Des campagnes verdoyantes du Kent aux landes sauvages d’Écosse, les papillons font partie du décor naturel britannique depuis des siècles. Mais derrière cette image familière se cache une réalité bien plus fragile. En l’espace de quelques décennies, les populations de papillons au Royaume-Uni se sont effondrées, victimes d’un déclin lent mais constant que même les espèces les plus communes ne parviennent plus à éviter. Alors que les relevés s »accumulent et que les chiffres s’aggravent, c’est tout un pan du vivant qui semble s’éclipser silencieusement des paysages.
Un effondrement entamé il y a près de 50 ans
Depuis 1976, des milliers de bénévoles scrutent les papillons sur plus de 3 000 sites à travers le Royaume-Uni dans le cadre du UK Butterfly Monitoring Scheme. Ce programme unique au monde, coordonné par Butterfly Conservation, le UK Centre for Ecology & Hydrology, la British Trust for Ornithology et le Joint Nature Conservation Committee, permet de suivre avec précision l’évolution des espèces.
Les résultats sont sans appel. D’après les dernières analyses relayées par BBC, 31 des 59 espèces de papillons observées affichent un déclin à long terme. Parmi elles, certaines souffrent de reculs vertigineux. Le papillon Petite Tortue, autrefois très répandu, a vu ses effectifs s’effondrer de 86% en près de cinq décennies. Même sort pour la Piéride du navet, dont la population a chuté de 28% depuis le début du programme.
Cette dynamique n’est pas liée à un phénomène ponctuel. The Guardian rappelle que la baisse concerne aussi bien les espèces rares que les papillons communs vivant dans les parcs ou les jardins, comme le Bleu commun ou le Myrtil. Ces espèces autrefois familières disparaissent des paysages britanniques à un rythme inquiétant.
L’année 2024 marque un tournant dans la chute des effectifs
L’année écoulée s’est révélée particulièrement sombre. Selon les données, 2024 se classe comme la cinquième pire année pour les papillons depuis le début des relevés. Seules six espèces ont montré une amélioration de leurs effectifs par rapport à 2023, contre 51 en recul.
Neuf espèces ont même connu leur pire année enregistrée, notamment la Petite Tortue, le Cuivré commun, le Skipper grisé ou encore l’Azuré des collines crayeuses. Ces résultats, détaillés par Birdguides, concernent aussi des espèces pourtant bien implantées dans le paysage rural britannique, ce qui souligne l’ampleur du phénomène.
La météo de l’année n’a pas aidé. Le printemps humide et l’été relativement frais ont limité la reproduction et la survie des insectes. Mais ce facteur ponctuel ne suffit pas à expliquer l’effondrement. Les papillons déjà affaiblis par la perte de leurs habitats sont désormais trop vulnérables pour résister aux aléas climatiques, devenus plus fréquents avec le changement climatique.
Comment enrayer la disparition des papillons au Royaume-Uni
Face à cette situation, les appels à l’action se multiplient. Butterfly Conservation a même déclaré une « urgence nationale » pour les papillons. Pour le Dr Richard Fox, la disparition progressive de ces insectes emblématiques s’explique avant tout par les activités humaines. Pollution, usage intensif de pesticides, urbanisation galopante et artificialisation des sols ont transformé les écosystèmes.
Mais des solutions existent. Des recherches relayées par Country Living ont montré qu’un simple geste comme laisser l’herbe pousser dans son jardin peut considérablement augmenter le nombre de papillons observés. Encourager les plantes nectarifères, bannir les pesticides, varier les essences florales… autant d’actions à la portée de chacun.
À l’échelle collective, les scientifiques appellent aussi les collectivités locales à revoir leurs pratiques. Moins de tontes, plus d’espaces laissés à l’état naturel. Ces ajustements peuvent avoir des effets positifs immédiats, y compris dans les zones urbaines.