Alors que les États-Unis semblent tourner le dos à l’Ukraine et que l’aide européenne atteint un niveau historiquement bas, un constat s’impose : les opinions publiques ne suivent pas la trajectoire de leurs gouvernements. Notre dernière enquête menée du 25 Novembre au 4 Décembre en partenariat avec Dynata le montre avec force : en France, comme au Royaume-Uni, en Allemagne ou en Italie, les citoyens se révèlent aujourd’hui plus volontaristes que leurs dirigeants dans le soutien à l’Ukraine.
Le débat se focalise souvent sur le coût de ce soutien. Pourtant, seuls 11% des Français évaluent correctement l’aide réellement fournie, 0,2% du PIB depuis 2022. Près de la moitié la surestime et 41 % l’ignorent. Mais ce qui frappe surtout, c’est que cette méconnaissance ne se traduit pas par une réticence, bien au contraire : 40% des Français estiment que l’effort devrait dépasser 0,5% du PIB, soit plus du double de l’engagement actuel.
Et les citoyens ne se contentent pas d’un soutien abstrait, bien au contraire. Ils sont prêts à mobiliser des leviers financiers considérables, comme les avoirs russes gelés, estimés à près de 18 milliards d’euros en France, pour soutenir Kyiv et renforcer l’industrie de défense nationale. Une mesure approuvée par 54% des Français, quand seuls 29% y sont opposés : là encore, la population apparaît plus audacieuse que ses dirigeants.
Ce soutien s’ancre dans un capital de sympathie durable : 67% des Français ont une image positive de l’Ukraine, et 64% soutiennent Volodymyr Zelensky malgré l’usure du conflit et les scandales de corruption médiatisés. À cela s’ajoute une inquiétude profonde face à Moscou : 85% des citoyens se disent préoccupés par la guerre, et 80% considèrent la Russie comme une menace directe pour la souveraineté européenne.
Cette défiance généralisée à l’égard de Moscou – seuls 27% des Français feraient confiance à Vladimir Poutine pour respecter un cessez-le-feu – s’accompagne d’exigences claires : 79% réclament des garanties de sécurité robustes, et 64% estiment que Kyiv doit être partie prenante de tout accord. L’opinion publique française, tout comme celles du Royaume-Uni, d’Allemagne et d’Italie, semble avoir intégré les risques du conflit plus vite que ses gouvernements.
Savoir que la majorité des Français soutient un renforcement de l’aide à l’Ukraine peut inspirer des mesures concrètes : mobilisation de financements, soutien accru à l’industrie de défense, pression diplomatique pour des garanties de sécurité crédibles. Alors que Washington menace de se retirer et que Moscou teste les limites du continent, l’Europe doit agir pour rester crédible. La volonté populaire est claire ; la responsabilité politique l’est tout autant. Si l’Europe veut rester crédible, elle doit aligner son action sur la détermination de ses citoyens.