Le dirigeant russe a assuré mercredi que des ressortissants de l’Hexagone se battaient aux côtés de forces russes dans le cadre de « l’opération spéciale ».Ils seraient regroupés au cœur d’une unité nommée « Normandie-Niémen ».Une référence historique à un régiment de chasse qui a combattu au sein de l’Armée rouge pendant la Seconde Guerre mondiale.
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Ukraine : 4ᵉ année de guerre
On connaissait les Français engagés dans la légion ukrainienne pour se battre aux côtés de Kiev, on connaissait moins ceux qui seraient engagés aux côtés des troupes du Kremlin. Dans une prise de parole à la télévision, Vladimir Poutine a en effet assuré que des soldats français se trouvaient aux côtés des forces russes. « Il y a des gens qui ont partagé et partagent encore nos principes et nos valeurs et qui sont à nos côtés, indique dans la vidéo en tête de cet article l’homme fort de Russie. Aujourd’hui, des citoyens français se battent aux côtés de nos soldats dans le cadre d’une opération militaire spéciale ».
C’est la première fois que le maître du Kremlin assure aussi clairement que des Français se battent aux côtes de Moscou face à l’Ukraine. Mais cette situation suit un schéma « presque traditionnel », analyse le général François Chauvancy, consultant géopolitique pour LCI. « Il faut relativiser, combien sont-ils ? », s’interroge le spécialiste précisant que « ceci fait partie de l’image de propagande« . « Ce n’est pas extraordinaire, dans toute guerre aujourd’hui, vous avez des personnes qui ont fait des choix, d’un côté comme de l’autre et cette image est aujourd’hui exploitée par Poutine », analyse-t-il.
Un nom hautement symbolique
Mais qui sont ces hommes ? Selon Vladimir Poutine, ils seraient regroupés au sein d’une unité baptisée « Normandie-Niémen ». Une référence directe à la Seconde Guerre mondiale, le régiment « Normandie-Niémen » ayant combattu au sein de l’Armée Rouge face à l’Allemagne nazie. Composé de pilotes de chasse et de mécaniciens français volontaires, l’escadron est l’un des plus prestigieux de l’armée française. Son nom reste légendaire en Russie.
Il a participé à partir de 1943 aux batailles de Koursk, Smolensk et du fleuve Niémen, d’où l’unité prendra son nom définitif sur ordre de Staline, puis de Prusse-Orientale, en territoire allemand. L’unité a obtenu 273 victoires homologuées au cours de 5.240 missions et de 869 combats. 42 de ses 97 pilotes ont péri. Une référence qui a ainsi « quelque chose de douteux et blasphématoire », dénonce sur LCI Sergueï Boutman, rédacteur en chef adjoint de la radio Échos de Moscou.
« Padre » et « Gauthier »
Concernant le profil des hommes au sein de cette unité, on sait peu de choses. Elle serait spécialisée dans l’usage de drones, selon une émission de la chaîne de télévision publique russe Ria, citée par Le Figaro (nouvelle fenêtre). Dans Le Parisien (nouvelle fenêtre), Ulrich Bounat, analyste géopolitique spécialiste de l’Ukraine, estime qu’ils seraient « une dizaine » au sein de leur unité. L’ancien colonel et vice-président de l’institut Thémis, Peer de Jong, table quant à lui plutôt sur « une cinquantaine ou une petite centaine ».
Ils seraient principalement d’anciens militaires. La télévision d’État, Rossiya 1, relayée par Le Figaro, a ainsi mis en avant deux soldats qu’elle présente comme deux anciens officiers de l’armée française. Ils se font désignés par les indicatifs « Padre » et « Gauthier » et auraient rejoint les forces du Kremlin dans le Donbass. « Padre » se dit ancien instructeur dans la Légion étrangère en France et assure, sur la télévision russe, que « Russes et Français doivent lutter ensemble contre les ‘idées dégénérées’ de l’Occident et le mouvement LGBT, qui sont moralement destructeurs ».
Un contexte particulier
Un autre homme a été identifié comme Serguei M. Interrogé par nos confrères de franceinfo (nouvelle fenêtre), il serait né à Lougansk dans le Donbass, mais aurait été élevé en France. Ancien réserviste de l’armée française, il serait dans l’est de l’Ukraine depuis 2014, au début de la guerre dans cette région de l’est de l’Ukraine. Dans une vidéo diffusée par la chaîne de télévision ruse Vesti, il s’était mis en scène il y a quelques jours, montrant un passeport français expiré et un passeport russe qu’il venait de recevoir.
Si la Russie est toujours restée discrète sur ce sujet, le timing de l’annonce de Vladimir Poutine semble savamment calculé par le Kremlin : ces prises de parole interviennent juste après les accusations de Paris visant les renseignements militaires russes, soupçonnés d’être derrière plusieurs cyberattaques dans l’Hexagone (nouvelle fenêtre), notamment lors des derniers Jeux olympiques et pendant la campagne présidentielle de 2017 (nouvelle fenêtre) d’Emmanuel Macron.
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Par ailleurs, selon Alexandre Negrus, président de l’Institut d’études de géopolitique appliquée, sur LCI, avec ces déclarations, « Vladimir Poutine aujourd’hui cherche à diviser encore plus les Européens à l’approche des commémorations à venir, mais en plus dans un contexte fortement compliqué d’organisation européenne face au lâchage américain ».
A.B.