Après l’échec du métro Aramis Georges Frêche a l’idée d’un mode de transport moderne. C’était il y a 30 ans…

Montpellier et son tramway, c’est une véritable épopée devenue, avec le temps et après pas mal de difficultés, une véritable histoire d’amour.

Un tramway qui a durablement façonné la ville, structuré, réparé et embelli ses quartiers. Pourtant, dans les années 1980, l’idée d’un tramway qui avait déjà circulé dans la ville, quelques décennies plus tôt, n’était pas le premier choix des élus. Georges Frêche, alors maire tout-puissant de Montpellier, avait même d’abord privilégié le projet “Aramis”. Il s’agissait d’un métro léger et futuriste conçu par l’industriel Matra, censé révolutionner les déplacements urbains. Une technologie ambitieuse, presque poétique, qui promettait d’allier la souplesse de la voiture à l’efficacité du métro. Sur le papier, le projet avait tout du futur radieux. Dans les faits, il deviendra l’un des plus célèbres mirages technologiques français.

Echec industriel

Dans une France fascinée par l’innovation, Aramis séduit : petites capsules autonomes, pas de conducteur, attelage virtuel, automatisation totale… ‘On pouvait rajouter autant de wagonnets selon la demande », se souvient l’ancien patron des transports de la ville, Georges Lescuyer, alors directeur de la SMTU, l’ancêtre de la Tam.

Matra y voit une vitrine internationale, les élus un moyen de propulser Montpellier dans la modernité. « Une partie d’ouvrage avait même été réservée sous la place de la Comédie pour faire passer ce métro », se souvient Jacques Vallet, alors directeur général des services du Disctrict, l’ancêtre de la Métropole de Montpellier.

La grosse colère de Georges Frêche

Georges Lescuyer, arrivé des transports de Grenoble qui avait créé le deuxième réseau de tramway moderne après celui de Nantes, prend le chantier en cours mais le prototype d’Aramis déçoit très rapidement. Les essais révèlent un attelage capricieux, une fiabilité insuffisante et surtout une capacité trop faible pour une ville en plein essor. Les coûts dérivent, les délais s’allongent, l’enthousiasme retombe. À Paris, l’expérimentation s’arrête. À Montpellier, Aramis cesse d’être crédible. « Georges Frêche ne décolérait pas du temps perdu et avait demandé à Matra le remboursement des frais d’études », souligne Georges Lescuyer.

La ville a alors besoin d’une solution solide, éprouvée et rapidement déployable. À la fin des années 1980, un nouveau choix s’impose : celui du tramway. Poussé par les écologistes de sa majorité, Georges Frêche s’y résout. « Il voulait arriver avec un projet ficelé avant les municipales de 1995 et en faire un enjeu des élections. Il a fait travailler les services d’arrache-pied », rappelle Jacques Vallet.

Le 18 juillet 1995, le conseil de District adopte le projet à l’unanimité, un événement inédit, dans un contexte de rivalités politiques exacerbées. L’accord repose sur un principe : « Il n’y aura pas qu’une seule ligne mais plusieurs. La première sera entièrement montpelliéraine, les suivantes iront vers Lattes, Juvignac, Pérols, Saint-Jean-de-Védas… Ce qui adviendra dans les faits », rappelle Georges Lescuyer.

Une signature urbaine

Cinq ans plus tard, et pas mal de travaux d’ampleur, le 30 juin 2000, la ligne 1 est inaugurée. L’enthousiasme est immédiat. Les rames aux hirondelles des célèbres designers Garouste et Bonetti traversent la Comédie sous les applaudissements. La ville comprend d’emblée ce que ce nouveau mode va changer : circulation apaisée, itinéraires clarifiés, identité visuelle forte. Le tramway devient une signature urbaine.

« Les opposants politiques avaient tout fait pour ralentir le projet. Certains assuraient que cela ne marcherait jamais, que les Montpelliérains étaient trop attachés à leur voiture. On sait ce qu’il en a été », sourit aujourd’hui l’ancien responsable des transports.

La réussite populaire est telle que la première ligne restera longtemps la plus fréquentée de France. L’extension du réseau s’impose alors naturellement. Le tramway accompagne la croissance de Montpellier, ligne après ligne, redessinant durablement la ville.