Suzanne Lefort-Rouquette a désormais son nom affiché sur un établissement toulonnais. Elle a été honorée hier, à l’occasion d’une cérémonie haute en émotions. Désormais le lycée polyvalent Rouvière se nomme Rouvière- Suzanne Lefort-Rouquette. Une démarche qui s’inscrit dans le cadre de la commémoration du 80e anniversaire du débarquement de Provence. La Région Sud « a fait du devoir de mémoire une priorité en faisant évoluer la dénomination de six lycées du territoire régional pour rappeler le rôle central qu’a joué la Provence dans l’histoire de la Libération « .
« Ce nom doit être plus qu’un hommage: il doit être une source d’inspiration pour tous ceux qui franchissent les portes du lycée, a insisté le proviseur du lycée, Nicolas Rougier. Avec ce nom, nous inscrivons notre engagement pour une éducation humaniste, au service de la mixité sociale, exigeante et républicaine « .
Pour François de Canson, vice-président de la Région, ce changement » est une transmission. Un souffle. Un acte de mémoire vivante. Suzanne Lefort-Rouquette, c’est une vie donnée aux autres. Une vie d’action, de résistance, de soin, de lumière « .
« La grand-mère de toute la jeunesse »
L’ambulancière est devenue une héroïne du débarquement. Photo DR.
Pour cet événement, Jacques et Hugues Lefort, les petits-fils de cette héroïne de la libération, ont fait le déplacement depuis Bordeaux et Marseille. « Nous n’aurions pu rater ce moment « , glissent-ils. Leur cousine, Catherine était elle aussi présente pour cet instant figé dans le temps. « C’est un bel hommage à notre famille, nous avions pour habitude de venir en vacances dans la maison qu’elle avait à Hyères « .
Qui aurait pu croire que des années après, un lycée de la commune voisine porterait le nom de leur grand-mère? » Pas nous en tout cas, sourit Jacques. Depuis toujours, Suzanne Lefort-Rouquette était simplement notre grand-mère. Aujourd’hui, elle devient, en quelque sorte, la grand-mère de toute la jeunesse qui passera par cet établissement. C’est fort en symbole ».
Et d’ajouter, en s’adressant aux lycéens présents pour l’inauguration de la plaque d’entrée avec le nouveau nom de l’établissement: « Vous n’aurez pas la guerre, je l’espère, mais vous pouvez être dès maintenant des héros du quotidien en prenant exemple sur celle qui a donné son nom à votre lycée. Construisez votre idéal et suivez votre intuition, elle vous guidera pour faire les bons choix. (…) Et souvenez-vous que les coups durs arrivent toujours dans une vie et même sur une seule jambe on peut rebondir. Et faire de belles choses jusqu’à 101 ans ». De bien belles paroles, accueillies avec émoi par ces élèves ayant travaillé sur le parcours de la résistante (lire ci-dessous).
Inauguration du Lycee Rouviere Suzanne Lefort-Rouquette
Une vie au service de la patrie
Suzanne Lefort-Rouquette (1912-2014) s’engage dans l’armée française à 30 ans. D’abord ambulancière, elle devient cheffe de section dans le 25e bataillon de la 9e division d’infanterie coloniale. Sous ses ordres, ce ne sont pas moins de trente ambulancières qui viennent au secours des blessés en Corse, sur l’île d’Elbe et à Cavalaire durant le débarquement de Provence. Prenant une part active à la guerre, elle est grièvement blessée à Courtelevant et finit amputée d’une jambe.
Elle reçoit la légion d’honneur et épouse en 1945 le capitaine du bataillon de choc qu’elle avait rencontré sur les champs de bataille. Il deviendra plus tard le général Jacques Lefort. Après la guerre, Suzanne Lefort Rouquette part à l’étranger, où elle crée des dispensaires pour les malades de la lèpre.
En 1992, elle écrit ses mémoires et rend hommage à toutes ces ambulancières qui ont donné leurs vies sur le champ de bataille.
La résistante meurt le 17 août 2014, à Hyères. Soit 70 ans après avoir débarqué en Provence.