Le succès de la série « The Bear » a donné des appétits à France TV. Même si « Bistronomia » reprend un peu de la grammaire de son modèle américain, les neuf épisodes de 26 minutes sont bien plus goûteux qu’une fade revisite à la sauce « french dressing ». La série est disponible sur Play RTS.

Dans le restaurant étoilé Le Régent règne une ambiance électrique. Jean-Hugues Anglade, infâme chef, fait valdinguer les assiettes et pratique l’humiliation à outrance. Il cogne avec les mots, hurle sa colère, badigeonne le visage de Johanna de filets de poulets soi-disant découpés grossièrement. Voilà pour une scène-choc tirée de « Bistronomia », série française prenant place dans le milieu de la restauration.

La naissance de la bistronomie

Conseillée par Yves Camdeborde, fer de lance de la bistronomie, avec l’appui également de Marine Bidaud, directrice du guide Le Fooding et d’Alexandre Cammas, critique gastronomique, Marie-Sophie Chambon, la créatrice de la série, a eu le bon goût de la situer en 2005, une période charnière en France. En ce mois d‘octobre, la banlieue de Clichy est en feu et Nicolas Sarkozy parade sur BFM, toute nouvelle chaîne d’info en continu. Mais pendant que le président de la République promet de nettoyer les banlieues de ses racailles, Johanna, Amandine et Vivian caressent un autre rêve.

>> A voir, l’épisode 1 de la série « Bistronomia » : Du pain et du fromage frais Du pain et du fromage frais / Bistronomia / 27 min. / le 7 décembre 2025

A cette époque, la restauration en France se limitait aux pizzerias, kebabs et bistrots de quartier; et pour les plus huppés, aux gastros hors de prix. Une jeune génération va tout bouleverser avec la bistronomie, l’art de transformer de simples plats en recettes d’exception à déguster dans des restaurants chaleureux aux prix abordables et où la décoration et les codes vestimentaires n’auraient plus aucune importance.

Entre énergie brute et critique sociale

Ainsi, dans « Bistronomia », Johanna, cheffe en devenir, jeune métisse au caractère bien trempé – obligatoire pour s’imposer dans ce monde macho – s’associe à son amie serveuse au Régent, Amandine, fille de bonne famille et d’un chef réputé. Elles veulent s’affranchir de la cuisine de papa pour offrir du bon pour pas cher, dans un lieu différent. Journaliste qui met des mots sur des mets, Vivian complète le trio. Embauché par un guide réputé, il comprend, après la publication d’un article sur les meilleurs nems de Paris qui cartonne sur un blog, que quelque chose de révolutionnaire se joue aussi de ce côté-là.

Si « Bistronomia » copie la grammaire de « The Bear », mêlant habilement les plans énergiques en caméra épaule en cuisine à ceux plus moelleux et doux en dehors, la série a surtout su s’éloigner du modèle américain pour raconter autre chose que la bouffe: la société française en 2005 où racisme, sexisme et agressions sexuelles font partie des ingrédients présents dans les arrière-cuisines.

Côté casting, si quelques plats chipent évidemment la vedette aux talents que sont Yowa-Angélys Tshikaya, Louise Labèque ou Edouard Sulpice, le menu proposé est succulent et parfaitement équilibré.

Note: 4/5

Philippe Congiusti/sf

« Bistronomia » de Marie-Sophie Chambon, avec Yowa-Angélys Tshikaya (Johanna Diallo), Louise Labèque (Amandine Pélissier), Edouard Sulpice (Vivian Chervant). Disponible dès le 6 décembre 2025, les samedis dès 23h45 sur PlayRTS et en intégralité du 14 décembre au 14 juin 2026.