Par

Julien Bouteiller

Publié le

19 déc. 2025 à 19h18

Le patron du So, se refuse à se dire « dans un combat contre la préfecture ». Mais Nicolas Lamotte, co-gérant de la discothèque de Rouen a tenu à défendre son établissement face à la fermeture administrative de deux mois, imposée par les autorités. Ainsi, l’affaire s’est retrouvée, en urgence, dans les mains du tribunal administratif, ce vendredi 19 décembre 2025.

Sanction contre le So : qui a commandé la bouteille de vodka ?

Pour rappel, la boîte de nuit des quais rive droite a été sanctionnée « pour des infractions de vente d’alcool à un mineur et de vente d’alcool à des individus manifestement ivres », en septembre dernier, comme l’indique l’arrêté préfectoral.

Des infractions que le So, par la voix de son avocat, conteste : « L’arrêt dit que la bouteille de vodka a été servie à un groupe de sept. Mais il y a bien quelqu’un qui l’a commandée et payée cette bouteille ! Là, vous n’avez aucun élément permettant de savoir qui a commandé. Par ailleurs, rien ne permet de soutenir qu’il était en état d’ivresse manifeste ».

Si la mineure en question a reconnu avoir bu un verre de vodka dans l’établissement « sans avoir rien acheté ni commandé », cela n’apparaît pas suffisant, aux yeux du conseil du So, pour incriminer l’établissement. « Alors la préfecture nous dit qu’ils [le So] l’ont laissé boire. Moi, la vente ou le service d’alcool à un mineur par abstention, je n’ai jamais vu ça ! »

Et d’avancer les différentes attestations de clients, « dont trois fonctionnaires de police », témoins et personnels, dont il s’étonne qu’elle soit balayée par la préfecture dans la procédure contradictoire préalable à la sanction. Mais aussi un épais dossier attestant selon lui des efforts du So en matière de prévention des conduites à risques.

« On a vraiment travaillé dur là-dessus depuis un an [le So ayant déjà fait l’objet d’une fermeture d’un mois l’an dernier à la même période, NDLR], en allant au-delà de nos missions et on est fiers », s’enorgueillit Nicolas Lamotte, le co-gérant. « On travaille même avec la maman d’Owen [jeune décédé accidentellement après une sortie dans la discothèque]. On tend la main à la préfecture mais elle ne la prend pas. »

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De lourdes conséquences financières

L’avocat du So est également longuement revenu sur les conséquences financières de cette fermeture pour l’établissement qui fait travailler une quarantaine de salariés. Près d’1 million d’euros estime-t-il, en cumulant les pertes de chiffre d’affaires (avec la très importante soirée du Nouvel an), mais aussi les charges fixe.

« Cette période représente un cinquième du chiffre d’affaires annuel », avance-t-il en s’appuyant sur une expertise comptable. « Et cela arrive à une société déjà fragilisée » par la sanction de l’an dernier. « L’enjeu, c’est la pérennité de l’établissement. »

« Il y a des faits qui me semblent graves »

De son côté, l’État représenté par la sous-préfète, directrice de cabinet du préfet, estime pourtant qu’il y a urgence oui, non pas à rouvrir l’établissement, mais « à placer sur le plan de la santé et de la sécurité publique. Il y a des faits qui me semblent graves, à la fois dans leur réitération et dans leurs conséquences tragiques ».

Elle fait référence à la fois au décès d’Owen, mais aussi à une procédure en cours pour viol, dont la mineure qui a fréquenté l’établissement, dit avoir été victime ce fameux soir. Une affaire qui fait l’objet d’une enquête, comme nous l’a confirmé laconiquement le parquet et qui n’est pas mentionnée à l’arrêté pris par la préfecture.

La sous-préfète soutient par ailleurs que la bouteille a bien été vendue à un groupe « parfaitement identifié », dont la mineure « dont l’âge n’a pas été demandé à son arrivée ».

L’autre affaire dans l’affaire…

Lors des débats, une autre affaire dans l’affaire est revenue à plusieurs reprises. Les patrons du So ont en effet été entendus en garde à vue pour « subornation de témoin ». Ils sont soupçonnés d’avoir intimidé d’une manière ou d’une autre la mineure de 17 ans pour influencer son témoignage et l’attestation qu’elle a fourni dans le cadre de la procédure contradictoire.

« C’est quelque chose que je n’ai jamais vu ! », s’est ému l’avocat du So, habitué à défendre les intérêts de ce type d’établissements. Il a d’ailleurs fourni au tribunal administratif une copie de l’échange téléphonique entre les gérants et la jeune femme.

Selon la sous-préfète, c’est cette procédure judiciaire, parallèle à l’administrative, qui a ralenti l’examen du dossier et conduit à une sanction effective, coïncidence, avec la période des fêtes de fin d’année.

Sur ce volet, la procédure judiciaire est, selon la préfecture, toujours en cours.

Sur les autres bars récemment sanctionnés, elle « déplore qu’on ait eu à relever ces infractions et conduire ces procédures. Mais on ne concentre pas nos efforts sur la période de fin d’année ».

Le président du tribunal administratif a voulu, dans le cadre de cette requête en référé liberté, s’attarder sur les faits reprochés. Il aura fort à faire pour examiner, en urgence, le dossier. À l’heure où nous écrivons ces lignes, sa décision n’a pas été rendue. Elle le sera dans la soirée ou le weekend.

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