Une publicité et un jeu vidéo ont mis la semaine dernière en évidence l’importance de la ville, mais aussi de la région Occitanie, dans ces domaines, et ceux de l’animation, du cinéma, ou de la télévision.

Le 11 décembre dernier, une double actualité faisait de Montpellier l’épicentre des industries culturelles et créatives : un jeu vidéo, Clair Obscur : Expedition 33, créé par le studio local Sandfall Interactive raflait neuf Game Awards (l’équivalent des Oscars) à Los Angeles, et une publicité pour Intermarché, un court-métrage animé signé du studio montpelliérain Illogic, battait des records de vue. Une réussite qui ne vient pas de nulle part.

Une histoire née en 1994 avec Ubisoft

« Tout part du début des années 1990 quand Ubisoft s’est installé à Montpellier » raconte le Montpelliérain Laurent Michaud, de la société de conseil Ospex spécialisée dans le jeu vidéo et l’animation, pour qui, « Dans la filière des ICC, à Montpellier, les secteurs du jeu vidéo et de l’animation sont les plus visibles à l’international. » Emmanuel Carré, porte-parole d’Ubisoft, confirme : « Le premier coup de maître est survenu sous l’impulsion de Michel Ancel et Frédéric Houde avec la création de Rayman en 1995. » Soit le premier triomphe d’une longue série de jeux sortis des studios montpelliérains d’Ubisoft. Suivront, entre autres titres cultes : Beyond Good and Evil, Les lapins crétins, ou Prince of Persia : The Lost Crown.

Un loup à plus d’un milliard de vues

Le monde entier est désormais au courant : le loup vedette du sport publicitaire de Noël d’Intermarché réalisé par les animateurs montpelliérains d’Illogic Studio a viré au phénomène de société d’ampleur planétaire.

Nouvelle supertar des réseaux sociaux avant de probablement devenir une peluche très recherchée, cette publicité devenue virale, qui, dès son lancement, a bénéficié d’un bouche-à-oreille ultra-favorable a déjà été vue plus… d’un milliard de fois. Un succès et un engouement tout simplement ahurissants.

« Ubisoft est devenu un studio légendaire, avec lequel les plus grands veulent travailler. Spielberg pour le jeu Tintin ou Peter Jackson pour celui tiré de son King Kong, souhaitaient les voir réalisés à Ubisoft Montpellier » complète Emmanuel Carré. Selon qui, « des gens qui ont travaillé à Montpellier et Ubisoft ont essaimé partout dans le monde, et partout dans le monde, des gens veulent venir travailler à Montpellier ».

Où ont également émergé des studios de taille intermédiaire, auteurs eux aussi de jeux haut de gamme : « Les jeux du studio The Game Bakers ont remporté des Pégase (équivalent des César pour le jeu vidéo, NDLR). DigixArt aussi. Et Blue Twelge avait remporté un Game Award il y a deux ans avec Stray. Autant de structures montpelliéraines créées par des anciens d’Ubisoft », rappelle Laurent Michaud.

Studios, formations : un cercle vertueux

Dès lors, un cercle vertueux se forme, à Montpellier, et plus largement en Occitanie. « Montpellier est un des lieux de France où l’on forme le plus au jeu vidéo, des écoles privées à l’université Paul-Valéry. Sans oublier les laboratoires de recherche que l’on trouve dans la région, à Montpellier ou à Toulouse, sur ces sujets. Puis un peu plus tard, l’animation a commencé à se mettre en place, avec là encore des studios, et des écoles de formation, comme ARTFX, ou l’Esma » rappelle Laurent Michaud. Sur la seule zone du Grand Montpellier, une offre conséquente d’enseignement généraliste en matière d’audiovisuel (l’école Travelling, autre exemple), ou plus spécialisé (Acoustik, pour le son) est en effet proposée.

Michaël Delafosse : « L’écosystème le plus complet de France »

En sus, des structures publiques sont solidement établies, et continuent de se renforcer (la Cité créative à Montpellier, Occitanie films au niveau de la Région), et les collectivités locales soutiennent largement, et encouragent financièrement cette filière, via subventions et fonds d’aides.

Avec des retombées économiques plus que substantielles. Pour l’année civile 2022, elles avaient été estimées à 90 millions d’euros en Occitanie pour le seul secteur de l’audiovisuel. Il représente désormais, dans la région, près de 11 000 emplois (filière du jeu vidéo comprise) inscrits dans environ 700 entreprises.

« Illogic ou Sandfall sont aujourd’hui les phares de l’écosystème le plus complet et le plus dynamique de France, comme on l’avait déjà observé avec le succès du studio Montpelliérain fortiche pour la série Arcane, ou avec Le comte de Monte-Cristo, dont la première partie a été largement tournée dans la Métropole de Montpellier », savoure aussi le maire de Montpellier, Michaël Delafosse. Qui rappelle que c’est la Métropole qu’il préside qui compte le « plus grand nombre d’entreprises lauréate de l’appel à projets France 2030 ».

Cinéma et télévision : terre de tournages

C’est l’autre grand succès de l’aire urbaine de Montpellier, et de l’Occitanie plus largement. Qui, notamment portée par le succès de trois séries quotidiennes intégralement tournées à Sète, dans la Métropole de Montpellier, et dans le Gard, est devenue la deuxième région de France en matière d’accueil de tournages, et la première pour les seules fictions audiovisuelles.

Les exemples abondent : d’Un si grand soleil (France Télévision) à Ici tout commence (TF1), en passant par Demain nous appartient (TF1), pour ces séries. Ou des films d’Abdellatif Kechiche (La graine et le mulet, Mektoub my love, filmés à Sète) à la série animée Astérix d’Alain Chabat (réalisée aux studios TAT de Toulouse), en passant par les longs-métrages de réalisateurs régionaux, tels Animale d’Emma Benestan, ou Chien de la casse, de Jean-Baptiste Durand, respectivement tournés en Camargue ou dans l’Hérault. Des titres puisés parmi des dizaines d’autres exemples, auxquels on pourrait ajouter les programmes pour plateformes, films ou séries, en vogue eux aussi.

Preuves ultimes de cette vitalité : dans l’Hérault, un très ambitieux projet de studio (Pics Studio) est lancé du côté de Saint-Gély-du-Fesc, alors que France Télévision inaugurera, au début 2026, le doublement de la capacité de ses studios sis à Vendargues. Ils se déploieront alors installés sur plus de 30 000 m2.