A-t-on jamais vu un seul appareil photo la mitrailler autant ? À Strasbourg, la cathédrale est depuis début mars sous l’objectif d’un drone , ses façades extérieures ont déjà fait l’objet de quelque 20 000 clichés.
« On essaie de maintenir une distance de dix mètres, présente le télépilote Frank Pouvreau. À l’instar de ses quatre collègues affectés à la mission, il assure par là qualité technique et sécurité. Le gros « bourdon » de 900 grammes ne doit en aucun cas cogner le grès ni les vitraux ; encore moins chuter.
En milieu fortement peuplé et fréquenté
« On surveille les oiseaux, on ne décolle pas s’il pleut ou s’il vente, en cas de trop forte luminosité non plus », explique le responsable. La mission est particulière : « On intervient en milieu fortement peuplé et fréquenté. On est obligé de découper le travail pour s’adapter à la vie de l’édifice (visites, messes). »
Le « shooting » va se poursuivre en intérieur, avec pour but de récolter d’ici la fin de l’année tout autant de prises de vue. À partir de cet album de 40 000 clichés sera réalisé un modèle 3D par « photogrammétrie , une technique de reconstitution par recouvrement », précise Frank Pouvreau.
Jamais numérisée
L’opération – budgétée à 200 000 euros – a été commandée par la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) du Grand Est. « À part une petite partie d’un de ses portails en 2020-2021, Notre-Dame n’avait jamais été numérisée », retrace son conservateur adjoint des monuments historiques, Alexandre Cojannot.
Ce grand scan, réalisé par des agents de la Direction départementale des territoires du Bas-Rhin (DDT 67), est possible, dans sa « précision du centimètre », grâce à l’armée de terre. Le 28e groupe géographique (GG) de Haguenau apporte ses compétences « en matière de positionnement », informe le commandant David. Une première dans le domaine patrimonial.
Déjà un résultat
« 21 châteaux alsaciens ont déjà été passés au crible optique d’un drone, d’autres cathédrales françaises sont en passe de l’être », ajoute la directrice de la Drac Isabelle Chardonnier.
À partir de ce « jumeau digital » pourra être dressé le diagnostic « sanitaire » de la vénérable Notre-Dame. Et programmé le travail d’entretien et de restauration. Le drone a déjà montré que « le massif occidental est dans un état pire qu’imaginé », révèle la directrice de la Drac.