1 Une décision locale

En cas de réalisation du projet de LGV, le passage de la future ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse entraînera nécessairement des coupures de parcelles sur le territoire. Des exploitations…

1 Une décision locale

En cas de réalisation du projet de LGV, le passage de la future ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse entraînera nécessairement des coupures de parcelles sur le territoire. Des exploitations séparées par la voie ferrée et, plus généralement, des modifications durables du paysage agricole et forestier. Pour tenter d’y répondre et de compenser les « dommages éventuels », des commissions communales ou intercommunales d’aménagement foncier (CCAF et CIAF) sont mises en place dans les territoires concernés.

Leur rôle est déterminant : lors d’une première réunion, elles doivent se prononcer sur l’opportunité même de recourir à cette procédure d’Afafe. En cas de vote favorable des membres de la commission, le Conseil départemental devra ensuite engager des études d’un an, afin de définir un périmètre d’intervention, distinct de celui du projet ferroviaire. Ce périmètre peut être très étendu, bien au-delà de la surface de l’emprise de la ligne, afin de permettre une réorganisation globale des terres.

2 Qui décide, qui finance ?

Ces commissions rassemblent propriétaires fonciers, agriculteurs, élus locaux, ainsi que trois personnes qualifiées pour la protection de la nature. En cas de vote favorable, c’est SNCF Réseau, maître d’ouvrage du projet, qui est tenue de financer les aménagements fonciers, comme le prévoit la déclaration d’utilité publique (DUP) de 2016 (art. 3). Le maître d’ouvrage ne participe en revanche pas au vote.

« La zone d’emprise, c’est nous, maître d’ouvrage, qui nous en occupons. Mais la DUP prévoit que c’est bien nous qui sommes tenus de financer ces aménagements fonciers dans le périmètre qui sera défini », rappelle Armand Thomas, responsable foncier de SNCF Réseau pour la LNSO. Sur l’ensemble du tracé Bordeaux-Toulouse (tous départements confondus), 20 commissions communales et intercommunales se sont déjà prononcées, dont 18 favorablement.

Si la commission vote en faveur de l’aménagement foncier, la procédure peut ensuite déboucher sur des échanges de parcelles, mais aussi sur la création de nouveaux accès, de chemins d’exploitation ou encore des travaux hydrauliques. En revanche, en cas de refus du jury, pas de remembrement global sur le secteur concerné : « Les compensations se négocient alors au cas par cas entre la SNCF et les propriétaires. Si ce n’est pas de l’ingénierie foncière globale, il peut y avoir des indemnisations financières plus importantes », reprend Armand Thomas. Intérêts collectifs et personnels peuvent donc faire irruption lors de ces commissions, au-delà du simple avis positif ou négatif au sujet de la LGV.

3 Une logique de compensation contestée

Pour SNCF Réseau, ces procédures relèvent d’une logique de « réparation » des impacts du projet. L’objectif affiché est de maintenir la viabilité des exploitations agricoles et forestières, malgré les coupures induites par la ligne, en repensant l’organisation foncière du territoire.

Mais cette approche ne fait pas l’unanimité. Président de l’association Ciron bien commun et membre de plusieurs de ces commissions en Gironde, Jean-Yves Boutet estime que les dégâts causés par le tracé dans la vallée du Ciron seraient irréversibles. « Tous les remembrements ont le même effet : ils ne vont pas dans le sens du maintien de la biodiversité », affirme ce biologiste de formation, qui a voté contre lors de la commission de Landiras, le 18 décembre dernier. Selon lui, « il n’existe aucune compensation possible face à un tel désastre écologique. […] Refaire des maillages de parcelles, ça entraîne la modification des écosystèmes. Vous vous retrouvez avec des terrains plus grands, avec un type de végétation, d’arbre ou de culture… Ça bouleverse tout », craint le président de cette association.

Si Ciron bien commun ne s’oppose pas à proprement parler aux mesures compensatoires, l’association juge néanmoins que les décisions sont prises « trop rapidement », alors même que le tracé reste contesté par certains acteurs locaux.

4 Où en est-on en Gironde ?

En Gironde, onze commissions d’aménagement foncier sont concernées par la LGV Bordeaux-Toulouse : sept commissions communales et quatre intercommunales. Si Landiras a voté positivement pour le déclenchement de la procédure le 18 décembre dernier, Balizac, Captieux ou encore Préchac seront aussi concernées avant la fin du mois de janvier. Toutes doivent tenir cette première réunion stratégique, au cours de laquelle se jouera l’avenir – ou non – de la procédure AFAFE sur leur territoire.