Chez Criollo, l’autisme est une richesse
Lorsque le chocolatier toulousain Criollo décide de se mettre en conformité avec son obligation d’emploi des travailleurs handicapés, c’est presque naturellement qu’il porte son intérêt sur les profils autistiques. « Parce que notre président, Pierre Dujon-Lombard, et moi-même étions sensibilisés au trouble du spectre de l’autisme (TSA), mais aussi parce que la diversité, sous toutes ses formes, est vraiment dans l’ADN de l’entreprise », explique la responsable ressources humaines Émilie Baudin. Pas évident pourtant de trouver le profil correspondant à ses besoins. « Nous avons fait plusieurs démarches avant d’avoir la chance de rencontrer Vanessa Lecomte, psychologue et job coach pour A(s)typic. Elle nous a présenté Martin, jeune homme passionné par le chocolat et les voyages, et nous a sensibilisé aux caractéristiques de son trouble. Martin a rejoint notre équipe de chocolatiers, avec laquelle il prépare son Brevet technique de maîtrise en apprentissage, et nous avons ensuite recruté Flavio en CDI à temps partiel pour me seconder, Flavio étant lui aussi autiste. » Si le premier « parle beaucoup », le second est « très renfermé ». « On s’adapte, on prend conscience de l’importance des mots et de la façon dont on s’exprime, on corrige le tir si nécessaire, on fait preuve d’empathie et d’ouverture d’esprit, et finalement, ça se passe très bien. C’est beaucoup de richesses pour tout le monde. »
Ingrid Lemelle
Alexandre : « Ce n’est ni une tare ni un combat »
Alexandre, 34 ans, travaille comme développeur full stack. « Toute ma vie, j’ai vu les autres évoluer différemment de moi, en exprimant par exemple leurs émotions. Les miennes sont très vivaces mais toujours invisibles », confie-t-il. À cause de ses troubles autistiques, comprendre des choses abstraites, comme l’humour second degré, est impossible. Alors, le jeune homme a appris à faire illusion : « J’ai souvent imité les autres. Je rigolais quand ils rigolaient, sans avoir compris pourquoi. » Dans le cadre professionnel aussi, Alexandre conserve un masque afin de cacher son malaise et de limiter l’impact de ses difficultés de communication. « Je n’ai jamais voulu me servir de ma situation comme excuse. Même si cela m’handicape parfois, ce n’est ni une tare ni un combat, juste une lente acceptation de soi. J’ai pris conscience que personne ne fonctionne de la même manière, les autistes non plus. Je ne suis pas défectueux ! » De fait, ceux qui décryptent sa manière d’être et de faire peuvent tirer parti de ses qualités atypiques et hautement appréciables. « Je suis incapable de rebondir d’un sujet à un autre, en revanche je sais rester focus très longtemps, des jours voire des mois sur la même chose. Et puis, en informatique peut-être plus qu’ailleurs, le diable se cache dans les détails. Or moi, j’anticipe le moindre d’entre eux », constate-t-il simplement. Sans en tirer aucune gloire.
Marie-Dominique Lacour
Sur la photo : Martin, en apprentissage chez le chocolatier toulousain Criollo. Crédit photo : Hélène Ressayres – ToulEmploi.
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