En tirant un trait sur l’interdiction à la vente des voitures neuves thermiques en 2035, l’Europe a voulu rassurer les constructeurs, les équipementiers et certains Etats, à commencer par l’Allemagne, l’Italie et les pays de l’Est. Pour autant, ce renoncement tient avant tout du symbole. Car la révision des objectifs d’émissions de CO2 relève finalement de l’épaisseur du trait.

En passant de 100% à 90%, la concession de Bruxelles apparait éloignée des espoirs les plus optimistes. Outre-Rhin, certains lobbyistes espéraient obtenir un seuil de 80%.

Huit R5 E-Tech pour une Clio hybride 

La marge de manœuvre accordée aux constructeurs, apparait finalement marginale. Elle ne suffira sans doute pas, à justifier les investissements dans les moteurs thermiques. Rappelons que désormais, les industriels pourront continuer à commercialiser aussi des moteurs hybrides, rechargeables, ou encore à prolongateur d’autonomie au-delà de 2035. Reste à savoir dans quelles proportions. 

Selon les estimations actuelles, un constructeur comme Renault devrait commercialiser huit R5 E-Tech pour vendre une Clio 6 hybride ! Qui plus est, cette flexibilité sera uniquement accessible aux constructeurs qui s’engagent à incorporer de l’acier bas carbone produit au sein de l’Union européenne, ou encore des carburants durables, a précisé Stéphane Séjourné, commissaire européen.

Un report de dix ans vers le tout-électrique

Si le paquet automobile enterre le 100% électrique, les constructeurs n’ont pas attendu cette proposition qui doit être encore validée par le parlement européen, pour revoir leur stratégie. 

Ainsi, après General Motors, Ford a capitulé, renonçant à ses projets de BEV pour privilégier notamment l’hybride et l’essence. En Europe, les firmes ont revu aussi leurs ambitions, donnant la priorité aux technologies alternatives, telles que le micro-hybride 48 Volts.

La décision de Bruxelles retardera forcément le passage au tout-électrique, les observateurs parlant d’une dizaine d’année supplémentaires. Surtout, elle obligera les industriels à se concentrer sur la production de modèles électriques moins chères, et plus petits, grâce à la mise en place d’une nouvelle catégorie de voiture dite M1-e, de moins de 4,20 mètres. A l’image du projet Hipster de Dacia.

Une première victoire pour les constructeurs

Si la voiture électrique est touchée, elle n’est donc pas coulée. Les constructeurs ne s’y trompent pas. « Le paquet présenté reconnaît que le cadre réglementaire actuel n’est pas adapté à l’objectif d’une transition énergétique, a réagi Stellantis. Malheureusement, les propositions ne répondent pas de manière significative aux problèmes auxquels l’industrie est actuellement confrontée. »

Toutefois, cette première victoire pourrait ouvrir la voie à un détricotage plus large du Pacte Vert. Le bras de fer devrait donc se poursuivre entre les constructeurs et les instances européennes d’ici 2035, notamment sur les véhicules utilitaires. 

Le recul des Etats-Unis en matière de réduction des émissions de CO2 et des consommations, alimentant les espoirs des legacy du Vieux-Continent. Des firmes prises en tenaille entre les impératifs fixés par Bruxelles, et un marché réfractaire au tout-électrique.