La scène est vue et revue. L’homme en noir siffle trois fois, referme les débats et les Olympiens, comme un seul homme, se dirigent vers Geronimo Rulli. Tant de fois, ils ont couru féliciter leur ange gardien, grâce auquel ils sont restés en vie. Mais dimanche soir, les mots glissés à son oreille n’étaient pas de la gratitude. Les accolades, certes chaleureuses, ne valaient pas félicitations. Il s’agissait là, plutôt, d’un amer lot de consolation.
Pierre-Emile Hojbjerg, Leonardo Balerdi et surtout Roberto De Zerbi, qui l’a longtemps enlacé dans le rond central, ont réconforté leur « Gero », le héros d’une saison devenue le bourreau d’un succès majeur. Alors qu’on lui prédisait une nuit animée dans le Nord, face à Jonathan David et compagnie, Rulli a sans doute traversé sa rencontre la plus tranquille. Le constat est sans appel. À l’exception de deux, trois ballons aériens cueillis sans difficulté, l’ancien Montpelliérain n’a jamais touché le ballon des mains. Mais il a quand même dû aller le récupérer au fond de ses filets, à un quart d’heure du terme, sur la seule frappe cadrée du Losc. Une action qui n’aurait jamais existé sans sa complicité, cette énorme boulette qui a tout gâché.
Des relances comme celle-ci, Geronimo Rulli en a tenté (et réussi) une centaine cette saison, sans que cela ne porte préjudice aux siens. Une erreur lui pendait forcément au nez. Ainsi composent toutes les équipes qui s’échinent à relancer court et sous pression, y compris dans sa propre surface. Les gardiens de Pep Guardiola, de Victor Valdes à Ederson, pourtant aussi techniques qu’un numéro 10 de Ligue 1, peuvent en témoigner. Mais celle-ci fait tache lorsqu’elle tombe au plus mauvais moment.
La troisième bévue de l’Argentin cette saison… mais la première qui coûte des points
L’Olympique, nettement dominateur, menait au score, sprintait vers sa qualification directe en Ligue des champions, lorsque Geronimo Rulli a commis l’impair. D’abord un simple six mètres échangé entre Geoffrey Kondogbia et l’Argentin. Ce dernier s’est tourné sur sa droite, vers Leonardo Balerdi, avant de se raviser sous la pression de Matias Fernandez-Pardo. Changement de plan, ce sera plutôt une balle piquée à l’opposé, vers Ulisses Garcia… sauf que le cuir a directement atterri sur le crâne de Jonathan David qui offrait sans mal l’égalisation à Fernandez-Pardo, à bout portant (1-1, 74).
Après avoir rapporté tant de points à l’OM, le champion du monde 2022 l’en a ostensiblement privé de deux très précieux. Jusqu’ici ses rares bévues, à Toulouse fin août (1-3) et contre Le Havre en début d’année (5-1), n’étaient que de simples et inoffensives anecdotes. Ceci dit, cette offrande aux Dogues ne remet nullement en question la spectaculaire saison de Geronimo Rulli, certes moins en verve cette année, mais récemment (et justement) nommé parmi les cinq meilleurs gardiens de Ligue 1 aux trophées UNFP.
Et encore moins son apport au « De Zerbi ball ». Car si l’Olympique a retrouvé dimanche ses habits de lumière, en sevrant de ballons les hommes de Bruno Genesio, tout en annihilant leur pressing, il le doit aussi aux pieds aiguisés de Geronimo Rulli, longtemps impérial à la relance. Mais l’histoire, cruelle, ne retiendra que sa boulette.