La Fondation de France Centre-Est, dont le siège est situé à Lyon est présente dans tous les départements d’Auvergne-Rhône-Alpes ainsi que dans les quatre départements du sud Bourgogne : Saône-et-Loire, Jura, Doubs et Côte-d’Or.

Son nouveau président, Olivier Desmarescaux, élu en septembre dernier, a présenté mardi 29 avril, le bilan et les perspectives d’une structure philanthropique atypique, qui place l’entreprise au cœur de la démarche d’intérêt général et de bien commun.

Olivier Desmarescaux, quelles ont été vos motivations pour prendre la présidence de la Fondation de France Centre-Est ?

Il s’agit d’une combinaison de facteurs. Le premier est un constat général, celui d’une planète qui a besoin d’être plus durable, apaisée et solidaire. Il faut être actif face à ces défis. Il faut s’engager, contribuer et apporter… J’avais donc cette réflexion-là, et aussi l’envie de redonner à la région Auvergne-Rhône-Alpes ce qu’elle m’a offert pendant mon parcours d’entrepreneur. Une région à laquelle je suis en plus très attaché. Et puis, Delphine Allarousse, notre déléguée générale est venue me voir pour me proposer ce beau challenge.

J’ai alors découvert la Fondation de France et son positionnement unique de fondation abritante, à la fois experte sur les besoins en philanthropie, sur les initiatives et sa capacité à accompagner en confiance les mécènes, avec une équipe impliquée et attachante. Cette combinaison d’éléments a fait que je me suis engagé.

© Betty Garcia – Olivier Desmarescaux, aux côtés de Delphine Allarousse, déléguée générale de la Fondation de France Centre-Est.

Quelle vision aviez-vous de la philanthropie avant votre prise de fonction et de quelle manière avez-vous vu évoluer l’appétence des entrepreneurs pour celle-ci ?

J’étais convaincu depuis longtemps déjà que l’entreprise a une responsabilité et qu’elle s’engage de plus en plus. Je suis entrepreneur depuis 2001 et j’ai vu un changement dans les discours et les actes, avec de plus en plus d’entreprises qui s’engagent au service de leur territoire. Pour autant, seulement 8 % des entreprises donnent en France. Le verre se remplit mais il reste encore à mobiliser les chefs d’entreprises. Nous nous sommes donnés justement la mission de renforcer la position de la Fondation de France auprès des entreprises pour les faire passer à l’acte.

Les dates clés d’Olivier Desmarescaux

2024 : Président de la Fondation de France Centre-Est.

2022 : Fondateur de Booster +.

2001 : Reprise d’Eurotab.

1991 : Diplômé de l’emlyon.

Quelle est la dynamique du don en Auvergne-Rhône-Alpes ?

En Auvergne-Rhône-Alpes, on compte 83 000 donateurs actifs mais la proportion des entreprises qui donnent est plus grande qu’ailleurs. 46 % des fondations et fonds de dotation ont au moins un fondateur entreprise contre 30 % à l’échelon national. Et par ailleurs, 70 % des fondations abritées par la Fondation de France Centre-Est, mènent des actions locales, contre 50 % au niveau national. Ce qui signifie que les mécènes auralpins sont plus impliqués que dans les autres régions.

La Fondation de France Centre-Est accompagne 1 555 projets en Auvergne-Rhône-Alpes

Le bilan 2024 et les perspectives de la Fondation de France Centre-Est ont été présentés le 29 avril. Quels en sont les grands enseignements et de quelle manière, ceux-ci s’inscrivent-ils dans votre feuille de route ?

J’ai pris mes fonctions tandis que la Fondation de France Centre-Est affiche une belle dynamique en termes d’actions sur notre territoire. Nous enregistrons ainsi +20 % de moyens supplémentaires en 2024, soit 35,7 millions d’euros, contre un peu moins de 30 millions en 2023. Ce qui nous permet d’accompagner 1 555 projets en Auvergne-Rhône-Alpes. Nous avons accueilli aussi cinq nouvelles fondations abritées en 2024.

L’enjeu est donc de poursuivre sur cette belle dynamique car les besoins sont de plus en plus importants. Les principaux sujets d’accompagnement sont l’enfance et l’éducation (27 %), la vulnérabilité et l’inclusion (23 %) et la transition écologique (22 %).

En plus de renforcer notre présence auprès des entrepreneurs pour qu’ils deviennent mécènes, nous souhaitons aller plus loin dans notre présence dans les métropoles de notre zone comme à Saint-Etienne, Dijon, Chambéry et Annecy.

Olivier Desmarescaux : « Le covid a été un moment particulier pour la philanthropie »

Les entreprises viennent-elles vers vous naturellement où devez-vous relever le défi de la prospection pour les sensibiliser à la philanthropie ?

Le covid a été un moment particulier pour la philanthropie. Je dirais qu’il y a eu un avant et un après pour les entreprises qui ont pris conscience qu’il fallait aider notre société et nos territoires. Nous travaillons notre notoriété et notre visibilité ce qui nous permet d’avoir des appels entrants, et nous organisons plusieurs actions pour aller chercher des mécènes.

De quelle manière les entreprises entendent-elles vos arguments, expriment-elles certains a priori par rapport au don ?

Le premier enjeu d’une entreprise est de travailler sa pérennité et donc son développement. Ce n’est donc pas toujours le bon moment pour les solliciter et il faut prendre en compte cette conjoncture propre à chaque entreprise. En revanche, la quasi-totalité des entrepreneurs sont conscients des enjeux d’accompagnement du territoire dans lesquels ils évoluent.

En cela, l’entreprise n’est pas hors-sol. Elle a des collaborateurs, des prestataires et des clients, qui sont dépendants du dynamisme et de la santé des territoires. L’entreprise entend donc notre message, notamment celui de lui apporter l’expertise qu’elle n’a pas. L’univers de la philanthropie n’est pas forcément l’un de ses thèmes de prédilection et elle a besoin d’un référent qui va l’aider à définir les meilleurs véhicules de la philanthropie, de la fondation abritée, jusqu’aux dons simples, en passant par la participation à des clubs d’entrepreneurs engagés.

Comment identifiez-vous les initiatives et les projets dans les territoires ?

Nous agissons également en amont, au travers de l’Observatoire de la philanthropie, qui nous permet de déceler les besoins et leurs évolutions, et promouvoir aussi les initiatives innovantes. Je pense au partenariat entre la Ville de Villeurbanne et la commune du Teil en Ardèche, avec une double approche, banlieue-ruralité, pour permettre à des étudiants de trouver des logements en ville et inversement, de permettre à des populations urbaines de trouver des lieux de vacances à la campagne. Je citerais également le centre de santé communautaire à Bron, Le Jardin, qui rassemble des médecins et des animateurs sociaux qui travaillent ensemble sur des enjeux de santé public, préventifs et curatifs, à travers des ateliers de paroles ou des randonnées. Nous nous appuyons par ailleurs sur nos 30 bénévoles présents sur l’ensemble de ce territoire pour identifier les initiatives et d’analyse des dossiers.

La philanthropie comme source d’enrichissement personnel et collectif

L’acte de don appauvrit-il l’entreprise selon vous ? Est-ce un argument que pourraient vous opposer les entreprises ?

Il existe différents mécanismes d’optimisation fiscale, néanmoins quand on donne, le solde net est négatif. Mais lorsqu’on opère l’acte de donner et qu’on est entrepreneur, on devient plus riche, parce le territoire dans lequel on se trouve est enrichi du don que l’on fait et permet de travailler sur un certain nombre de causes.

A ce titre, l’entreprise s’enrichit de manière qualitative. De la même manière que son dirigeant participe à une aventure entrepreneuriale autre que son entreprise et vit une autre expérience qui crée de la valeur ajoutée. Avec un sens autre donné au travail pour les collaborateurs. Une entreprise n’est pas là pour servir que ses propres intérêts, elle est aussi là pour montrer l’exemple, aider ses clients, ses voisins… Ce sens du bien commun est important. C’est une source d’enrichissement personnel et collectif.

La philanthropie est-elle aussi un levier dans le processus de transmission d’une entreprise ?

Ce sont des mécanismes qu’il s’agit d’étudier avant de prendre une décision. Il n’y a pas d’a priori sur ce point mais la philanthropie et la possibilité de créer des fondations abritées sont des éléments à intégrer dans l’équation, impérativement en amont. Et nous sommes prêts à accompagner les entrepreneurs pour se poser les bonnes questions. Je ne présage pas pour autant des réponses qui sont apportées et qui dépendent de cas particuliers.

Entre nous et Olivier Desmarescaux

  • Son style de management : écoute, bienveillance et exigence.
  • Ses inspirations : les voyages, « voir ce qui se passe à côté et loin de chez nous est toujours très inspirant ».
  • Son lieu ressource : la vallée de Chamonix « qui nous élève et qui nous rappelle combien cette Terre est bouleversée en ce moment ».
  • Ses lectures : Les Choses humaines (Gallimard) de Karine Tuil.