Resolvabilisés comme tous les acquéreurs par la baisse des taux de crédit, les primo-accédants reviennent sur le marché immobilier en France.
Ils constituent 36,2 % des acquéreurs depuis le début de l’année 2025 selon le sondage interne réalisé auprès des 330 agences du réseau immobilier l’Adresse du 1er au 10 avril 2025.
« Mais globalement, l’activité est plus soutenue sur toutes les catégories d’acquéreurs » constate Dominique Bentéo, directrice de l’Immobilier du Bonheur (Échirolles).
Dans son agence, sur les 23 ventes signées depuis le début de l’année, seules cinq l’ont été par primo-accédants, soit 22 %. C’est presque déjà autant que l’an dernier (six sur 53). Certains ont plus de 40 ans.
« Et l’un d’eux a été déjà propriétaire de sa résidence principale par le passé » précise la professionnelle. Il suffit en effet de ne pas avoir été propriétaire de sa résidence principale au cours des deux dernières années pour être considéré comme primo-accédant par l’État et pour les prêts réglementés.
Illustration ? Quelques années locataire après un divorce, un ancien propriétaire vient d’acheter 157 000 € un T3 de 62 m² à Chirens.
«Et pareil primo-accédant peut disposer d’un apport conséquent » explique Garance Zocca, conseillère immobilier de l’agence Trenta Immobilier (Voiron, Grenoble).
Les plus jeunes aussi
Mais le vrai marqueur du retour des primo-accédants s’examine sur les plus jeunes, ceux de moins de 35 ans, voire moins de 30 ans à l’instar de cet homme de 26 ans jusqu’ici logé chez ses parents qui a acheté 92 000 € un 52 m² à rénover à Saint-Martin-d’Hères.
« Ces primo-accédants avaient disparu entre 2022 et 2024. Depuis que les taux d’emprunt ont baissé, ils reviennent. Sur les biens autour de 200 000 €, ils représentent chez nous 30 à 40 % des visites et 20 à 25 % des acquéreurs aujourd’hui » constate Jérémy Segonds, gérant et fondateur de l’agence 4Y Immobilier (Varces).
Reste à disposer de biens dans ces prix. «Le Voironnais n’est pas vraiment un marché avec des prix entre 150 et 200 000 € accessibles aux primo-accédants. Nous avons plus de secondo-accédants en ce moment » indique Philippe d’Espalungue, négociateur de l’agence Immobilière Changeur (Voiron).
Sur ses 15 dossiers en cours, un seul concerne un primo-accédant, un trentenaire célibataire qui achète à Voiron un appartement de 32 m² à rénover au rez-de-chaussée d’un vieux bâtiment. Prix de vente : 55 000 €.
La maison neuve, rêve perdu des primo-accédants ?
Depuis le début de l’année, les constructeurs ressentent un retour des acquéreurs pour la maison individuelle. Le téléphone re-sonne, des rendez-vous se font…
« On retrouve des primo-accédants, mais plus des gens de la quarantaine, avec des revenus modestes mais corrects et un bon apport. Depuis les hausses de coût de construction, du taux d’usure, du prix des matériaux et du foncier, les primo-accédants plus jeunes avec un budget serré, ceux-là même qui ont la possibilité de bénéficier d’un Prêt à Taux Zéro (PTZ) plus conséquent, sont sortis du parcours résidentiel dans la maison individuelle et peinent à y revenir. Aujourd’hui ils représentent moins de 20 % des clients contre 50 % avant » résume Vincent Bourget, président Isère du Pôle Habitat de la fédération française du bâtiment.
La réouverture du PTZ à l’habitat neuf le 1er avril dernier n’a donc rien d’une baguette magique pour ces primo-accédants souhaitant acquérir une maison.
Sur un budget moyen de 240 000 €, il pourrait atteindre au mieux 15 000 € en zone C. En zone B2, cela pourrait être le double, mais il n’y a que 20 communes iséroises éligibles, dont trois dans le Sud Isère (Chatte, Saint-Marcellin et Vinay).
«Aujourd’hui, ces jeunes primo-accédants s’orientent plus vers des maisons anciennes à rénover ou vers du logement collectif » estime le professionnel.
Une baisse des taux de crédit déterminante
Plus rares sont en effet ceux qui peuvent se positionner sur des biens à plus de 250 000 € comme ce jeune couple d’ingénieurs trentenaires ayant acquis pour 485 000 € une maison toute rénovée de 128 m² à Saint-Martin-d’Hères.
Une très bonne situation et un apport conséquent leur ont permis d’obtenir le prêt nécessaire. «Ces profils existent sur le bassin grenoblois. Et les banques leur ouvrent facilement les portes» note Jérémy Segonds.
«La baisse des taux de crédit a été déterminante pour le retour de ces primo-accédants, bloqués dans leurs projets d’achats pendant des mois» se félicite Franck Gacon, négociateur immobilier d’Immo de France Grenoble.
«Cela donne un nouveau souffle, même si les taux remontent un peu » confirme son collègue Mathieu Roche. Les prix affichés dans l’ancien n’ayant pas toujours beaucoup baissé, le professionnel constate de plus fortes négociations.
«Mais s’ils ne sont pas aidés par une donation par exemple, cela reste très difficile pour les jeunes primo-accédants d’accéder à la propriété » assure Nathalie Laugier, directrice de l’agence Action Immobilier (Seyssins).
Depuis la loi de finances du 14 février dernier, les dons d’argent consentis effectués dans le cadre familial sont en effet exonérés pour l’acquisition d’un logement ou pour des travaux de rénovation énergétique.
Ce don exonéré peut aller jusqu’à 100 000 € par un membre de sa famille, le total reçu par plusieurs membres de sa famille ne pouvant être supérieur à 300 000 € pour l’acquision du bien immobilier.
Bénéficiant d’une donation de 100 000 €, un jeune actif de 21 ans a pu ainsi acheter comptant un T2 de 50 m² dans une copropriété de 1970 récemment isolée par l’extérieur à Fontaine.
Des coups de pouce bienvenus
« Cette possibilité de donation est aujourd’hui un levier d’acquisition déterminant pour les primo-accédants » note Jérémy Segonds.
Et pas seulement sur l’immobilier ancien. Cette aide familiale peut permettre l’acquisition d’un logement neuf ou en état futur d’achèvement, des biens encore moins accessibles pour ce public compte tenu des prix du secteur.
Aidé par ses parents, un jeune homme de 27 ans a pu ainsi réserver un T2 neuf de 45 m² à 185 000 € à Vif. «Il a pu aussi solliciter un prêt à taux zéro (PTZ) et ce coup de pouce l’a aidé à finaliser son projet » indique Baptiste Blain, commercial chez Blain Immobilier.
Depuis le 1er avril dernier, le PTZ est de nouveau accessible (sous conditions) pour l’acquisition d’un bien immobilier neuf.
«On parle beaucoup de ce PTZ. Mais il s’agit plus d’un facilitateur que d’un véritable levier pour les primo-accédants. Il dépend des revenus, du lieu, du type de logement… S’ils y ont droit, c’est tant mieux » conclut Jérémy Segonds.
Il est en revanche un autre coup de pouce qui bénéficiera à tous les primo-accédants : la non application de l’augmentation de 0,5 % des droits de mutation (autrement appelés frais de notaire).
Ils sont en effet exonérés de cette hausse prévue le 1er juin en Isère.