La Chine a adopté une position défiante mardi en réponse aux inquiétudes américaines concernant les efforts de Pékin pour étendre son influence au Chili, riche en ressources, exacerbant ainsi les tensions autour d’un important projet chinois dans le nord aride du Chili.

Lors d’une conférence de presse mardi à Santiago, capitale du Chili, l’ambassadeur de Chine Niu Qingba a fustigé les États-Unis pour «ingérence dans le droit souverain du Chili à choisir ses partenaires de manière indépendante» et pour diffusion de «désinformation sur le projet».

Ce projet découle d’un accord conclu en 2023 entre l’Observatoire astronomique national chinois et l’Université catholique du Nord du Chili, portant sur la construction d’un puissant observatoire spatial dans le vaste désert d’Atacama, au nord du pays. Le télescope à haute résolution proposé serait capable d’observer les objets géocroiseurs, soit les astéroïdes ou les comètes.

Mais le projet s’est rapidement retrouvé empêtré dans la rivalité croissante entre la Chine et l’administration Trump.

À Washington, l’inquiétude grandit quant à l’influence de la Chine aux portes des États-Unis – alors que Pékin construit des infrastructures, stimule les investissements dans l’agriculture, l’énergie, l’exploitation minière et d’autres secteurs en Amérique latine – et qu’elle détrône le pays comme premier partenaire commercial de la région.

Lors de son audition de confirmation au Sénat plus tôt ce mois-ci, Brandon Judd, candidat du président américain Donald Trump au poste d’ambassadeur des États-Unis au Chili, a tiré la sonnette d’alarme quant à l’empreinte croissante de la Chine dans l’un des pays les plus prospères et les plus stables d’Amérique latine. En tant qu’ambassadeur, il a déclaré qu’il chercherait à convaincre le Chili que «nous sommes le meilleur partenaire commercial».

«Nous sommes le meilleur partenaire dans tous les domaines, qu’il s’agisse de l’Antarctique, de la pêche, de la conservation marine – dans tous les domaines qui sont très importants pour le Chili», a soutenu M. Judd devant la commission sénatoriale des relations étrangères. «Nous continuerons de renforcer nos liens avec le Chili et de limiter l’accès de la Chine à toutes les ressources dont le Chili pourrait disposer.»

Interrogée par M. Judd, la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen a décrit le projet de télescope chinois au Chili, ainsi que sa station de contrôle de missions spatiales déjà opérationnelle en Argentine voisine, comme des signes avant-coureurs des ambitions de puissance mondiale de Pékin.

«La Chine accroît son influence en Amérique latine, en Afrique et dans le monde entier alors que les États-Unis se retirent, a soutenu Mme Shaheen. Ce n’est pas dans l’intérêt de notre sécurité.»

Alors que l’inquiétude américaine grandissait, le gouvernement chilien a annoncé la suspension du projet pour examen. «Sa portée reste à clarifier», a indiqué le ministère chilien des Affaires étrangères.

Bien que la Chine nie toute finalité militaire du projet, des responsables américains ont exprimé des craintes quant au potentiel de tels observatoires spatiaux à accroître les capacités de renseignement de la Chine.

L’ambassadeur Niu a balayé ces craintes mardi, assurant que «la Chine ne s’intéresse pas à la géopolitique». Il a accusé les États-Unis de provoquer des tensions en «diffamant les projets chinois en invoquant des arguments géopolitiques». Il a affirmé que l’observatoire proposé était «de même nature» que les nombreux autres télescopes du nord du Chili financés par les États-Unis.

«Nous suivons de près l’évolution de l’incident et espérons que la partie chilienne pourra mettre fin à l’ingérence américaine et approuver la mise en œuvre du projet dans les meilleurs délais», a déclaré M. Niu.

Le département d’État n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire sur les propos de l’ambassadeur.

Le porte-parole du gouvernement chilien, Aisén Etcheverry, a indiqué que les autorités étaient en discussion avec l’université catholique privée du nord du pays et l’Observatoire astronomique national chinois «afin de déterminer si ce projet astronomique s’inscrit dans le cadre institutionnel chilien».

Les États-Unis, l’Union européenne, l’Australie et plusieurs autres pays exploitent des observatoires dans le désert d’Atacama, au Chili. La géographie de la région – un climat extrêmement sec et de haute altitude, avec un air constant et la cordillère des Andes qui bloque les nuages à l’est – offre des conditions de clarté exceptionnelles qui en ont fait un pôle majeur de l’astronomie mondiale.

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Isabel DeBre, rédactrice de l’Associated Press à Buenos Aires, en Argentine, a contribué à cette dépêche.