Fruit de la fusion entre les anciens groupes PSA et FCA, l’entreprise Stellantis a hérité de plusieurs dossiers compliqués. En particulier du côté français, puisqu’elle doit désormais gérer la colère de milliers de propriétaires de véhicules Citroën, DS, Opel ou Peugeot dont le moteur 1.0 ou 1.2 Puretech rencontre de graves problèmes de fiabilité. En plus de souffrir d’une dégradation souvent prématurée de sa courroie de distribution, ce trois-cylindres essence a tendance à consommer de l’huile de manière excessive. La multinationale est même visée par au moins deux actions collectives en justice dans l’hexagone, l’une très médiatisée, l’autre plus discrète.
Une plateforme d’indemnisation controversée
Depuis le début de l’année, pour tenter de sortir de cette crise, Stellantis a lancé une plateforme numérique d’indemnisation qui permet de demander un remboursement de certaines réparations. Mais cet outil assez novateur a fait l’objet de vives critiques, notamment en raison d’un délai de réponse souvent qualifié de trop long. D’après le service de communication de Stellantis, « c’était volontaire parce qu’à l’écoute de nos premiers clients, on s’est rendu compte que nos conditions de remboursement étaient peut-être jugées trop restrictives ».
Quelles sont les nouvelles conditions pour profiter d’un remboursement en cas de panne d’un 1.2 PureTech ?Le carnet d’entretien peut désormais se substituer aux factures, à condition que l’entretien ait été effectué dans le réseau Citroën, DS, Opel ou Peugeot.© Monique Dupont Sagorin
Plusieurs mesures ont donc été prises pour offrir davantage de souplesse :
- Les incidents survenus jusqu’au 31 décembre 2024 sont désormais pris en compte alors que l’entreprise s’était initialement limitée au 31 mars 2024, date d’entrée en vigueur d’une garantie spéciale portée à 10 ans/175 000 km pour certains problèmes du 1.2 PureTech. En revanche, la période gérée par cette plateforme démarre toujours au 1er janvier 2022.
- Le carnet d’entretien dûment tamponné peut désormais servir à prouver que le suivi du véhicule a bien été effectué selon les préconisations du constructeur, alors qu’il fallait au départ fournir les trois dernières factures. Mais attention, dans le premier cas, seuls les tampons du réseau Citroën, DS, Opel ou Peugeot fonctionnent, alors que les factures peuvent provenir d’un autre professionnel de l’automobile.
- Le livret de famille est désormais accepté pour justifier que certaines factures de réparation ne soient pas forcément au nom du propriétaire, par exemple quand un véhicule est utilisé par des petits-enfants alors qu’il appartient encore aux grands-parents.
Prochainement, cette plateforme d’indemnisation sera en outre élargie à d’autres pays que la France et l’Espagne, les deux seules contrées à profiter de cet outil numérique pour l’instant.
Stellantis révèle de premiers chiffres plutôt flatteursD’après Stellantis, une automobiliste aurait tenté d’obtenir un remboursement… pour une réparation effectuée sur un Dacia Duster.© Dacia
Les premiers courriers d’acceptation seraient, eux, partis depuis le 15 avril et Stellantis en profite pour donner quelques chiffres. Il indique ainsi avoir reçu 8 226 dossiers pour l’instant et en avoir traité 4 337, avec un taux d’acceptation proche des 60 %. « Pour nous, honnêtement, c’est une bonne réponse », assure notre interlocuteur au service communication de l’entreprise. « On a reçu par exemple 10% de dossiers qui n’avaient rien à voir avec le PureTech, on a même une personne qui voulait qu’on lui rembourse les frais de son Dacia Duster ! » 12 % des refus seraient par ailleurs liés à des réparations effectuées en dehors du réseau, alors que 5 % d’entre eux proviendraient d’une absence de suivi du plan de maintenance. Sur ce point, la multinationale assure pourtant avoir fait preuve d’une certaine souplesse, notamment quand des révisions n’ont pas pu être faites à temps à cause du Covid ou d’un problème de santé. Mais il reste des cas pour lesquels le manque d’entretien serait manifeste, alors que c’est pourtant un aspect crucial pour préserver la bonne santé d’une mécanique… a fortiori quand elle a déjà la réputation d’être fragile à la base.
L’association des Victimes du Puretech contre-attaque
Bien sûr, à L’Automobile Magazine, nous prenons cette communication officielle avec une certaine prudence. L’ampleur exacte du « scandale » du 1.2 PureTech demeure difficile à connaître, et notre formulaire fiabilité reçoit encore régulièrement des témoignages de propriétaires confrontés à des problèmes majeurs avec ce moteur ou avec son dérivé, le 1.0 PureTech. L’association Victimes du PureTech n’a d’ailleurs pas tardé à entamer une contre-offensive en demandant des mesures encore beaucoup plus fortes :
- La reconnaissance officielle d’un vice caché par Stellantis.
- Un rappel massif des véhicules concernés, avec remplacement gratuit des pièces défectueuses.
- Un dispositif national clair, automatique et transparent de prise en charge intégrale des réparations, sans conditions discriminatoires.
- Des excuses publiques aux consommateurs.
- La prise en compte de toutes les victimes, qu’elles soient passées par un garage agréé ou indépendant.
Elle affirme aussi que « ce soi-disant « geste » de Stellantis n’est pas une mesure de réparation, c’est le début d’un aveu, arraché de haute lutte par les mobilisations, les recours judiciaires et la pression médiatique ». Le bras de fer que cette association mène avec la multinationale, notamment à travers l’action collective en justice menée par Maître Christophe Lèguevaques, est donc loin d’être terminé. Il pourrait encore se prolonger de longues années devant les tribunaux. Mais il aura tout de même déjà aidé certains propriétaires à se faire indemniser, tout comme la forte médiatisation accordée aux problèmes du 1.2 Puretech, sur notre site comme ailleurs.
La chaîne du 1.5 BlueHDi toujours absente de la plateforme d’indemnisationUne association a été récemment créée pour mieux défendre les automobilistes qui ont eu des problèmes de chaîne sur le 1.5 BlueHDi du groupe Stellantis.© Association victimes chaîne 1.5 BlueHDi
En revanche, pour l’instant, Stellantis ne donne toujours aucune date pour l’ouverture de sa plate-forme d’indemnisation aux nombreux cas de rupture de chaîne d’entraînement des arbres à cames du 1.5 BlueHDi, un autre moteur souvent défectueux de l’ancien groupe PSA. Dès le départ, il nous avait pourtant bien été annoncé que les propriétaires de ce quatre-cylindres diesel seraient également pris en compte dans un second temps, et pas seulement pour les défaillances de son réservoir d’AdBlue comme c’est le cas aujourd’hui. Même si l’entreprise ne peut pas forcément éteindre tous les feux en même temps, il faut donc souhaiter que cette modification ne tarde pas trop… au risque de voir un autre incendie prendre de l’ampleur : l’association des victimes de la chaîne du 1.5 BlueHDi réfléchit aussi à une action collective en justice de son côté.