Régulariser «ferait la démonstration qu’il n’y a pas d’État de droit», a fait savoir l’assemblée communautaire de Sèvre et Loire, sommée de créer 12 nouveaux terrains sur son territoire déjà parsemé de 57 installations illicites.

Vent de fronde chez les maires ruraux. Le nouveau schéma départemental d’accueil des gens du voyage irrite des élus de la communauté de communes de Sèvre et Loire, à l’est de Nantes (Loire-Atlantique). En cours de finalisation par les services de l’État, la dernière édition du document préconise en effet la création de 12 nouveaux terrains d’accueil sur le terrain de cette collectivité du vignoble nantais. L’injonction passe mal sur place, où 57 terrains sont illicitement occupés par la communauté des gens du voyage, en dehors des aires d’accueil et de moyens passages déjà aménagés.

Maire de Vallet, la plus grande commune de Sèvre et Loire, Jérôme Marchais s’indigne en particulier du traitement de faveur dont bénéficient ces installations sauvages. Sur les 39 camps de gens du voyage implantés sur la commune, à une quinzaine de kilomètres de l’agglomération nantaise, 21 sont des installations illicites. Cinq procédures administratives sont en cours pour tenter de déloger les derniers venus. «L’État nous demande de passer l’éponge et de ne pas respecter la loi zéro artificialisation nette , en entérinant la transformation des terrains agricoles occupés en zones bétonnées. Or les autres habitants de la commune ne bénéficient pas d’un pareil passe-droit», témoigne au Figaro cet édile agacé par l’application à géométrie variable du droit et des règles d’urbanisme.

Un coût «conséquent et insoutenable»

Jérôme Marchais s’inquiète également du mauvais signal envoyé par ces régularisations exigées par la prochaine mouture du schéma d’accueil. «Ce deux poids deux mesures pourrait encourager de nouvelles installations aux dépens des terrains agricoles», ajoute le maire de Vallet, qui n’a pas digéré l’installation avortée sur sa commune du siège de la Ligue de football des Pays de la Loire. Soit un projet qui avait tourné court en début d’année, notamment en raison de la présence de zones humides sur ce secteur du vignoble nantais et au manque de terrains compensatoires. Un revers frustrant, mais en conformité avec le plan local d’urbanisme. «Si la loi n’est pas la même pour tous, alors pourquoi s’embêter à déposer des permis de construire ?», s’interroge l’élu.

Le 30 avril, le conseil communautaire de Sèvre et Loire a ainsi exprimé un souhait défavorable à la création de 12 «lots d’ancrage en terrain familial locatif» à destination des gens du voyage, comme prescrit par le nouveau schéma. «La régularisation de terrains n’est pas envisageable, car cela ferait la démonstration qu’il n’y a pas d’État de droit – source d’inégalité de traitement -, serait source d’incompréhension pour les habitants (…), et augmenterait les tensions dans un contexte déjà extrêmement contraignant en termes d’aménagement du territoire», énumère la délibération, qui mentionne par ailleurs le coût financier «conséquent et insoutenable» de ces éventuels travaux, porté à 1,5 million d’euros.

«La cohabitation y est parfois complexe, sans compter les dégradations. On n’a donc pas la capacité de mettre en œuvre des travaux pour aménager de terrains familiaux locatifs : l’investissement serait lourd, tout comme le fonctionnement», résume Christelle Braud, maire de Divatte-sur-Loire et présidente de la communauté de communes de Sèvre et Loire, citée par nos confrères de L’Hebdo de Sèvre et Maine . Attendue pour juin, la publication officielle du prochain schéma départemental d’accueil des gens du voyage devrait notamment imposer à Nantes-Métropole la création de 180 lots d’ancrage pour la période 2025-2031.