Ancien vice-président de l’Agglomération délégué aux transports, ex-président de TaM puis de la SERM, Robert Subra a piloté le développement du réseau montpelliérain de la ligne 2 jusqu’au tracé de la ligne 5. À l’occasion de l’inauguration de cette dernière le 20 décembre, il revient sur les choix, les résistances et l’héritage du tramway.

On a coutume de dire que le premier tramway, l’idée originelle, c’est Frêche et Dugrand, puis qu’à partir de la ligne 2, c’est vous. Êtes-vous d’accord avec cela ?

C’est exagéré. La volonté politique, car à l’époque, Montpellier n’était pas prête à accueillir un tramway, c’est Georges Frêche. Tout le schéma directeur aussi. Moi, j’étais l’exécutant. J’ai mis en œuvre ses idées de la ligne 2 au tracé de la ligne 5, sans aucun obstacle de sa part, dans un climat de totale confiance.

Comment avez-vous rejoint l’aventure ?

On est venu me chercher. J’étais directeur à EDF, mais je n’étais pas un technicien, plutôt dans le management. J’étais en vacances dans les Cévennes et j’ai reçu un coup de fil. Je ne pensais pas être élu un jour. Un mois après l’élection de 2001, et la démission de Raymond Dugrand, j’ai pris sa suite. Ça donne un peu le vertige. Je ne connaissais rien au fonctionnement d’une mairie, mais Frêche m’a donné tous les pouvoirs pour mettre en œuvre ses idées. Je suis un peu une anomalie dans cette histoire : je n’avais pas les codes de la politique, mais j’avais, je pense, le savoir-faire pour faire avancer le tramway dans cette ville.

Comment vous êtes-vous mis au travail ?

Tout de suite après l’élection, j’ai animé des réunions pour la construction de la ligne 2. Et ce n’était pas très amical. J’avais en face de moi des gens d’une hostilité folle. Une hostilité aussi dans notre propre majorité. Les travaux d’une ligne de tramway sont très impactants. Il a fallu faire preuve de souplesse, discuter avec beaucoup de monde.

La ligne 2 a-t-elle été plus difficile à faire que la ligne 1 ?

La ligne 1 avait fait pas mal de dégâts. On entendait de tout ! La ligne 2 a été mal ressentie, car il fallait aller à l’extérieur de Montpellier. Tout le monde avait son idée sur le tracé… Il a fallu trancher. J’ai appris vite, et il le fallait. Bon, Frêche avait une idée phare : toutes les lignes doivent passer par la gare. C’est vite dit, c’est moins facile à faire. Mais il fallait agir. Autre principe : il fallait desservir les points importants de la ville.

Et la ligne 3 ?

Elle s’est faite extrêmement facilement. Après deux lignes compliquées, là, le tramway, tout le monde le voulait. Beaucoup de gens ont changé d’avis. Même dans les villages. Tout le monde passait dans mon bureau pour être sur le tracé.

Et la ligne 5 ?

Je l’ai entièrement projetée et j’ai obtenu la déclaration d’utilité publique en 2013, avant qu’elle ne soit arrêtée en 2014. À 80 %, c’est le tracé que l’on va inaugurer. On avait gagné le recours contre des opposants du parc Montcalm. Tout était prêt, on avait tous les accords, et puis la ligne a été abandonnée au moment du mandat précédent.

Cela vous a affecté ?

C’est exagéré. Mais on a perdu six ans ! Sans que je comprenne vraiment pourquoi. Un manque de courage ? Je ne sais pas. Une ligne de tramway, c’est plus facile de ne pas la faire : tu ne te fâches avec personne. Faire une ligne de tramway, c’est courageux.

« Le tramway a changé Montpellier bien au-delà de la seule question des transports »

Est-ce que Montpellier est indissociable de son tramway ?

Le tramway a transformé la ville, et même au-delà. Regardez la RN 113 à Castelnau-le-Lez : les fossés qui débordaient, les inondations récurrentes… Le tramway a permis de faire d’importants travaux, on a recalibré des cours d’eau dont on ignorait l’existence. Et pour le côté des transports : c’est une grande chance d’avoir ce maillage désormais, notamment avec les bus qui ne passent plus à la gare. Notamment grâce aux interconnexions entre les lignes. J’ai toujours demandé que l’on fasse des plans façon métro de Paris. C’est ce que l’on retrouve à Montpellier.

Êtes-vous favorable à une ligne 6, voire 7 ?

Non. Il fallait cette ligne 5, et bravo à l’équipe de Michaël Delafosse de l’avoir menée dans ce mandat, mais c’est 25 M€ du kilomètre, c’est trop cher. Sans compter que, quand on fait un tramway, on doit refaire tous les réseaux. Et puis le bus a fait d’énormes progrès. Demain, il existera en site propre, peut-être sans chauffeur. C’est vers ces lignes-là qu’il faut se tourner pour finir de mailler le territoire. Mais je ne suis plus aux affaires…