Par

Romane Rousseau

Publié le

19 déc. 2025 à 16h40

La petite clochette retentit lorsque nous rentrons dans la boutique. À l’intérieur, les joyaux reflètent dans les vitrines. De grands bandeaux jaune « déstockage » sont accrochés aux murs. Les visages d’Olivier et Jeanne Thual sont fermés.

Ce couple est à la tête de la bijouterie horlogerie O temps, suspends ton vol depuis huit ans. Une évidence pour Olivier Thual qui a plus de 45 ans d’expérience dans le métier. « Nous avons emménagé à Aigrefeuille-sur-Maine il y a 18 ans, explique-t-il. Mais avant, nous travaillions à Nantes dans le même domaine ».

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Ce qui leur plaît dans cet artisanat, c’est « l’amour de l’ancien ». « L’objet a une valeur plus que vénale, poursuit sa femme. Le côté affectif est souvent bien plus important, c’est pourquoi notre activité de réparation de bijoux ou d’objets marche bien ».

Internet et la grande distribution

Mais depuis plusieurs années, le couple rencontre des difficultés financières liées à leur activité. « On a tenu un commerce durant l’explosion d’Internet. Il faut être conscient que le système de vente à distance fait crever le petit commerce », regrette Jeanne Thual.

En effet, plus beaucoup de clients viennent dans la boutique pour acheter des bijoux. C’est leur expertise en matière de réparation qui est la plus sollicitée. « La réparation représente un nombre d’heures incalculables, et les prix sont bas. Il faut compenser par de la vente. »

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Mais les nouvelles tendances d’achat font que les clients se parent sur Internet, ou dans des boutiques où les prix sont cassés.

Nous n’avons pas toutes les marques. Mais il faut un sacrifice de la population. Il faut accepter de se conformer à l’offre qu’il y a en magasin et ne pas absolument voir ce qu’ils ont vu sur Internet pour faire vivre les petits commerçants.

 Jeanne Thual

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Car pour le moment, le couple remarque quelque chose : les clients vont acheter dans de grandes villes, comme à Nantes, car les bijoux sont moins chers. « Mais ils ne réparent par exemple pas les montres de plus de dix ans. » Alors ils viennent à la boutique d’Aigrefeuille pour la réparation. « Et nous, on a peanut. »

« Préserver ces valeurs et cet artisanat »

Pour eux, une solution existe : celle de créer une corporation des métiers autour de la bijouterie et de l’horlogerie. « Ça permettrait aux différents acteurs du secteur de se connaître et être garant de l’enseignement traditionnel du métier ».

Le couple met en avant le savoir-faire de leur boutique, et regrette l’apparition de vendeurs peu qualifiés.

Mon mari dit bien qu’au bout de 45 ans, il en apprend tous les jours. On n’apprend pas le métier avec une formation de quelques mois seulement. C’est un métier de transmission, pas un métier qui se brade.

Jeanne Thual

Le couple demande également une meilleure sauvegarde du métier, qui passerait par la protection des prix. « Tant qu’on a la concurrence de la grande distribution, nous ne sommes pas protégés. Il y aurait un rôle de l’État à préserver ces valeurs et cet artisanat ».

La suite ?

O temps, suspends ton vol va fermer ses portes le 31 janvier prochain. Avec une pointe d’amertume et de regret.

On a profondément aimé notre métier. Le commerce, c’est quelque chose dont la population a besoin. On s’aperçoit que quand les locaux ne savent pas à qui parler, on joue le rôle de confident. Ce sera un vrai manquement pour la population.

Une grande opération de déstockage est en cours. Olivier Thual va poursuivre son activité de réparation de bijoux, d’horlogerie et de divers objets sans surface commerciale. Jeanne, quant à elle, ne sait pas comment elle va rebondir. Les locaux seront repris par une agence de sécurité avec des bureaux.

5 avenue de Nantes. Téléphone : 02 53 78 04 10.

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