Partout dans le monde, le Bordelais, via le Conseil des grands crus classés de 1855, veut convertir les plus jeunes aux vins de la rive gauche.

Certains voudraient croire que le monde du vin se divise en deux. D’un côté, il y aurait de vieux producteurs, des gens d’un autre siècle vivant dans de sombres châteaux et réalisant des crus démodés. Face à eux, il y aurait des jeunes gens amateurs de cuvées aux appellations confidentielles, qui ne toucheraient jamais un verre de pauillac ou de margaux de peur que le simple contact avec ce jus ne fasse apparaître des rides sur leurs visages lisses. Foutaises ! Les plus jeunes peuvent aimer. Et vice versa.

Partant du principe que les étudiants des écoles professionnelles d’aujourd’hui seront les futurs sommeliers et maîtres d’hôtel de palaces, le Conseil des grands crus classés de 1855, animé par son président Philippe Castéja – l’une des personnalités les plus influentes du vignoble bordelais – et par Sylvain Boivert, ne cesse de les sensibiliser à la subtilité de ces cuvées.

Depuis une vingtaine d’années, l’association mise sur les vingtenaires avec des programmes spécifiques de formation. Le Conseil des grands crus a noué des liens forts avec la section sommelière du lycée hôtelier de Talence (33), le concours de meilleur sommelier du Japon, celui des meilleurs accords mets et vins de l’école de cuisine Ferrandi, et anime des conférences, des dégustations…

Prêcher la bonne parole

Le Conseil multiplie encore les partenariats avec les écoles hôtelières comme celle de Lausanne, avec l’université Cornell, aux États-Unis, et une dizaine d’autres institutions. Et reçoit dans les plus prestigieuses propriétés du Médoc, chaque année, plusieurs dizaines d’étudiants de l’Institut des Masters of Wine britannique. Dans un mondovino globalisé, les Bordelais ne sont pas les seuls à faire la promotion de leurs cuvées auprès de la jeunesse. La concurrence est même rude. Certains vins américains et de grands groupes internationaux associent leur présence dans les prestigieuses écoles suisses à des dotations, qui oscillent autour de 100.000 euros chaque année.

Le Conseil des grands crus classés, quant à lui, dispose d’autres atouts : les châteaux fournissent les indispensables vins et les propriétaires ou les directeurs se rendent en personne aux quatre coins du monde pour partager leur passion, raconter leur métier, prêcher la bonne parole. Les Bordelais touchent ainsi bon an mal an entre 2 000 et 3 000 étudiants. À Taïwan, le National Kaohsiung University of Hospitality and Tourism a fini par inscrire les noms des grands crus classés de Bordeaux sur les murs des salles de classe. Le travail de l’ombre finit par payer.