Lundi 15 décembre, le ministre des Affaires étrangères avait qualifié l’ancien militaire français de «relais de la propagande du Kremlin en Europe». Le jour même, Xavier Moreau était placé sur liste noire par l’Union européenne.
Le jour même, Xavier Moreau «remerciait» Jean-Noël Barrot de «reconnaître la qualité de [s]on travail» et s’enorgueillissait d’être «le numéro UN!». Neuf jours plus tard, ce mercredi 24 décembre, l’ancien militaire franco-russe placé sur liste noire de l’Union européenne a changé de ton. Par l’intermédiaire de son avocat – Me Carlo Alberto Brusa, star des antivaccins – l’administrateur du compte Twitter anti-occident «Stratpol» a fait part de sa décision «d’engager des poursuites judiciaires devant la Cour de justice de la République à l’encontre de Monsieur Jean-Noël Barrot».
Le 15 décembre dernier, le ministre des Affaires étrangères avait annoncé des sanctions, à l’initiative de la France, «à l’encontre de douze agents de la destabilisation russe en Europe, responsables des ingérences numériques étrangères». Au cours de son allocution, il avait nommément cité «Xavier Moreau, ressortissant franco-russe basé en Russie qui est un relais de la propagande du Kremlin en Europe». Dans la foulée, le Conseil de l’Union avait publié ladite décision, actant un gel de ses avoirs au sein de l’UE, une interdiction de transactions financières et commerciales avec les citoyens et entreprises de l’Union, et une interdiction d’entrer ou de transiter sur le territoire européen.
Positionnement pro-Kremlin
Les sanctions décidées à l’encontre de la Russie et de personnalités liées au Kremlin se fondent sur les articles 21 et 29 du Traité sur l’Union européenne, qui prévoient que le Conseil de l’Union européenne adopte des décisions pour «sauvegarder ses valeurs, ses intérêts fondamentaux, sa sécurité, son indépendance et son intégrité», mais aussi de «consolider et de soutenir la démocratie». À cet égard, une décision du Conseil du 8 octobre 2024 prévoit la possibilité de sanctionner des personnes considérées comme «responsables de la mise en œuvre ou du soutien d’actions ou de politiques» de la Russie, «qui portent atteinte ou menacent les valeurs fondamentales de l’Union et sa sécurité, son indépendance et son intégrité, ainsi que la stabilité, la sécurité ou l’indépendance de ses États membres».
Or, Xavier Moreau, qui vit avec sa famille en Russie depuis 2000, se réclame ouvertement d’un positionnement pro-Kremlin. Sur son compte Twitter, suivi par plus de 100.000 abonnés, ainsi que sur les plateformes prisées des pro-russes Rumble et Odysee, il reprend à son compte les thèses historiques de Vladimir Poutine et sa propagande, en expliquant par exemple comment l’Ukraine a été façonné par les États-Unis depuis les années 1990 pour devenir un pays anti-Russie, ou en vantant les bienfaits de «l’opération militaire spéciale » qui aurait «ramené les valeurs patriotiques» chez les jeunes russes.
Mais l’avocat de Xavier Moreau conteste formellement ces accusations. «Xavier Moreau n’a pas de mandat de la Russie, c’est un homme libre qui s’exprime depuis de nombreuses années. Être pro poutine ou pro russe n’est pas un délit», plaide Me Carlo Alberto Brusa auprès du Figaro, en brandissant l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui protège la «libre communication des pensées et des opinions». Dans son communiqué, il estime qu’«aucune preuve factuelle ne vient étayer ces attaques personnelles, qui dénaturent la réalité des faits». En plus de l’action prévue devant la Cour de justice de la République à l’encontre de Jean-Noël Barrot, Me Carlo Alberto Brusa assure qu’une procédure va être déclenchée «sur le plan européen» pour contester la décision du Conseil de l’Union européenne.