La mansuétude dont les navires pollueurs ont longtemps bénéficié semble prendre fin. Le 27 novembre, le parquet de Marseille a conclu avec trois armateurs des conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP). Ce mécanisme permet à une entreprise de reconnaître sa responsabilité et de mettre fin aux poursuites en s’acquittant d’une amende, tout en évitant une condamnation pénale.
La note est salée : ces armateurs, dont certains naviguent sous pavillon de complaisance, devront règler un total de 465 000 euros, rapporte Maritima.
La mer comme égout
« Le cas le plus spectaculaire concerne le tanker Kriti King. Battant pavillon du Libéria et transportant du pétrole brut, ce géant des mers est arrivé à Fos-sur-Mer en février 2024, rappelle le site d’actualités locales. Les contrôles ont révélé qu’il avait utilisé un carburant trop riche en soufre, mais surtout qu’il avait activé son scrubber en boucle ouverte à moins de 3 milles des côtes. »
« Ce dispositif, censé laver les fumées d’échappement, rejette l’eau de lavage directement en mer. » Ce sont plus de 72 000 mètres cubes (ou 72 millions de litres) d’eau acidifiée, assaisonnée de nitrates et divers métaux lourds qui ont donc été rejetés dans la mer Méditerranée. L’armateur devra s’acquitter d’une amende de 180 000 euros.
Le vraquier SM Roberts Banks, battant pavillon des Îles Marshall, s’est également soulagé de 503 mètres cubes d’eau souillée. Pire encore : lorsqu’il était à quai, il a laissé tourner son moteur carburant avec un fuel dont la teneur en soufre affichait le double des limites autorisées. L’armateur devra régler la somme de 120 000 euros.
Drones renifleurs
« Quant aux [rouliers italiens] Jolly Vanadio et Jolly Palladio, le premier a mouillé trop près de la Côte Bleue et du Parc Marin, rejetant 453 mètres cubes d’eau de lavage en 2022, rapporte Maritima. Le second a été trahi par un drone qui a analysé son panache de fumée, révélant des taux de soufre explosifs. L’armateur écope de 165 000 euros d’amende. »
Le Kriti King et le SM Roberts Banks étaient tous deux opérés par des armateurs sud-coréens, respectivement Melvin Navigation Entreprise S.A. KLC SM Co. Ltd. Le Jolly Vanadio et le Jolly Palladio appartenaient à la société italienne Ignazio Messina & C. S.p.A. Les navires ont été contrôlés lors de leurs passages dans les ports, notamment à l’aide de « drones renifleurs » capables de mesurer les taux de certaines particules dans les fumées, et donc les violations des règlementations sur le carburant.
« Le parquet de Marseille rappelle que (…) l’utilisation de scrubbers en boucle ouverte asphyxie les écosystèmes aquatiques, tandis que le soufre émis à quai présente un risque de mortalité cardiaque et respiratoire accru pour les populations avoisinantes, conclut le site d’actualités locales. Face à ces comportements, [il] prévient : les navires en infraction s’exposent désormais à une immobilisation immédiate lors de leurs escales. »