Les deux meilleures équipes du Top 14 se disputent, dimanche à Bordeaux, un billet pour la finale de l’épreuve continentale.
Personne d’autre ne l’a fait cette année. Bordeaux-Bègles a battu deux fois le Stade Toulousain cette saison en Top 14. Fin septembre, les Unionistes avaient infligé aux champions de France et d’Europe en titre leur première défaite à domicile en Top 14 depuis deux ans et demi (12-16). Avant de confirmer, fin mars, pour le match retour (32-24). « Il faut rester mesurés, nuance Matthieu Jalibert, l’électrique maître à joueur de l’UBB. On n’a jamais joué leur équipe type, celle qui démarre les matchs de phase finale. » Cette fois-ci, on y est. Les deux meilleures équipes du championnat de France se retrouvent dimanche (16 h), au Matmut Atlantique, pour un choc au sommet avec, à la clé, un billet pour la finale de la Champions Cup, qui aura lieu à Cardiff le samedi 24 mai.
UBB-Toulouse, c’est la nouvelle forte rivalité qui enflamme le rugby français. Deux formations au jeu flamboyant, deux équipes qui composent le gros des troupes de Fabien Galthié pour le XV de France. Mais le poids de l’histoire est du côté du grand Stade, équipe référence du rugby français avec ses 23 Brennus et ses six couronnes continentales, la dernière en 2024 au terme d’un match titanesque contre le Leinster. En face, Bordeaux-Bègles est la petite équipe qui monte, qui gravit les échelons petit à petit. Avec des couacs qui font mal comme cette humiliation face aux Rouge et Noir en finale du dernier Top 14, 59 à 3 !
On va mettre toute notre énergie, notre bonne humeur et notre insouciance dans la bagarre
Yannick Bru
Yannick Bru a, dans la foulée de Christophe Urios, fait franchir un palier au club promu dans l’élite en 2011. « L’an dernier, on a perdu en quarts (contre les Harlequins 41-42, NDLR) ; cette année, on est rentré en demies. Il y a une forme de progression, veut-il positiver. On prend tout comme une leçon de plus en apprentissage. On va mettre toute notre énergie, notre bonne humeur et notre insouciance dans la bagarre. » En bon ancien disciple de Guy Novès au Stade Toulousain, l’ancien talonneur international s’amuse à renverser la pression : « Si je vous demande de jouer votre maison sur le vainqueur potentiel, vous allez la mettre sur qui ? Évidemment qu’avec la force de l’habitude, le champion en titre, son doublé l’an dernier, le grand public se dit qu’on va retrouver Toulouse en finale… »
Sauf que l’ogre rouge et noir, après avoir survolé la dernière saison en réalisant un ébouriffant doublé Champions Cup-Top 14, doit composer cette année avec de nombreux vents contraires. Il y a d’abord eu cette grave blessure d’Antoine Dupont, à laquelle sont venues s’ajouter celles de Peato Mauvako, Blair Kinghorn et, dernier sur la liste, Thomas Ramos. Ce dimanche, ce sera la première fois que Toulouse évoluera sans Dupont ni Ramos depuis le 1er mai 2017, soit une éternité de huit ans. Beaucoup d’équipes se retrouveraient dans une impasse totale avec autant de cadres sur le flanc. Pas le Stade, qui a démontré, lors de ses dernières sorties, que l’émulation et la prime à la jeunesse ne sont pas des mots en l’air.
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Damian Penaud contre Toulouse fin mars.
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« On s’accroche, on a un parcours difficile, avait souligné Romain Ntamack après le KO infligé sur le gong (18-21) à Toulon en quart de finale. On va encore une fois se déplacer en demie. On essaye de tracer notre chemin, de s’accrocher comme on peut avec notre effectif. Avec cette solidarité-là, on peut faire de belles choses cette année. » Les Haut-Garonnais ne sont jamais rassasiés. L’excellence comme moteur. S’ils s’en défendent, les joueurs d’Ugo Mola ont un évident avantage psychologique sur les Girondins, qu’ils ont battus lors des trois confrontations en match éliminatoire (demi-finale de Champions Cup et de Top 14 en 2021, dernière finale du Top 14).
Si Toulouse se prend les pieds dans le tapis, il y en a quelques-uns qui, sans aller jusqu’à lever les bras devant les médias pour s’en excuser après coup, boiront une bière tranquillement chez eux
Ugo Mola
Autre preuve de cette constance au plus haut niveau, Toulouse s’est qualifié 14 fois lors de ses 15 confrontations en Coupe d’Europe contre des clubs français (élimination en demi-finale contre Brive en 1998 au nombre d’essais inscrits, 2 à 1, après un nul 22-22). Mais la réussite du Stade, si elle force l’admiration, fait aussi grincer quelques dents, notamment après l’affaire du micmac financier autour du transfert de Melvyn Jaminet. « Si Toulouse se prend les pieds dans le tapis, il y en a quelques-uns qui, sans aller jusqu’à lever les bras devant les médias pour s’en excuser après coup, boiront une bière tranquillement chez eux. On sait ça, on vit avec ça », avait lancé, bravache, Ugo Mola avant le quart à Mayol.
L’UBB, avec son impressionnante force de frappe offensive (Louis Bielle-Biarrey, Damian Penaud…), doit désormais écrire son histoire. Terrasser sa bête noire. Pour cela, il faudra éviter les dangereuses baisses de tension aperçues contre les Irlandais de l’Ulster puis du Munster, ou les coupures d’électricité complètes, comme le week-end dernier face à La Rochelle. « Il va falloir être consistant sur 80 minutes et pas seulement sur des petites périodes », confirme Matthieu Jalibert, dont le duel avec Romain Ntamack sera l’une des clés du match. Et le numéro 10 bordelais d’ajouter : « Les deux équipes aiment tenir le ballon, avoir de longues séquences. Même si on est capables toutes les deux d’utiliser le jeu au pied, je pense que ça sera un match assez ouvert. J’espère en tout cas qu’il y aura du spectacle ! » Tout le monde n’attend que ça.