Dans de nombreux jardins britanniques, les décorations de Noël
partagent cet hiver l’affiche avec des massifs jaunes et roses.
Alors que les guirlandes brillent encore, des jardiniers ont filmé
des jonquilles déjà écloses et des vivaces en
fleurs, un spectacle jugé « beaucoup trop tôt » pour la saison. Sur
TikTok, George Cook montre son coin de verdure baigné de soleil le
20 décembre, où les bulbes de printemps se comportent comme si
février était déjà là.

D’autres vidéos lui ont rapidement répondu, chacune avec la même
stupeur : des pousses de jonquilles pointent dans les jardinières,
des arbres bourgeonnent et même quelques insectes bourdonnent
autour des parterres. Au Royaume-Uni, où ces fleurs symbolisent
normalement le retour du printemps à partir de février, cette
avance interroge autant qu’elle fascine. Pour nombre de jardiniers,
ces corolles jaunes ressemblent désormais à un discret
avertissement climatique.

Des jonquilles en fleurs en plein décembre au Royaume-Uni

Dans sa vidéo, George Cook filme des jonquilles et des vivaces
roses déjà en pleine floraison sous un soleil d’hiver, avant de
lâcher : « Ce n’est pas normal », a-t-il résumé sur TikTok, cité par
Express.co.uk. Le même jour, une autre passionnée de jardinage,
Rach, installe ses lumières de Noël quand elle tombe sur des bulbes
déjà levés : « Je mets des guirlandes de Noël dans mon jardin et
laissez-moi vous montrer ce que je viens de trouver »,
explique-t-elle, avant d’ajouter : « C’est fou. » Elle insiste : « Les
jonquilles sont sorties – je suis sûre qu’en général on commence à
les voir fin janvier. Je ne me plains pas, mais j’espère juste
qu’elles tiendront jusqu’au printemps », raconte-t-elle dans cette
vidéo relayée par Express.co.uk.

Rach montre aussi des arbres déjà en bourgeons et conclut :
« Nous avons eu un hiver si doux et la météo pense que le printemps
est arrivé en avance. Je n’ai jamais vu de jonquilles sortir aussi
tôt. » Sous la vidéo de George Cook, les commentaires s’enchaînent.
Un internaute écrit : « Comment peut-on voir des jonquilles fleurir
en plein hiver et nier le changement climatique, cela me dépasse.
C’est comme regarder par la fenêtre, voir un ouragan et se dire ‘je
vais bien, tout va bien, je suis sûr que ça ne me tuera pas’. » Un
autre raconte qu’il a vu un bourdon voler « joyeusement » un jeudi de
décembre, quand un jardinier professionnel confie que ce qu’il
observe chaque jour – bulbes, bourgeons, abeilles, papillons – est
« magnifique mais pas normal » et « tellement, tellement triste ».

Un hiver doux qui bouscule le calendrier des fleurs

Selon la Royal Horticultural Society, les jonquilles passent
plusieurs mois à développer leurs racines avant de fleurir, en
général entre février et mai au Royaume-Uni. Cette
année, un mois de décembre avec des températures moyennes autour de
7 à 10 °C a manifestement suffi à « coaxer » les bulbes hors du sol
bien plus tôt que prévu. Pour les jardiniers, cette impression de
« faux printemps » s’installe : des fleurs typiques de mars côtoient
encore des pétunias en fleurs ou des fraisiers qui ont produit
jusqu’à la fin du mois précédent, comme l’ont raconté plusieurs
internautes.

Ce ressenti rejoint les travaux de l’Université de
Cambridge
. L’étude, citée par Express.co.uk, précise :
« Les chercheurs ont basé leur analyse sur plus de 400 000
observations de 406 espèces de plantes issues de Nature’s Calendar,
maintenu par le Woodland Trust, et ont mis en regard les premières
dates de floraison avec des mesures instrumentales de température.
Ils ont constaté que la date moyenne de première floraison entre
1987 et 2019 est d’un mois complet plus précoce que la date moyenne
de première floraison entre 1753 et 1986. » Les auteurs lient
directement cette avance à l’accélération du changement
climatique
d’origine humaine et évoquent un risque de
« décalage écologique », quand plantes, insectes et oiseaux ne se
retrouvent plus au bon moment.

Un signal d’alerte pour les écosystèmes
et pour les jardiniers

L’étude souligne que si « les premières fleurs de printemps sont
toujours une vision réjouissante », cette floraison avancée peut
avoir des conséquences pour les écosystèmes et l’agriculture
britanniques. Un coup de froid tardif peut brûler feuilles et
boutons déjà sortis, fragilisant les bulbes et les arbres
fruitiers. Et quand les pollinisateurs émergent à leurs dates
habituelles, ils risquent de manquer le pic de nectar, ce fameux
« ecological mismatch » qui menace la biodiversité
si les espèces n’arrivent pas à s’adapter.

Face à ces scènes de faux printemps, les
experts en jardinage recommandent en général d’éviter les réactions
brutales. Les bulbes de jonquille restent robustes et supportent
souvent un retour du froid, même si le feuillage jaunit. Les gestes
conseillés restent simples :

  • protéger les jeunes pousses avec un paillage léger en cas de
    gel annoncé ;
  • limiter le piétinement des zones déjà levées pour ne pas abîmer
    les bulbes ;
  • observer et consigner les dates de floraison, à l’image de
    Nature’s Calendar, afin de mieux suivre l’évolution locale du
    climat.