« Cros-de-Cagnes, ton univers impitoyable. » À sa façon d’introduire certaines de ses publications sur Facebook, l’on peut reconnaître à Jean-Pierre Woignier une certaine autodérision. En reprenant les paroles du générique culte de la série américaine « Dallas », le président de la Casa du Cros concède être au cœur d’un feuilleton rythmé par les coups bas. La preuve avec le dernier épisode des Villas Fleuries, ces habitations classées en face desquelles le promoteur Erilia souhaite construire quatre maisons modernes.
Pour dénoncer le projet, certains riverains ont accroché une grande bâche sur le terrain en friche, bientôt transformé en chantier. Recouvrant une ruine, le visuel représente l’une des futures villas. « Pour être réalistes, on s’est basés sur les infos du permis de construire. Comme ça, on prouve à tout le monde que ces baraques sont trop hautes, trop modernes. Bref, de vulgaires pastiches qui défigureront le quartier », assène Jean-Pierre Woignier.
Une plainte déposée pour dégradation
La bâche désinstallée par une entreprise mandatée par le promoteur, Erilia, allée des Villas Fleuries, à Cagnes-sur-Mer, le 2 avril 2025. Photo DR Nice Matin.
Avant de fulminer: « Mais quelques jours plus tard [le 2 avril], trois individus ont détruit la bâche. Ils l’ont saccagée à coups de cutters, le bois a été cassé. Qui sont les auteurs? » Il s’étrangle: « Ils ont dit travailler pour Erilia! Ça veut dire que le groupe leur a demandé de venir tout démonter en mode expédition punitive? Mais qu’est-ce que c’est que ces méthodes de voyou? Un grand groupe ne devrait pas agir comme ça. Si la bâche ne leur plaît pas, ils n’ont qu’à saisir la justice. »
C’est d’ailleurs ce qu’à fait le militant associatif: « J’ai déposé une plainte pour violation de propriété privée. Ces types se sont aventurés dans l’allée des Villas-Fleuries, qui est une voie privée. La plainte concerne aussi la dégradation de matériel appartenant à autrui, la bâche appartenant à la Casa du Cros. »
Mais l’installation même de cette bâche n’était-elle pas une violation de propriété privée? La friche est un domaine du promoteur… « On a recouvert une verrue, ce n’est pas un crime », tente de balayer Jean-Pierre Woignier. Assez confiant dans son bon droit, il compte bien réinstaller une nouvelle bâche « d’ici les prochains jours ».
« Une bâche installée sans autorisation »
Pour sa part, Erilia dément formellement toutes dégradations: « Cette bâche a été retirée dans le respect des biens d’autrui par une entreprise mandatée, sans aucun acte de dégradation, et sous la surveillance de témoins. La police nationale, informée par nos soins, s’est également déplacée pour s’assurer que l’opération se déroule dans le calme. » Avant de regretter « profondément les accusations infondées et les polémiques entretenues par une minorité d’opposants au projet, qui ne reflètent pas la position de l’ensemble des riverains. »
Cette « minorité d’opposants » a tout de même réuni une centaine de manifestants lors d’une marche, en mars 2025. Une pétition a aussi récolté 4.552 signatures, en 2023. Sans être découragé par cette adversité, Erilia défend « un projet de logements sociaux de qualité, cohérent avec les besoins des Cagnois et inscrit dans le respect des règles d’urbanisme. Nous restons mobilisés pour mener ce projet à bien dans un esprit de responsabilité et de dialogue. » Pour le dialogue, ça semble mal engagé.