C’était son dernier recours dans ce dossier. La Cour de cassation a rendu définitive mardi la condamnation de Marine Le Pen pour diffamation envers la Cimade, une association d’aide aux migrants, qu’elle avait accusée d’organiser «la filière d’immigration clandestine en provenance des Comores» à Mayotte. Dans un arrêt, la plus haute instance judiciaire française a rejeté le pourvoi de la cheffe de file de l’extrême droite contre sa condamnation à 500 euros d’amende avec sursis par la cour d’appel de Paris le 11 septembre 2024.
«Les propos de Mme Le Pen qui assimilaient l’action de la Cimade à celle des passeurs de migrants étaient inacceptables», a réagi auprès de l’AFP Me Patrice Spinosi, avocat de l’association. «La Cour de cassation juge que les limites de la liberté d’expression ont été dépassées. Etre une personnalité politique n’excuse pas tous les débordements».
Les propos incriminés ont été proférés lors d’un entretien, diffusé sur BFM TV en janvier 2022. A la question «est-ce que les associations humanitaires sont complices du délit d’entrée ?», Marine Le Pen, alors candidate à l’élection présidentielle, avait répondu : «Parfois oui. Ils sont même complices des passeurs, oui, parfois.» Elle avait ensuite visé directement la Cimade, association engagée contre la xénophobie et l’exclusion des personnes immigrées, pour ses actions à Mayotte. La Cimade «organise la filière d’immigration clandestine en provenance des Comores» à Mayotte, avait-elle déclaré.
Pourtant, à Mayotte, les activités de la Cimade étaient l’accompagnement individuel et la réception des personnes dans des permanences pour leur permettre d’accéder à leurs droits. Le but est «d’informer les personnes» sur leurs droits et étudier les situations administratives pour voir si elles «ouvrent un droit au séjour ou a la nationalité», explique Vittoria Logrippo, déléguée régionale océan Indien pour la Cimade. «On condamne cette stratégie opérée notamment par l’extrême droite qui consiste à désinformer et à utiliser le mensonge pour décrédibiliser les actions du personnel associatif», poursuit-elle. Les membres de la Cimade ne se disent pas soulagés, mais du moins «satisfaits que le droit soit réaffirmé, et qu’une des plus hautes juridictions françaises réaffirme l’enjeu de s’en tenir aux faits», conclut Vittoria Logrippo.
Les propos de l’ex-présidente du Rassemblement national s’inscrivaient dans un contexte tendu en 2022. Dans une tribune pour Libération, l’ex-président de l’association, Henry Masson, et d’autres personnalités du monde associatif humanitaire regrettaient en 2022 d’être «empêchés de mener à bien leurs activités, insultés et sommés de “quitter Mayotte” par un groupe de manifestants qui bloqu[ai]t illégalement l’accès au local de l’association».
Actuellement inéligible du fait de sa condamnation en première instance dans l’affaire des assistants parlementaires européens du FN, Marine Le Pen sera jugée en appel du 13 janvier au 12 février dans ce dossier, une échéance judiciaire et politique cruciale avant la présidentielle de 2027.