La démence progresse silencieusement. Avec le vieillissement de la population, de plus en plus de familles y sont confrontées, souvent sans solution de traitement. Face à ce constat, la recherche s’intéresse de près aux facteurs de prévention, et notamment à ce que nous mettons chaque jour dans notre assiette. Régimes, nutriments, habitudes alimentaires : rien n’est laissé au hasard. Et si l’un des aliments les plus appréciés des Français, consommé depuis des générations, cachait en réalité un effet protecteur inattendu pour le cerveau ? C’est ce que suggère une vaste étude publiée dans Neurology.
Alimentation : une piste sérieuse pour réduire le risque de démence
L’équipe suédoise s’est penchée sur l’alimentation de 27 670 adultes suivis sur plus de 25 ans. Résultat marquant : les personnes consommant au moins 50 grammes par jour de fromage riche en matières grasses présentaient un risque de démence réduit de 13 % par rapport à celles qui en consommaient très peu. Le résultat va encore plus loin avec la crème, 20 grammes consommés quotidiennement diminue le risque de 16 %.
Tous les fromages contenant plus de 20 % de matière grasse sont concernés : brie, gouda, cheddar, gruyère, parmesan ou encore mozzarella. À l’inverse, aucune association protectrice n’a été observée pour les produits allégés, le lait (entier ou écrémé) ou les yaourts.
Pour Emily Sonestedt, épidémiologiste nutritionnelle à l’université de Lund, ces résultats bousculent certaines certitudes : « Notre étude a révélé que certains produits laitiers riches en matières grasses pourraient en réalité réduire le risque de démence, remettant en question certaines idées reçues sur les matières grasses et la santé cérébrale. »

Consommé quotidiennement par de nombreux Français, le fromage fait l’objet d’un regain d’intérêt scientifique. L’étude menée sur plus de 25 ans suggère qu’une consommation régulière de certains fromages riches en matières grasses pourrait être associée à un risque réduit de démence, sans toutefois établir de lien de causalité direct. © Liudmila Chernetska, iStock
Ce que la science peut (et ne peut pas encore) affirmer
Les chercheurs se gardent toutefois de toute conclusion hâtive. Il s’agit d’une étude observationnelle, qui met en évidence une association, mais pas un lien de causalité direct.
La professeure Tara Spires-Jones, spécialiste des neurosciences à l’université d’Édimbourg, rappelle ainsi : « Ce type d’étude ne permet pas de déterminer si l’association observée est réellement due à la consommation de fromage. L’alimentation et le mode de vie des participants ont très probablement évolué sur 25 ans. »
D’autres experts soulignent néanmoins l’intérêt nutritionnel du fromage. Le professeur Eef Hogervorst rappelle qu’il contient des nutriments clés pour le cerveau : « Les fromages entiers apportent des vitamines A, D et K2, de la vitamine B12, mais aussi de l’iode, du zinc et du sélénium, tous impliqués dans la santé cérébrale. »
Un aliment parmi d’autres, pas une solution miracle
La démence concerne aujourd’hui plus de 57 millions de personnes dans le monde, et les projections restent inquiétantes. Comme le rappelle Richard Oakley, directeur adjoint de la recherche à la Société Alzheimer : « Une alimentation équilibrée, l’activité physique, la gestion des facteurs cardiovasculaires et l’arrêt du tabac ont un impact bien plus important que le fait de se concentrer sur un seul aliment. »
Le fromage n’est ni un remède ni un bouclier absolu contre la démence. Mais consommé avec modération, dans le cadre d’un mode de vie globalement sain, il s’agit d’une piste intéressante qui mérite d’être explorée par de futures recherches.
Une bonne nouvelle pour les amateurs… sans pour autant oublier l’essentiel : le cerveau aime la variété, la régularité et l’équilibre.