À l’approche des élections municipales de mars 2026, la rédaction de Midi Libre Montpellier se lance dans une tournée des quartiers pour recueillir l’avis des Montpelliérains sur le bilan de la municipalité Delafosse et sonder leurs attentes pour le prochain mandat. Onzième et dernière étape : La Mosson.

À quelques mois des élections, la parole est donnée aux habitants. Pour cette dernière étape, direction l’un des quartiers les plus emblématiques de Montpellier : La Paillade, officiellement Mosson, même si ceux qui y vivent sont attachés à l’ancien nom.

Au cœur des halles des Quatre Saisons, alors que le froid hante les allées, les gens se bousculent et se pressent devant l’étal coloré du maraîcher. Certains dégustent un petit café pour se réchauffer. La plupart habitent le quartier et confient avec attachement que quoi qu’on dise, ce quartier a une âme bien particulière.

Beaucoup de monde se pressant pour acheter des fruits et des légumes.

Beaucoup de monde se pressant pour acheter des fruits et des légumes.
Midi Libre – JEAN-MICHEL MART

« On ne s’y retrouve plus »

Et qui de mieux pour faire un tour des lieux que Christel Reddaf qui vit sur place depuis cinquante ans et qui a vu se succéder les réalisations et autres projets des différents maires. « Quand je suis arrivée en 1976, le quartier n’était pas encore fini, c’est pour dire que j’en ai vu des changements », sourit-elle avec malice.

Même si elle n’est pas trop pour les démolitions, elle l’admet : certaines actions ou réhabilitations étaient nécessaires comme la Tour d’Assas ou encore l’Arche Mercure. Mais pour le reste, elle n’est pas tendre avec les choix politiques des dernières années.

« Ce que je regrette c’est qu’il n’y a pas assez de concertations avec les habitants. » Les projets sont déclinés et ne sont pas toujours en adéquation avec ce dont les gens ont réellement besoin, semble-t-elle annoncer.

« Entre tous les projets, on ne s’y retrouve plus », reprochant l’excès d’ingérence et le peu de dialogue. « Ils veulent détruire la passerelle au niveau de la rue de Leyde qui réunit tout le mail, pour en faire des îlots. Moi je ne veux pas qu’on nous sépare. Ça serait comme casser les Ramblas de la Paillade. » Sans compter la suppression des places de parkings.

Une identité et une fierté

Pour cette farouche défenseure : « Il faut que ça reste dans l’esprit du quartier. Au lieu de tout détruire pour construire, il faut rénover… Mais au moins on a pu garder le stade. »

« C’est un quartier qui a beaucoup de valeurs ». Ce qu’elle apprécie c’est la proximité, cette identité forte et propre au quartier, « le fameux vivre ensemble ». Elle est fière d’être du quartier et le revendique.

Et ce n’est pas sa comparse Mireille Brun qui va la contredire : « La Paillade, c’est un village », s’exclame celle qui y est installée depuis 2004. « Au départ, on ne m’a proposé qu’un appartement ici. J’ai été obligée de venir ici mais attention je n’ai pas été déçue. »

Car pour cette Montpelliéraine, »tout est à portée de main : les commerces les transports, les médecins… entre les clubs et les médiathèques, on peut aussi se divertir ou voir des films ».

Sa seule déception, c’est le projet avorté de l’installation de la Clinique Clémentville. « On avait beaucoup d’espoir avec son arrivée. On ne sait pas pourquoi ils nous ont présenté le projet si ce n’était pas encore fait. »

À part l’insécurité à améliorer, pour elle tout va bien. Même si la femme de 78 ans le confie à voix basse : « Je ne m’empêche pas de sortir le soir. Et puis ça craint davantage au niveau du Corum ou dans le tram qu’ici. Quand je passe le soir vers 22 h tout le monde me salue. Je n’ai pas arrêté de vivre. Mais je ne rentre pas plus tard quand même. »

Sangliers et ordures ménagères dispersées

Sa seule crainte finalement c’est de se retrouver nez à nez avec les sangliers. « Il y en a partout », explique Cédric, agent d’entretien dans le quartier. Il ne vit plus ici, « mais j’y ai grandi et je reste très attaché ». Alors quand il voit l’état déplorable des potagers partagés, ça le met en rogne. Entre les ordures éparpillées et les jardins en accès libre… les sangliers sont vernis.

Un peu plus loin, un groupe d’anciens est attablé. Certains préfèrent ne rien dire, mais l’un d’entre eux s’exclame avec véhémence : « Ici c’est dégueulasse, il y a des incivilités, des portes cassées. Enfin vous savez bien ce qui se passe dans ce quartier. Il faudrait qu’il y ait davantage de contrôles, mais non, personne ne vient pour faire cesser tout ça. On préfère regarder ailleurs. »

L’homme a l’impression que ce quartier et ses habitants sont mis à la marge. « Cela fait 60 ans que je suis en France, et à cause de ça je veux partir. »

« Il faudrait punir ceux qui jettent leurs poubelles n’importe comment », s’énerve Omar. « Il y en a marre. Ça attire les nuisibles, ça devient vraiment préoccupant. »

De belles constructions

L’arrivée du commissariat dans le carré Uranus ne semble pas changer la donne en termes d’insécurité, ni d’incivilité. « Après faut reconnaître que l’immeuble est magnifique. C’est bien beau de faire une belle résidence, mais à force ça sera trop cher. Et si c’était privatisé à terme, bonjour les loyers », signale Ali avec inquiétude.

Pour Abdelkader, la vraie réussite de ce mandat, c’est sans conteste l’école Hypatie. Il espère que sa fille pourra y aller. « Les gens disent que c’est très bien pour les enfants et qu’il y a un bon niveau. » Nadine elle regrette que ces fils soient trop grands aujourd’hui pour pouvoir en profiter. « Mais ça ne les a pas empêchés de réussir et de dire haut et fort qu’ils viennent d’ici : ils sont fiers d’être de la Paillade. »