Par
Thomas Rideau
Publié le
17 déc. 2025 à 6h04
C’est un événement qui est passé sous les radars médiatiques. Il est à peine 5 h, ce 31 janvier 2025, quand un violent accident se produit. Un bus de la ligne 9 du réseau Argenteuil-Boucles de Seine tombe en panne sur les voies ferrées, à Sartrouville (Yvelines). Le chauffeur réagit immédiatement : il met en sécurité ses passagers et appelle la SNCF. Mais c’est trop tard. Un train percute et détruit le bus. Il n’y a pas de blessé, mais pour de nombreux observateurs, c’est un nouveau signe de la « vétusté » du parc de bus en Île-de-France. Et pour cause : le véhicule allait « fêter » ses 18 ans. Un âge canonique pour un bus. Et depuis ce 31 janvier, les incidents se sont multipliés.
Une quinzaine de bus ont pris feu sans cause identifiée
« En fait, on veut savoir combien d’accidents de bus ont pour origine la vétusté du matériel roulant », indique à actu Paris Céline Malaisé, conseillère régionale et présidente du groupe La Gauche communiste, écologiste et citoyenne. Avec son groupe, elle demande l’ouverture d’une mission d’enquête « pour objectiver » les données et faire un état des lieux du parc de bus.
Il faut dire que ces dernières années, de nombreux accidents ont eu lieu dans le réseau francilien. En un an et demi, 15 bus ont pris feu, sans apparente intervention humaine. Le dernier en date a été recensé au dépôt de Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis), dans la nuit de dimanche à lundi 15 décembre 2025. Quatre bus Citelis 12 ont ainsi pris feu « tout seuls » dans ce dépôt en moins de deux mois.
Une plainte déposée contre X
Concernant ces quatre bus qui ont pris feu au dépôt de Neuilly-Plaisance, apparemment sans intervention extérieure, la RATP Cap Île-de-France assure que « dès les premiers événements, une enquête interne a été diligentée sur les circonstances de ces incidents. Les premiers éléments de l’enquête indiquent que les causes des incendies sont d’origine différente. À ce stade, aucune piste n’est écartée ». La RATP précise même avoir déposé plainte contre X. « Des mesures conservatoires ont été prises pour inspecter l’ensemble du parc de bus concerné dans ce dépôt, sans attendre les résultats définitifs des expertises. » De plus, une quinzaine d’experts techniques a été déployée en renfort dans le centre bus depuis le début du mois et « les bus nécessitant des opérations de maintenance sont immobilisés avant d’être remis en circulation ».
Cette accumulation est prise au sérieux par Île-de-France Mobilités, l’autorité régulatrice des transports franciliens. « Nous avons, en lien avec RATP Cap Île-de-France, fait retirer la totalité des bus de même série ayant été touchés par ces incendies afin de procéder de manière préventive à des révisions », a indiqué à actu Paris Île-de-France Mobilités. L’opérateur a ainsi été sommé de conduire une enquête pour comprendre les raisons de ces feux.
La filiale de la RATP n’est pas le seul opérateur à être affecté. Keolis a également vu un de ses bus réduit en cendres soudainement, au Raincy (Seine-Saint-Denis), le 10 décembre dernier. Dans les deux cas les plus récents, l’âge s’avère un facteur aggravant. Le bus détruit à Neuilly-Plaisance avait ainsi 14 ans, et celui du Raincy plus de 15 ans. En moyenne, en France, les parcs ont un âge moyen compris entre 7 et 9 ans affirme un expert à actu Paris.
« Une maintenance curative et non plus préventive »
Parmi les départs de feu recensés par les élus, 10 ont eu lieu sur la route (les autres dans les dépôts). « C’est à la région, maintenant, et à IDFM de rassurer les machinistes », pense Céline Malaisé. D’après elle et les informations qu’elle a pu glaner au fil de ses visites, l’un des problèmes de ces bus est le manque de maintenance. « On est sur une maintenance curative et non plus préventive », insiste la conseillère régionale.
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Des échos confirmés par un connaisseur du secteur, qui précise à actu Paris qu’au dépôt de Coubron (dont dépendait le bus qui a brûlé au Raincy), « l’activité de l’atelier de maintenance est sérieusement réduite et ne peut plus assurer la maintenance du parc de manière optimale. […] À Coubron (Seine-Saint-Denis), le parc a une moyenne d’âge de 12 ans, avec une maintenance faible, et c’est ça qui crée des pannes et surtout des risques d’incendie. »
IDFM, qui n’a pas répondu sur la situation du dépôt de Coubron, assure que les véhicules présents au centre opérationnel de Neuilly-Plaisance « font l’objet d’un entretien régulier » et « sont passés aux contrôles techniques selon les normes ». Ils seront remplacés par une flotte entièrement électrique, conformément à la politique de transition énergétique menée par la région.
La balle est désormais dans le camp de la majorité régionale, veut croire Céline Malaisé : à eux d’accepter cette mission d’enquête et d’objectiver le nombre de bus vétustes ainsi que le nombre d’incidents liés à cette vétusté. « On veut que cette mission débouche sur des prérogatives, comme des visites inopinées de dépôts ou l’accès à toutes les informations. Quand on visite les dépôts lors des grèves, on se rend compte que beaucoup de bus ne devraient pas sortir. »
Avec Antoine Grotteria
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