Elle reste une star. Plus de 60 ans exactement après sa disparition, le 14 décembre 1963 à Laxou.

Marie Marvingt, pionnière de l’aviation et championne tout terrain, a donné son nom à des rues, à un stade même, celui du Mans, dans la Sarthe, entre Paris et Rennes. Elle inspire encore les écoles. En février 2025, les Éditions de l’Université de Lorraine ont célébré les 150 ans de sa naissance en rééditant l’ouvrage de sa célèbre biographe américaine Rosalie Maggio. À Nancy, son vieux vélo est conservé précieusement au conseil départemental de Meurthe-et-Moselle. Et on la célèbre à la moindre occasion comme durant cette Saint-Nicolas 2025 où la commune de Malzéville lui a dédié un char

Mais derrière l’icône, une enquête minutieuse menée par un historien de Metz, Matthieu Casali, dans les archives françaises, et publiée en 2025 dans la revue « Annales de l’Est », dévoile une trajectoire plus contrastée, selon lui, que la figure d’exploits « qui nous est toujours présentée ».

Faire « de nouvelles recherches »

Née le 14 décembre 1875 à Aurillac, installée à Metz puis à Nancy, Marie Marvingt grandit dans une famille meurtrie par les deuils successifs. Très tôt, elle se forge une volonté farouche à travers le sport. Elle skie, nage, grimpe, pilote… et collectionne les distinctions sportives. L’Académie des sports lui décerne sa grande médaille d’or en 1910. L’année suivante, elle remporte la coupe Fémina d’aviation.

Mais une partie de sa légende — notamment ses exploits militaires — résiste mal à l’analyse, selon Matthieu Casali.

« Le travail accompli par Marcel Cordier , Rosalie Maggio et le Comité international Marie-Marvingt afin de promouvoir la vie et l’œuvre de Marie Marvingt est remarquable. Il est à saluer. Malgré les moyens réduits dont ils disposaient, ces passionnés ont ressorti la fiancée du danger des oubliettes de l’Histoire », indique Matthieu Casali.

Mais il va plus loin : « Toutefois, plus de trente ans après la publication de la biographie de référence, de nouvelles recherches pourraient débuter afin d’écrire une histoire sourcée… »

« Marie Marvingt est une pionnière incontestable des sports et de l’aviation et une affabulatrice. C’est une très belle communicante, qui sort du lot, c’est sûr. Mais on fait face tout de même, au regard des sources, à de beaux mensonges », confie Matthieu Casali à L’Est Républicain.

« Incohérences »

Dans son article, de 25 pages, paru en 2023 mais dont il parle pour la première fois, le Messin donne ses sources : les archives de la Direction de la sûreté générale, dont un fond « dit de Moscou » qui regroupe divers documents saisis par les forces d’occupation nazie à Paris en 1940 ; le centre de documentation du musée de l’Air et de l’Espace ; les archives de la Préfecture de Nancy, entre autres…

Parmi les réserves émises par Matthieu Casali, celle par exemple des activités de Marie Marvingt durant la Grande Guerre.

Selon la légende, Marie Marvingt aurait durant 14-18 assisté comme aide à un chirurgien éminent, participé à deux bombardements aériens de Metz, fait un séjour de près de deux mois dans les tranchées de première ligne et seul le maréchal Foch le savait… Elle aurait servi sous le nom de « Chasseur Beaulieu »… « Soit, affirme l’historien, mais quelles sont les dates qui « permettent de vérifier la réalité de ces faits » ? Matthieu Casali donne des pistes sur cet engagement militaire, mais il y a « des incohérences ».

Durant la Seconde Guerre mondiale, où on la retrouve du côté de la Dordogne, Marie Marvingt a-t-elle participé à la Résistance ? Non, selon le Messin : « La fiancée du danger est absente de la base de données des médaillés de la Résistance. »

L’historien Matthieu Casali veut une « thèse sérieuse » pour « démêler le vrai du faux » concernant ce personnage incontournable.