Par
Inès Cussac
Publié le
9 mai 2025 à 6h06
Quand elles arrivent dans une cage d’escalier pour changer une serrure de porte d’entrée, Solène et Elie, 23 et 25 ans chacune, provoquent la surprise avant d’inspirer confiance aussi rapidement. « Il y a souvent des arnaques avec de faux serruriers, ils ont l’adresse et connaissent la serrure, ça peut inquiéter les clients. Nous, en termes d’intimidation, on ne fait pas trop peur », reconnaît Solène.
Les deux jeunes femmes ont créé leur entreprise en juillet 2024, baptisée « Luciole Serrurerie » qui intervient à Paris et en Île-de-France. En parallèle, elles se sont aussi découvert une vocation d’influenceuses. Ce qui aide, parfois, auprès des clients. « Ça nous donne de la visibilité, les gens connaissent déjà notre tête », indique Solène. Sur Instagram, le compte affiche près de 19 000 abonnés au compteur et dépasse les 300 000 vues sur TikTok. Une prouesse pour le duo qui s’impose dans la serrurerie, un secteur dominé par les hommes.
Sexisme et misogynie
« C’est un milieu ultra-masculin. On se prenait des remarques ultra-misogynes de nos collègues », se souvient Solène. Et du côté des clients, les commentaires ne sont pas mieux : « Des clients ne voulaient pas que ce soit une femme qui intervienne. On nous disait que notre place était dans la cuisine ou derrière un bureau. »
Pas de quoi décourager les deux serrurières qui ne se connaissaient pas au départ. L’une, Elie, travaillait dans plusieurs branches d’activités liées au spectacle notamment. L’autre, Solène, est tombée dedans quand elle était petite. Grâce à son père qui pratique ce métier, elle « touche depuis toujours des serrures ».
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Cette dernière s’était par ailleurs déjà lancée sur les réseaux sociaux pour parler de son activité. Montrer et expliquer les pièces qu’elle manipule est un point important pour la jeune femme qui ne voyait pas ce canal de diffusion comme moyen pour faire la promotion de son entreprise. « C’était un créneau très peu pris par les serruriers, ça donnait de la visibilité mais surtout ça permettait de prévenir des arnaques », indique la serrurière à la tête châtain. De son côté, Elie voulait s’associer avec une femme pour créer une entreprise 100 % féminine et dire adieu aux clichés qui collent à la peau de ce métier. « Tout ça ensemble, ça faisait déjà une bonne base », revoit Solène. La féminisation de la profession progresse mais lentement. Selon la Fédération française du bâtiment, en 2024, les femmes représentaient environ 13,3 % des effectifs dans le secteur.
« Les femmes font confiance aux femmes »
Et depuis un an et demi, l’entreprise décolle. Dans les colonnes de Technikart, devant les caméras de Brut, M6 et TF1 ou encore dans les recommandations de Binge Audio, les deux jeunes femmes prennent le terrain. Elles ont même lancé une campagne de recrutement pour un poste en CDI. « Nous avons reçu des candidatures plutôt féminines, avec seulement trois hommes », reconnaît Solène.
Du côté relationnel, les clients ne sont plus vraiment les mêmes. Parmi ceux qui les choisissent après avoir vu leurs interventions sur les réseaux sociaux, « il y a vachement de femmes », fait savoir la serrurière-influenceuse. « Les femmes ont plus confiance avec des femmes. Quand on intervient, on devient un peu le psy des clients. Le changement d’une serrure c’est souvent pour un déménagement ou après un divorce… Ce sont des moments clés, donc la discussion vient facilement. »
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