“Nous vous écrivons depuis des écoles cocotte-minute, sur le point d’exploser. Nos écoles vont mal. Les enfants qui y sont accueillis vont mal. Les enseignantes qui accueillent nos enfants vont mal. Nos écoles atteignent des points de craquage, et la bulle de bienveillance et d’apprentissages sereins que devraient représenter les écoles maternelles et élémentaires, est de plus en plus mise à mal”. Ce constat, que partagent les quelque 300 enseignants qui se sont mis en grève ce lundi 5 mai en Isère, est celui que dressent les parents d’élèves délégués de plusieurs établissements de la Villeneuve dans une lettre adressée à la ministre de l’Éducation Élisabeth Borne.

“Les enseignants se changent en gestionnaire du moins pire”

Un malaise qui couve depuis de longs mois déjà dans ce quartier populaire du sud grenoblois où les personnels éducatifs, soutenus par les parents d’élèves, avaient déjà organisé deux rassemblements avant cette journée de grève.

“Des enfants en situation de handicap sont accueillis dans les classes [et ils y ont pleinement leur place]. Seulement, l’accompagnement dont ils devraient bénéficier est inexistant pour certains, ou très insuffisant pour d’autres. Se crée alors un mal-être profond pour l’enfant accueilli, un mal-être pour les Atsem et les enseignants, un mal-être pour les autres enfants. Les enseignants organisent des trocs d’heures à mettre sur un enfant, plutôt qu’un autre, car l’enjeu à ce stade n’est pas que l’enfant ayant besoin d’accompagnement aille bien, mais comment faire en sorte, que ça n’explose pas dans la classe. Les enseignants se changent en gestionnaire du moins pire. Est-ce cela l’école publique en France ? Où est la promesse d’égalité, de fraternité et de liberté ?” interrogent les parents dans leur lettre en détaillant les situations dans chaque établissement.

“La vitrine ne tient plus. Tout se fissure”

Listant des heures d’accompagnement non pourvues, des dossiers en attente, des enseignants à bout qui se mettent en arrêt maladie… “Ces besoins ont été remontés par les enseignants à leur hiérarchie. Certains parents ont également alerté l’inspecteur de l’Éducation nationale mais la situation ne change pas. En fait si, elle s’aggrave ! La liste est longue et s’allonge au fil des jours. Les réponses sont inexistantes. Combien d’enfants bénéficieront de l’accompagnement dont ils ont besoin et dont leur classe a besoin pour la rentrée de septembre ? Les enseignants tirent la sonnette d’alarme, car la vitrine ne tient plus. Tout se fissure. Nous, en tant que parents d’élèves de REP +, nous exigeons que l’égalité des chances et que l’école inclusive ne soient pas que des mots. Nos enfants ne sont pas de chiffres, en face desquels il s’agit de mettre d’autres chiffres !”

Ils demandent à la ministre que soit “respectée la loi en ce qui concerne la mise en place des heures AESH pour chaque enfant notifié, de remplacer sur la durée le poste d’enseignant référent sur le secteur 6 de la ville de Grenoble (le rectorat a indiqué son arrivée ce lundi 5 mai, NDLR), de diminuer le nombre d’enfants par classe sur tous les niveaux en REP + et pas seulement sur les GS, CP, CE1 et de former réellement les AESH et revaloriser leur travail”. Et les parents d’élèves concluent en invitant la ministre à “venir à notre rencontre, ici dans nos écoles, à vivre une journée à nos côtés, à la rencontre des enseignants qui s’occupent du mieux qu’ils peuvent de nos enfants. À éprouver leurs difficultés, nos inquiétudes et à apporter les réponses adéquates”.