Mi-janvier, la Menuiserie Collaborative fermera définitivement son vaste atelier de 1 000 m² du quartier Tournezy, à Montpellier. Créé en 2017 par Olivia Liesse et Yoann Lapeyronie, ce tiers-lieu dédié au bois et à l’artisanat partagé n’a pas trouvé son équilibre économique.
Mi-janvier, le bruit des machines cessera dans le vaste hangar de la Menuiserie Collaborative. Quelque 1 000 m² principalement dédiés au travail du bois, mais aussi du fer, de la tapisserie d’ameublement ou de la céramique, ouverts en novembre 2017 dans le quartier Tournezy par Olivia Liesse et Yoann Lapeyronie. Leur idée : proposer un lieu mutualisé et équipé à des particuliers et des professionnels sans locaux. « Je reste convaincu que le concept était bon. Il est toujours bon, mais nous n’aurons pas réussi à trouver une stabilité économique », détaille le cofondateur.
Plus de 2000 artisans amateurs et professionnels
Plombée par des difficultés financières, placée en redressement judiciaire dès sa première année et sous surveillance depuis, la Menuiserie Collaborative a fermé ses portes aux particuliers le 23 décembre. Ils auront été plus de 1 200 à venir travailler le bois pour leur plaisir ou pour se former, au sein de la structure. Les professionnels, eux, continueront d’occuper les lieux jusqu’à la mi-janvier, en fonction du calendrier judiciaire.
« Plus de 2 000 personnes sont passées par l’atelier en huit ans d’existence. Ça a été une belle aventure humaine », explique Yoann Lapeyronie. Ébéniste de formation, menuisier pendant dix ans dans différents ateliers, il avait mûri le projet au fil de ses expériences professionnelles. « Quand vous démarrez votre activité, investir dans un atelier et des machines, c’est compliqué. Ici, nous avions créé un véritable écosystème pour mutualiser, mais aussi s’entraider, se conseiller… »
Une société coopérative d’intérêt collectif
Pour stabiliser son modèle économique, la Menuiserie Collaborative avait intégré au fil des années une branche formation qui aura profité à plus de 200 personnes, ouvert son plateau technique à des CFA et produit ses propres meubles. Elle aura compté jusqu’à sept salariés et 135 investisseurs au sein de sa société coopérative d’intérêt collectif.
« C’était un modèle assez unique en France, notamment pour la qualité et le nombre de nos appareils, et le fait que nous soyons ouverts autant aux professionnels qu’aux particuliers », détaille Yoann en faisant le tour des zones de travail et des machines. Ces dernières représentent un investissement de plus de 100 000 euros. « Une somme impossible à sortir pour la plupart des artisans. »
« Un melting-pot de savoir-faire »
Mais la hausse continue des charges et du loyer, associée à l’augmentation du coût des matières premières, aura eu raison de ce tiers-lieu. Après deux années déficitaires, le mandataire financier qui accompagne la menuiserie a sifflé la fin de l’aventure. L’avenir ? « Soit un repreneur se positionne pour reprendre les actifs et peut-être les salariés, et installer une activité de menuiserie, soit tout sera vendu aux enchères pour payer les dettes. » Mais Yoann Lapeyronie ne regrette rien. « On a beaucoup appris, on a grandi et vu grandir beaucoup de monde dans cet atelier qui était devenu un melting-pot de savoir-faire. »
« Conseils », « dépannage » et « coups de main » entre artisans
Dans l’atelier de la rue Georges Auric, la quinzaine de professionnels adhérents de la Menuiserie Collaborative continue de profiter jusqu’au bout de l’espace de travail. Et s’interroge sur la suite. « Je viens ici depuis sept ans. J’ai découvert l’endroit après avoir dû quitter l’atelier que j’occupais et qui a été vendu, explique Éric. J’ai un temps travaillé chez moi, mais ce n’était pas viable. Reprendre un local alors que je n’ai pas besoin de l’occuper en continu, ce n’était pas non plus une solution. Ici, j’ai trouvé de la flexibilité et des machines outils de très haute qualité, qu’aucun indépendant ne peut s’offrir. »
L’artisan fait partie d’un petit collectif qui va tenter de poursuivre l’aventure de la mutualisation, sous une forme très réduite. « On cherche un local à partager. Car au-delà de l’avantage financier, on a aussi découvert une manière de travailler en réseau. On se dépanne sur des chantiers, on se donne des conseils sur les produits. Et de manière encore plus pragmatique, on se file un coup de main quand les meubles sont trop lourds ! » Preuve que si l’aventure s’arrête, l’idée de la Menuiserie Collaborative va se poursuivre…