Historien et auteur niçois, Richard Pogliano s’apprête à publier un ouvrage consacré à la Madeleine, écrit collectivement avec les habitants. Un projet singulier, à la croisée de la mémoire locale, de la pédagogie et de l’écriture partagée, qui sera distribué gratuitement en début d’année. Notamment aux élèves du collège Jean-Rostand.

Pourquoi La Madeleine ? Avec Richard Pogliano, la réponse s’impose d’elle-même. « Nice est une ville de villages. La Madeleine est l’un d’eux, avec une identité très forte. On est d’abord de la Madeleine, de Magnan, avant d’être de Nice. »

Un quartier ancien, façonné par les vagues d’immigration, italienne, arménienne notamment, et par un attachement viscéral de ses habitants à leur territoire. De cette fierté est née l’envie de laisser une trace écrite. « Des riverains voulaient un document sur l’histoire du coin. Pas un livre savant, mais quelque chose qui leur ressemble. » 

L’auteur propose alors ce qu’il pratique depuis plusieurs années. Des ateliers d’écriture collective, déjà expérimentés à Nice-Nord.

Écrire l’histoire avec ceux qui la vivent

Pendant neuf mois, sept habitants de La Madeleine se sont retrouvés régulièrement pour rédiger. Parmi eux, Christian Gagne, figure bien connue et ancien président du comité de quartier.

« Ce sont des gens qui, pour la plupart, n’avaient jamais écrit. On commence par apprendre à structurer une pensée, à éviter certains pièges. Puis on construit ensemble le plan du livre. » Dont on ne connaît pas encore le nom.

3 2Le boulevard de la Madeleine en avril 1952 (Photo Archives Nice Côte d’Azur)

Chacun se voit confier une partie. L’origine agricole du vallon, les moulins à huile, les blanchisseries, la magnanerie, les vanneries, la culture religieuse, le sport, le tramway au début du XXe siècle, ou encore la transformation radicale du secteur dans les années 1960.

« Ils sont très vite devenus accrocs. Au bout de quelques mois, ils n’arrêtaient plus d’écrire » sourit l’auteur niçois, qui a écrit de nombreux ouvrages sur Nice.

Transmettre aux plus jeunes

L’ouvrage, achevé en décembre, paraîtra début 2026. Tiré à environ 700 exemplaires, il sera distribué gratuitement, notamment aux élèves du collège Jean-Rostand. « La Madeleine s’est tellement transformée que l’on ne s’imagine plus ce qu’il y avait avant. L’idée, c’est de transmettre cette mémoire aux jeunes. »

Le livre sera abondamment illustré, grâce à des photographies anciennes parfois inédites. Bâtiments disparus, scènes de vie du vallon du Magnan. « Sans images, la mémoire s’efface plus vite. »

Parmi les récits recueillis, certains relèvent presque du folklore. Comme la procession des limaces, autrefois organisée chaque 28 juillet. « On décorait les balcons avec des coquilles d’escargots éclairées. Tout était illuminé. La procession existe encore, mais elle a perdu cette ampleur. »

Autant d’histoires qui content une réalité sociale souvent oubliée. « La Madeleine a fourni les petites mains des grands hôtels niçois. Les femmes lavaient le linge des palaces, les hommes travaillaient aux champs, aux moulins, sur les chantiers. Ce quartier a largement participé au développement de Nice. »