup de végétalisation et des îlots de chaleur. Que faire face à ces phénomènes ?

LR : On veut que chacun ait un parc accessible à moins de cinq minutes de chez soi. Il y aussi la question de la mobilité et des transports, qui doivent être accessibles à tous. Il faut continuer les Chronovélos pour libérer les trottoirs et inciter à une mobilité la plus facile possible, pour que la voiture soit moins nécessaire et qu’on gagne de la place pour végétaliser. Mais l’idée n’est de ne pas dire : “on enlève les voitures » !
On pousse aussi sur la gratuité des transports le week-end, pour que nos commerces vivent mieux le samedi. Je crois que c’est un sujet relativement partagé, parce que c’est tenable financièrement.

La ligne B du tramway de Grenoble sera coupée pour la fête de la musique.
La liste de Laurence Ruffin est pour rouvrir le débat sur la gratuité des transports le week-end dans la Métropole de Grenoble. (©UM / actu Grenoble)

Pour le commerce justement, vos maîtres mots sont donc proximité et accompagnement ?

LR : Pour moi, il y a d’abord une réflexion à avoir sur les loyers commerciaux, pourquoi pas les plafonner. 
Ensuite, il faut donner envie aux gens de venir en ville. Ça veut dire avoir des transports accessibles, travailler sur l’embellissement de la ville… Par exemple, mettre de la couleur : c’est pas cher et hyper efficace ! On peut développer aussi des actions et événements bien identifiés en ville.

LFI et les autres listes de gauche : une union souhaitée

Plusieurs listes de gauche sont sur la ligne de départ, dont celle de LFI portée par Allan Brunon. Des rapprochements sont-ils possibles ?

LR : LFI était dans le collectif jusqu’en juin et a décidé de faire sa propre liste. Aujourd’hui, on a des postures et manières de faire très différentes. Mais, chacun a exprimé sa volonté que Grenoble reste à gauche. Dans le fond, on partage les mêmes sujets. 
La porte est ouverte. Je pense qu’on doit être capable de faire l’union, on est attendus dessus. 

Allan Brunon est le candidat du parti LFI aux municipales de Grenoble. Il répond aux questions de la rédaction.
Allan Brunon est le candidat du parti LFI aux municipales de Grenoble. (©Lisa Rodrigues – actu Grenoble)

Est-ce que vous assumez d’être la candidate de la majorité sortante ?

LR : J’assume complètement d’être candidate des écolos, de la gauche et des citoyens avec une liste majoritairement nouvelle. 
J’ai un attachement fort pour Grenoble. Je pense que les Grenoblois sont très fiers de leur ville et qu’ils trouvent très désagréable qu’on en parle négativement. C’est pour ça qu’on veut faire une campagne réaliste, mais aussi optimiste et positive. 

Est-ce que vous assumez le bilan des deux mandats d’Éric Piolle ?

LR : Je ne suis pas là pour faire un bilan et je serai très mal placée pour le faire, parce que ne suis pas élue aujourd’hui.
J’assume d’être nouvelle en politique. Je prends un risque, je lâche une vie où j’étais assez reconnue pour me lancer dans quelque chose au service de ma ville.
Je n’ai pas de problème à dire qu’il y a des choses qui n’ont pas été bien faites. Je l’ai dit aux militants : si vous voulez un projet dans la continuité, ce n’est pas moi.

Donc il y a des choses à changer sur ce qui a été fait lors des deux derniers mandats ?

LR : On doit faire mieux. On est à un autre moment de l’histoire. Maintenant, je m’inscris dans une trajectoire écolo et de gauche, je l’assume. Je le fais avec les partis politiques de l’union de la gauche, dont de nouveaux partenaires, comme le PS.

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