Des archéologues ont trouvé des traces de morsure d’animal sur un squelette à proximité de York. Il pourrait s’agir de la première preuve matérielle d’affrontements entre les combattants du Cirque et des bêtes carnivores dans la Rome antique.

Voilà une preuve tangible que, pour le plaisir du public romain, hommes et bêtes sauvages s’entretuaient. Dans le cadre des fouilles archéologiques dans un cimetière à proximité de la ville de York, les archéologues ont décelé des traces de morsures de félins sur un squelette humain, une information rapportée par le quotidien The Independent . Révélée dans une étude publiée ce jeudi dans la revue scientifique en ligne PLOS One, cette découverte constituerait la première preuve physique de combats entre un humain et un grand félin dans la Rome antique.

Découverte «extrêmement excitante»

La sépulture sur laquelle des traces ont été découvertes appartient à un vaste corpus de 80 squelettes, en majorité des hommes de 26 à 35 ans, exhumé en octobre 2024 sur ce chantier de fouilles du nord de l’Angleterre. Selon les archéologues, ils ont été enterrés entre le IIe et le IVe siècle, et auraient appartenu à une «familia» (une troupe, ndlr) de gladiateurs. L’étude rapporte que le squelette en question présentait des « marques de morsure de carnivore » et des trous profonds «inhabituels» sur son bassin. Une découverte «extrêmement excitante» pour les scientifiques, d’autant que les plaies ont été causées au moment du décès. Un scan de ces traces a permis de les faire correspondre avec les marques de morsure de grands félins, à l’instar des lions, de guépards ou de tigres, qui auraient traîné l’homme sur le sol. «Il ne s’agissait donc pas d’un animal qui charognait après la mort de l’individu. C’était associé à sa mort», a déclaré à The Independent le professeur Tim Thompson, directeur de ces recherches.

Le squelette en question était enseveli avec d’autres restes humains ainsi que des os de cheval. L’étude conclut que l’homme était un «bestiarius», un gladiateur entraîné pour combattre des bêtes dans l’arène. Car en plus des combats de corps à corps, les théâtres romains organisaient des «venationes», des «chasses aux bêtes» opposant guerriers professionnels et animaux. Cette tradition s’est perpétuée de la période républicaine au VIe siècle av J.C. jusqu’à la chute de l’Empire au Ve siècle. Y étaient chassés des grands félins, mais aussi des ours, des éléphants ou des taureaux. Les animaux étaient également employés aux mutilations des prisonniers, comme les captifs de guerre, les criminels, ou des religieux, telle sainte Blandine, qui fut en guise de sentence encornée par un taureau.

«Nous sommes en droit de penser que c’est le premier exemple d’une marque de morsure identifiée sur des restes de ce type», s’est enthousiasmé le professeur Tim Thompson. De Rome à Éphèse, aucune fouille archéologique n’a révélé de restes de gladiateur meurtri par un animal carnivore. Cela pourrait constituer un tournant dans l’archéologie des guerriers du cirque de la Rome antique, car leurs combats avec des bêtes étaient certes avérés, mais seulement dans la littérature historique ou les arts. Ces fouilles rappellent également que les jeux du Cirque n’étaient pas réservés à l’Urbs, mais avaient cours jusque dans les marges du monde romain, comme dans le nord de la Britannia (la Grande-Bretagne actuelle, ndlr). D’après l’étude, les archéologues du site d’York vont à présent s’atteler à un objectif d’envergure : retrouver les traces d’un possible amphithéâtre.